<Retour au sommaire du site>


Le Château Bélise





Présenté par
Noël Gardon







Décembre
2021




Le site de Bélise d'après Gabut il y a plus d'un siècle

      En ce qui concerne le passé de notre Histoire ou de notre Langage, depuis bien des années je suis étonné par les erreurs, voire les mensonges qui sont généralement acceptés, et même parfois enseignés, sans l’ombre de la moindre critique Aujourd’hui, au crépuscule de ma vie je constate l’inutilité qu’il y a à vouloir combattre ces contre-vérités, et, dans un sens, je le comprends.

    Les évolutions, les évènements ont eu lieu avec les conséquences dont nous subissons les effets de façon plus ou moins importante, mais sur lesquels nous avons l’impression de pouvoir agir. Mais les causes en sont passées, nous n’y pouvons plus rien, alors si on donne une raison acceptable pour notre mentalité actuelle, pourquoi ne pas l’accepter, en discuter ne changera rien à notre vie présente. On ne se soucie guère alors de vérifier si la raison donnée n’est pas contraire à celle admise pour un autre évènement et si cette prétendue cause est conforme à la réalité.

    Ainsi, quand on parle de Charlemagne, tout de suite vient à l’esprit la formule « L’Empereur à la barbe fleurie ». On ne se soucie pas de savoir ce que cela veut dire, ni de se rappeler que cet empereur ne portait pas la barbe, comme en font foi la petite statue équestre conservée à Aix la chapelle, ou les monnaies frappées à son effigie. Les historiens expliquent que « barbe fleurie » est simplement une image poétique et Charlemagne était sans barbe a une époque et la portait à une autre, circulez carrosses il n’y a rien à voir… Or cette formule résulte d’une erreur d’écriture, une erreur de frappe dirait-on aujourd’hui. Elle figure pour la première fois dans la « Chanson de Roland » qui est une chanson de geste. Comme tous les textes de ce genre il est destiné à être récité oralement. Lorsqu’un scribe se décida de le mettre par écrit, il entendit Turoldus, le poète qui le déclamait, déclinait suivant la formule consacrée, dire, en parlant de Charlemagne : « L’Empereur à la barba affleurée » et il écrivit ce qu’il avait entendu : « L’Empereur à la barba fleurée » ce qui ne veut rien dire, alors qu’affleurer, signifie mise à fleur, et ici à fleur de peau, c’est-à-dire rasée, ce qui pour les gens de l’époque habitués depuis plusieurs siècles à des empereurs germaniques abondamment barbus, la pilosité étant un signe de virilité et de force, était bien un signe caractéristique, de cet empereur. Comme cela n’avait aucune conséquence, la formule qui plaisait a été adoptée, même si elle est fausse et ne signifie rien.

    C’est en onomastique que l’on peut constater un grand nombre de ces erreurs ; ce qui est normal puisque cette science, dérive de la linguistique qui elle-même est établie à partir d’un postulat très discutable prétendant que la langue française dérive en grande partie de la langue latine. Ainsi Loire le nom du fleuve qui traverse la France dériverait, par une suite de transformations dues à la prononciation, de Liger nom qu’elle portait à l’époque de la conquête des Gaules par Jules César… Que la Loire est appelée Liger à cette lointaine époque il n’y a pas lieu d’en douter, Strabon en parle ainsi que Polybe mais que Loire dérive de ce nom est une autre affaire.

    Dans le Bulletin de la Société historique et archéologique de l’Orléanais, en 1942 M.J Soyer un éminent étymologiste, cité parfois comme référence par Dauzat, a publié une étude sur l’étymologie du nom de la Loire. Après avoir donné quelques indications sur les plus anciennes formes connues du nom de la Loire, il élimine plusieurs étymologies du nom de Liger, et admet une origine pré celtique, préconisée par d’Arbois de Jubainville, qui fait dériver ce nom du même radical qui a donné le latin rigare = arroser.

    Après avoir dit que ce nom est masculin il explique comment le nom Loire dérive naturellement de Ligere(m) : Le premier e étant bref, l’accent se porte sur l’i, qui est bref, lui aussi. Or, l’i bref accentue, comme l’e long accentué, devient en français la diphtongue ei, puis oi. Le g se change en yod, qui se combine avec la voyelle précédente ; d’où Leire et Loire.

    Enfin il termine en expliquant comment le nom de Loire qui était à l’origine masculin est devenu féminin. Il repousse l’hypothèse par laquelle ce changement serait intervenu par l’influence des noms latins féminins terminés en « is » comme « navis », « clavis ». Et il montre que l’on parlait toujours autrefois de « la rivière de Loire », pour lui le mot rivière ayant été oblitéré dans le langage courant on n’a plus dit que « la Loire ».

    M.Soyer est un savant, il est honnête et se conforme à ce que disent les règles officielles de la linguistique, mais il y a d’autres linguistiques qui nous apprennent autre chose.

 
Panorama sur l'Oeillon et les Trois Dents vu du crêt de La Baronnette

    Louis-Ferdinand Flutre, aux dires de Marguerite Gonon, linguistique aussi timide et modeste que compétent, professeur de linguistique à l’Université de Lyon, dans son ouvrage intitulé Les éléments de toponymie pré-gauloise en Lozère, publié en 1952, aux « Belles Lettres » dans la série des Annales de l’Université de Lyon, consacre un chapitre au mot « Ar ». Après avoir reconnu la présence de ce mot dans plusieurs noms de cours d’eau du département, il indique très clairement que « Voilà longtemps que l’on a supposé que cette racine « Ar » appartenant à une langue inconnue, devait signifier « eau » ou plus spécialement « eau courante » ». Il donne des exemples.

    Albert Dauzat, le très célèbre et respecté linguistique, dont les travaux d’onomastique font toujours autorité, fondateur de la revue linguistique Le Français moderne, et professeur à l’école pratique des Hautes études, dans son livre La toponymie française (Paris 1971) p.131 : à aussi quelques pages à propos de ce même mot ar. Il reprend textuellement, la phrase de L.F. Flutre : « Voilà longtemps qu’on a supposé que cette racine, appartenant à une langue inconnue, devait signifier « eau » ou plus spécialement : « eau courante » … Dans ses conclusions il écrit (p.141) Ar- est bien une base hydronymique pré-indo-européenne …

    Ce mot « Ar », signifiait donc autrefois, dans nos régions, « eau qui coule ». Mais, aujourd’hui en français, l’eau courante est d’un genre indéterminé, tantôt masculin tantôt féminin. En effet nous disons La Source, puis Le Ruisseau, ensuite La Rivière, Le Fleuve, etc… Quant aux noms propres donnés aux cours d’eau ils sont d’un genre indépendant de celui du cours d’eau auquel il se rapporte. Nous avons bien Le Rhône, et La Saône, pour un fleuve et une rivière mais nous avons la Seine pour un fleuve et le Furan, pour une rivière. Nous ne parlons pas de La Loire qui a changée de genre au XVIIe siècle. D’abord masculin. Nous avons tous en mémoire ces vers de Joachim du Bellay :

    Plus me plaist le séjour qu’on basty mes aïeux

    Que des palais romains le front audacieux

    Plus que le marbre dur me plait l’ardoise fine

    Plus mon Loyre gaulois, que le Tibre latin

    Plus mon petit Lyré, que le Mont Palatin

    Et plus que l’air marin la douceur angevine.

    Pour devenir féminin après. Pour La Fontaine elle était déjà au féminin.

    « Douce quand il lui plaît quand il lui plait si fière

    Qu’à peine arrete-t-on son cours impétueux

    Elle ravagerait millle moissons fertiles

    Engloutirai des champs, ferait flotter des villes

                                (Lettres à sa femme 3-09-1663)

    C’est Agrippa d’Aubigné qui, avec peut-être l’historien André Du Chêne, furent les derniers à parler de Loire au masculin.

    Cette imprécision tient à ce que dans notre français moderne, et depuis bien des lustres, nous n’avons que deux genres : le masculin et le féminin. Mais autrefois il y avait un troisième genre, le neutre que l’on trouve d’ailleurs dans certaines autres langues et dans plusieurs de nos patois. Le masculin et le féminin étaient réservés, comme leurs noms l’indiquent, aux êtres animés, c’est-à-dire l’homme et les animaux. Le masculin aux mâles avec l’article « le » et le féminin aux femelles avec l’article « la ». Le neutre utilisait l’article « lo ». « Ar », eau courante était du genre neutre, et précédé de l’article correspondant on disait : « lo Ar ». Cette expression désignait aussi bien le fleuve que la rivière.

    Mais, dans son article cité plus haut M.Soyer donne des indications intéressantes. Il précise en effet : Au reste, les vieux mariniers et les vieux pêcheurs de Loire ne désignent point le plus grand fleuve de France par un autre mot que « la rivière », tout court. Pour eux, Loire est un mot livresque, que l’on n’emploie guère qu’en parlant à des étrangers.

    Né sur les bords de la Loire blésoise, j’ai entendu fréquemment, dans ma jeunesse, des expressions comme celles-ci : « la rivière est en crue ; il y a du rabais dans la rivière ; la rivière est embâclée ; il y a de la houle sur la rivière ».

    Et cette façon de parler ne serait, en somme, que la traduction de Liger, mot préhistorique banal, signifiant « cours d’eau » ; pour les riverainsn bien entendu, c’est le cours d’eau par excellence.

    Nous voici donc informés. Ce que disaient les riverains du temps de la jeunesse de MSoyer, n’est autre chose que disaient leurs lointains ancêtres du temps de César. Quand celui-ci a demandé comment s’appelait cette rivière, c’était un étranger et on lui dit le nom « livresque » de Liger, mais les indigènes disaient simplement « la rivière » et dans leur langage c’était « lo Ar » d’où Loire. C’est d’ailleurs l’inverse qui s’est passé pour la Saône. César a posé la même question, mais celui qui lui a répondu a utilisé le langage courant et a dit « Arar », le doublement du nom marquant l’importance de la rivière par rapport aux autres, alors que le nom « livresque » était : Sauconna.

    Notons enfin que « liger » évolue en Leire, puis Loire, il faut prononcer « Ligère ». Or, aujourd’hui les latinistes expliquent que le « g » latin se prononçait « gue ». Liger devrait donc être prononcé « Liguère », ce qui ne permet pas d’arriver à  Leire. Par contre « Liguère » renvois à Ligures, comme Ebre renvois à Ibère, mais cela est une autre histoire.

    Prenons un autre exemple. Saint-Etienne est le nom du chef-lieu du département de la Loire. Ses habitants sont appelés les « Stéphanois ». Cette appellation dérive d’un autre prénom : « Stéphane ». Aucune difficulté disent les linguistes Etienne et Stéphane venant tous les deux du même nom latin Stephanus. Stéphane étant la transcription savante faite par les clercs, tandis qu’Etienne, est le résultat de l’évolution par le parler vulgaire du même mot.

    Feu l’abbé Pinton a, dans une étude consciencieuse publiée en 1990 dans le numéro 157 du Bulletin du vieux Saint-Etienne, essayé en suivant les règles linguistiques en vigueur, de montrer l’évolution de Stephanus et Etienne. Il explique d’abord que Stephanos en grec, veut dire à la fois cercle d’une armée sur le champ de bataille ; enceinte d’une ville, couronne de feuillage, de fleurs, de métal dont on ceignait la tête des vainqueurs, et conclu sa remarque en disant que le participe passé, pris adjectivement, devait facilement donner lieu à un surnom : le couronné.

    L’abbé Pinton appuis sa démonstration sur les règles de la linguistique en vigueur actuellement. Mais ces règles sont pour nous en grande partie erronées en raison de leur postulat de départ qui relie étroitement langue française à l’ancienne langue latine. Alors reprenons les faits tels qu’ils nous sont connus.

    Je simplifie. Les disciples du Christ s’étant multipliés les apôtres n’arrivaient plus à faire ce qu’on appellerait aujourd’hui la catéchèse, et à s’occuper de la vie matérielle de la communauté grandissante. Sans doute y eut-il des abus comme dans toute société humaine, qui entraînèrent des récriminations. Ils décidèrent donc de se faire adjoindre sept diacres qui s’occuperaient de la vie matérielle quotidienne. Parmi ces sept membres l’un d’eux, dont on ignore le nom, fut choisi en premier. Mais les juifs furent jaloux des miracles qu’il accomplissait au nom de Jésus-Christ, ils le firent comparaître devant leur tribunal, mais ce diacre, par ses réponses à leurs questions les ayant encore plus excités, ils l’entrainèrent hors de Jérusalem et le lapidèrent. Un peu plus tard un juif Gamaliel, qui défendait les chrétiens, pris son corps et le fit enterrer dans son jardin à quelques distances de la ville. Quatre cent ans plus tard, Gamaliel apparut en songe à Lucien et lui dit d’aller chercher le corps du martyr, avec le sien et celui de son propre fils. Après plusieurs hésitations, Jean, évêque de Jérusalem crut aux visions de Lucien et fit déterrer les corps de Gamaliel, de son fils et du diacre premier martyr. Sur le corps de ce dernier était une pierre sur laquelle était gravé le mot « Cheliel ». Qui semble être celui qui lui avait été donné au moment de son martyre. Or « Cheliel » en syriarque veut dire « couronné » ; et c’est sous ce nom qu’était racontée, pour l’édification des néophytes, l’histoire de ce premier martyr. Lorsque Saint Paul, qui dit-on avait participé à la lapidation du diacre, et ses disciples évangélisèrent les Grecs, ils traduisirent ce mot, de « Cheliel » qui n’était pas un nom propre, mais un qualificatif, dans la langue du pays et ils l’appelèrent Stephanos, qui en grec veut dire aussi : « le couronné ».

    Il en est exactement de même quand les évangélisateurs vinrent en Gaule, ils racontèrent la même histoire et traduisirent ce qualificatif de « couronné » en langage vulgaire. Je ne connais pas exactement le mot gaulois qui fut utilisé, mais il se rapprochait sans doute de « Tiare » qui est le nom bien connu d’une sorte de couronne, et du mot « Tigermo » qui d’après le dictionnaire de la langue gauloise veut dire « seigneur ». Disons donc que ce mot était « Tierne », voire « Tienne ». Etienne ne vient donc pas de Stephanos à travers Stephanus et une évolution suivant des lois fictives, mais est simplement la traduction d’un qualificatif grec en un qualificatif gaulois.


Le Saint Etienne

    Une preuve de ce que j’avance ici nous est donnée par Theophilos, nom d’un disciple de Saint Paul qui est un qualificatif grec signifiant, aimé de Dieu, ou qui aime Dieu. Ce « Theophilos » a donné lui aussi deux prénoms en français d’aujourd’hui, un d’origine savante : « Théophile », et l’autre d’origine populaire : « Amédée ». Or, à ma connaissance, aucun linguiste n’a essayé de faire dériver, suivant les lois de cette pseudo science, « Amédée » de « Theophilos », alors ne cherchons pas non plus à faire venir « Etienne » de « Stephanus ».

 

    Loire et Etienne sont des noms connus et nous venons de voir qu’ils ne viennent pas d’évolution du langage, mais qu’ils sont restés invariable depuis toujours. Il en est de même pour les noms de lieuxdits ou de terroirs qui ne sont connus que des proches voisins, a une petite différence cependant. En effet, un grand nombre de ces noms n’existaient pas à l’époque Gallo-romaine, ils ont été donnés plus tard lorsque les populations, plus nombreuses, occupèrent des régions jusqu’alors inhabitées. Ces noms étaient donnés dans la langue vulgaire, en raison d’une caractéristique de ces terrains, pour que chacun puisse facilement les reconnaître, mais il est arrivé que certaines de ces caractéristiques aient disparues, ou que le mot qui les désignait soit tombé en désuétude, il a été remplacé par un mot dont la prononciation était voisine et devenu plus usuel. Combien d’avions à « rédaction » n’ont-ils pas franchit le mur du son au-dessus de la cour de récréation de nos écoles ? Ou encore Lemon, qui est le nom ancien de l’orme a été utilisé autrefois, on a pu dire de quelqu’un qu’il habitait « Lès Lemon » c’est-à-dire « près de l’orme », ou simplement qu’on allait : à l’orme. A l’orme c’est-à-dire : A Lemon, ce qui n’a pas tardé à se dire : Au Mont. Mais ces transformations, si elles n’ont pas changé significativement la prononciation ont changés le sens du mot, et on put ainsi donner lieu à des interprétations bien loin de la vérité.

    Nous avons ainsi, dans le Pilat un lieu aujourd’hui « Château de Bélise », nom et lieu qui ont intrigués les érudits locaux. Certes personne n’a cherché à voir un château, perdu au milieu des bois, avec des hautes tours couronnées de toitures pointues, comme on peut les imaginer pour les contes de Perrault et autres contes de fée, car il ne s’agit que de quelques murs de pierres sèches, assemblées pour former une légère protection, autrefois sans doute plus importante qu’aujourd’hui où il ne reste qu’une vague enceinte à peu près circulaire d’environ 70 mètres de diamètre, à peine reconnaissable au milieu des ronces et des broussailles. C’est son nom de Belise qui a excité la curiosité des chercheurs car on y a vu un dérivé de « Belisama », le nom de la déesse Minerve gauloise.


La déesse gauloise Belisama

    Du Choul, Seytre de la Chabouse, Mulsant, le docteur Francus, le baron Raverat, ne parle pas du château de Belise. A Lurent, en 1873, écrit : « J’ai vu, plusieurs châteaux de Bélise sur lesquels tant de légendes redisent des choses merveilleuses et parfois absurdes. Ces murs de pierres sèches et colossales se trouvent près de la roche des Trois Dents et du col de Montvieux ; ils ne sont point les restes d’anciennes fortifications, mais des temples des anciens prêtres de la Gaule, des druides qui choisissaient pour leurs sacrifices et l’accomplissement de leurs mystères les lieux les plus abrupts et les plus solitaires ».

    Le très sceptique abbé Batia, parlant du Pilat dit : En réalité il n’existe peut-être pas un seul monument mégalithique authentiquement constaté. Une exception cepndant semble mériter d’être faite en faveur d’un monument qu’on appelle vulgairement le « Château de Bélise ». C’est une enceinte de soixante- dix mètres de diamètre, formée par un mur de pierres sèches qui disparaissent sous les taillis et qui couronnent le crêt de Bourchany situé à 890 mètres d’altitude, entre le col de Montvieux et celui de Pavezin. Ce nom de Bélise rappelle en effet Belisama nom celtique de Minerve, suivant l’abbé Chavet, dans les « fastes de l’Eglise de Vienne » ou Belisama la Minerve gauloise suivant l’abbé Devaux dans ses « Etymologies lyonnaises ». Cette vaste enceinte circulaire peut donc, à juste titre, être regardée comme un sanctuaire religieux dédié à la « Minerve gauloise ».

    Louis Dugas reprend la description du château de Bélise donnée par un de ses prédécesseurs M.Gabut ; mais il précise : « Ce nom peut-être expliqué de plusieurs manières. L’étymologie la plus vraisemblable doit-être : « Castrum Belisamae » le camp, l’enceinte de Belisamae, consacrée à Bélisame mais on peut également la tirer de « Balla Esus » village, habitation, temple d’Esus, ou bien « Bail Esus », fortification, enceinte d’Esus. La première étymologie nous semble préférable ».

    On peut continuer à chercher dans les écrits des uns et des autres quantités de textes qui font état de la croyance d’un culte dédié à Belisama, en ce lieu du château de Bélise. Retenons seulement cette remarque de Patrick Berlier qui précise : «  Bélise était aussi un lieu d’habitation, des cases primitives se retrouvent en peu partout dans les bois alentours, surtout sur le flanc est du crêt de Bourchany ».


Les restes de cabanes dans les environs de Bélise dont parle Patrick Berlier

    Plus prosaïquement Jean Dufour dans son dictionnaire topographique du Forez dit simplement : Château Bélise : « Vaste territoireet bois commune de Chuyers. On signale sur ce territoire situé en bordure des communes de Chuyers, Pavezin et Pélussin une enceinte circulaire en pierres sèches et des fonds d’habitations antiques ».

    En terminant il est intéressant de citer un article publié par M.Chavas. Dans le numéro 11 de la revue « Dan l’tan » écrit : « Dauzat, éminent spécialiste de l’étymologie régionale décréta que le nom Bélise venait du nom de la déesse gauloise Belisama. Il était donc évident qu’en ce lieu existait un culte à cette divinité. Depuis tous les écrivains régionaux ou presque ont colporté cette affirmation en rajoutant parfois des détails imaginaires ».

    Au début de son article, Chavas conte une petite histoire qui me parait significative et je me permets de la transcrire telle que je l’ai lue : « Il y a quelques temps un individu se prétendant spécialiste de la recherche archéologique me demanda de lui montrer « Château Bélise ». Après quelques recherches et plusieurs passages sur le site je le lui indiquais. Presque aussitôt il tomba en extase en me disant : « Ca y est je sens le courant tellurique qui monte du sol… » et pendant vingt minutes il m’exposa les effets sensuels qu’il ressentait. Personnellement je n’ai eu aucune sensation particulière, sans doute ne suis-je pas initié ! Mais il me semble curieux que lors de deux passages sur l’emplacement il n’ait rien ressenti et qu’il fallut lui indiquer où se trouvait Bélise pour qu’il entre en transe ou presque ».


Un fond de cabane sur le site de Bélise 

    Notons que Chavas cite Dauzat or le même auteur, dans son ouvrage sur la « toponymie gauloise », consacre quelques pages à Belisama, et surtout sur le suffixe Sama, qui pourrait être un augmentatif gaulois. Mais il ne parle pas de Belise, et c’est normal, parce que d’après les règles de la linguistique en vigueur, le « m » de Belisama ne doit pas disparaître. Belisama devant évoluer en Blesmes, voire Belesmes ou autres nom du même genre. Sans nous attarder à cette théorie linguistique qui doit pouvoir supporter un grand nombre d’exceptions, notons qu’il y a à Belise aucune tradition faisant état d’un quelconque pèlerinage, d’aucun rassemblement festif, qu’il n’y a aucune chapelle, statue ou croix pouvant rappeler la célébration d’un culte à aucune divinité. Par contre les textes anciens nous apprennent que « Bélise » est un nom récent le terroir s’appelait autrefois « Bérisse » … ou Bérize. « Territorium de Berize sive de Buen en 1375 (terrier de Virieu f 38), nemus situm in territorio de Berisses juxta nemus N. de Marechias et justus nemus Johannes Masagnon 1405 (terrier de Chateauneuf f122v), Nemus situs in Beris 1405 (id.f133), dit le dictionnaire topographique de Dufour.

    Dans son article cité plus haut Chavas connaissant les références données par Dufour ajoute, rappelant ce nom de Berisse : « Il est curieux de constater que le préfixe « Ber » de Berisse correspond, d’après le dictionnaire de l’ancien français à « baron » … le suffixe « tisse » ou « ize » viendrait, d’après les étymologistes de la même racine que « ison » que l’on retrouve dans garnison (la maison des gardes), ce qui donnerait pour Berisse la maison du Baron ». Dans la suite de son article Chavas cherche quel baron pouvait bien avoir perché son château en cet endroit, et il se demande s’il s’agissait bien d’un véritable baron.


Château Belise et sa muraille nord

    « Ber » est de la même racine que « Baron ». Il s’agit d’expliquer cela pour comprendre de quoi nous parlons. Nous avons dit, en parlant de la Loire, que « Ar » voulait dire « eau ». De « eau » il est aisé de passer à rivière, et de rivière à vallée, c’est ce qui est advenu à ce mot « Ar » qui de vallée en est arrivé à désigner pays, pour la population, qui vivait en tribu dans cette vallée. En Irlande, en Ecosse comme encore aujourd’hui au moyen Orient en Afghanistan, au Pakistan, les clans vivent chacun dans une vallée, dans leur vallée. Il en était de même autrefois dans ce qui est aujourd’hui la France. Ceci a été mis en évidence par Ch. Camproux dans ses études linguistiques sur les parlers du Gévaudan. Il a constaté qu’il y avait moins de différence dans le langage entre habitants de l’amont et ceux de l’aval d’une même vallée qu’entre des personnes de deux vallées voisines, même si la distance était moins grande.

    Si nous faisons précéder « Ar » du son représenté par la lettre « B » nous obtenons « Bar » et si nous donnons à « Ar »la signification du pays, le mot « Bar » apparaît comme étant celui : « né au pays », « issu du pays », c’est ce que plus tard les chroniqueurs appelleront : « les enfants de la ville », c’est-à-dire les jeunes hommes qui, sans avoir encore la charge d’une famille sont capables de défendre la collectivité. En effet la lettre « B » dérive d’un pictogramme, lui-même simplification d’un dessin utilisé à l’origine de l’écriture pour désigner la maternité. C’est le profil stylisé d’une femme enceinte à la poitrine opulente et au ventre proéminent. Avant d’être utilisé dans la formation des mots uniquement pour sa prononciation, la lettre «B » donnait au mot un sens de filiation. Les « Bar » sont les défenseurs de la ville, les défenseurs de la cité. Si au XVIIe et XVIIIe siècle ces « Bar » étaient surtout ceux capables de défendre les habitants par l’éclat de leurs voix, et désignaient les jeunes clercs, d’où le nom de « Basoche » ; dans les périodes plus anciennes ces « Bar » étaient les jeunes guerriers. De là le nom de « Barbares » donné par les Grecs aux étrangers valeureux qui les combattaient, le redoublement du mot indiquant le superlatif. Cette signification assimilant « Bar » à guerriers, a donné également le mot « Baraque », qui, avec sa terminaison « ac » est typiquement gauloise. Baraque étant le lieu d’habitation des guerriers. Aujourd’hui encore les casernes ne sont bien souvent que des baraquements. Notons aussi que de tous temps les jeunes gens ont été turbulent surtout en bande, et les jeunes Bar ont parfois été désignés sous l’appellation de « loubard » d’où notre français Loubar.

 
Château Belise et sa muraille sud

    On peut remarquer également que les Grecs jetaient les voleurs dans les fossés de la cité, ces fossés pouvaient s’appeler, « Bar » où « ar » est pris dans sa signification d’eau « Bar » c’est « né de l’eau » ce qui correspond bien au rôle d’un fossé. D’où la signification de voleur que prend parfois ce mot et qui a donné le nom du fameux « Barrabas » nom qui se traduit par « père des voleurs » ou « chef des voleurs ». On peut, dans ce cas admettre que le mot grec « Barbares » désignerait alors les « guerriers voleurs ».

    « Bar » signifiant : guerriers, »baron » avec le suffixe « on » qui indique le cas régime, signifie : les guerriers, et par simplification, le plus important des guerriers, celui à qui ils doivent obéir, c’est-à-dire le chef des guerriers, défenseurs de la cité ou d’une partie de son territoire. Par contre « Bar isse » désigne seulement le logement des guerriers, la caserne, puisque « is » a la même origine que « Ison » de garnison, voire de : maison. Remarquons cependant que le nom « on » de garnison indique le cas régime, et que « ison » veut dire « ceux qui ensemble habitent la construction ».

    Le nom de Bélise ayant intrigué les érudits locaux certains ont essayés de percer son origine en faisant des fouilles. Certaines de ces fouilles ont donné lieu à la publication de comptes rendus.

    La première fouille connue est mentionnée par Dugas, faite dans l’enceinte à dix mètres environ de l’entrée : … On a trouvé d’abord et y compris l’épaisseur du gazon qui couvrait le sol quinze centimètres de terre noirâtre fine et légère composée de débris de végétation, de sable, et de roches décomposées reposant sur des morceaux de roche formant une sorte de parement, puis on a enlevé une autre couche de terre également noirâtre conforme à la première, encastrée entre le parement supérieur et un second parement posé sur le sol naturel. La pierre plate de ce second parement était noircie à sa face supérieure et de couleur naturelle de la roche sur la face inférieure indice certain que ces derniers parements ont été posés sur le sol resté jusque-là primitif … de la superficie jusqu’au sol naturel l’épaiseur est de soixante centimètres savoir « quinze centimètres au-dessus du premier parement, dix centimètres épaisseur des pierres plates posées sur le sol naturel ». La terre sortie des fouilles ne contenait aucun débris de l’industrie humaine, ni poterie, ni outils, ni ossements. Il est juste de retenir que la fouille avait juste un mètre carré de surface.

    Dans le même article une autre fouille est rappelées elle indique que : Dans les années 60 (1960) la M.J.C. de Pélussin, emmenée par M.Epinat fit des fouilles sur le site de Bélise, les quelques tessons de céramiques et de poteries qu’ils découvrirent furent datés du haut Moyen-Âge.

    Au début des années 1970 le groupe archéologique Forez-Jarez s’intéressa au château Bélise. En plus des hypothèses émises par les auteurs que nous avons cités il rappelle, pour mémoire, Belus, dieu d’Apamée en Syrie, Belus chef légendaire Assyrien vers 200 avant J »sus Christ, puis Beltine, venant peut-être de Bellenus, dieu ancêtre des celtes. La fête de ce dieu se déroulait le premier mai, lorsqu’on conduisait le bétail aux pâturages d’été. On allumait de grands feux ; un rite voulait que l’on fasse passer les animaux entre deux feux pour les préserver des maladies.


Un fond de cabane sur le site de Bélise

    Quant à la destination de ces enceintes il note en vrac : Fortifications, frontières, les parties démolies pourraient nous y faire penser, et nous rappeler les commentaires de César sur les démolitions des ouvrages fortifiés (De bello-gallico liv.1 chap XI versets 5 à 19) (Je laisse à l’auteur la responsabilité de cette référence). Enceinte pour les troupeaux, Haut lieu religieux, ou saccagé au moment de la christianisation, christianisé comme Saint Sabin...

    Des fouilles effectuées à cette époque dans l’enceinte de château Bélise ont donné des fragments de poteries dont un morceau de faible épaisseur rappelant certaines formes du bronze et hallstat, des tessons rouges qui seraient du, ou postérieurs au II siècle, un rebord qui pourrait se situer du Ier siècle, d’autres débris seraient peut-être Tène III un nombre assez important de tessons de poterie Moyen-Âge du début à la fin, dont un genre pichet fin XIIe et un tesson avec glaçure directement sur pâte de période possible XIVe au XVIIIe.

    A l’extérieur de l’enceinte, sur le flanc sud des enclos très importants avec cabanes incorporées situés dans le bois de Chanal. Un puits en pierres sèches d’environ deux mètres en tous sens, a donné des fragments de tuiles grossières rougeâtres et au fond des morceaux d’une autre tuile rappelant les types rhodaniens, et un seul tesson avec glaçure directement sur pâte.

    En conclusion de cette première campagne, il note : On peut émettre l’hypothèse d’utilisation en toutes périodes de ces enceintes comme lieu de défense, de refuge lors des invasions, ou haut lieu de rencontres.

    La campagne de 1974 ne donna lieu à la découverte d’aucun matériel ; mais seulement à un important travail de relevé du site des enclos dans le bois Chanal.


Vue plongeante sur le Crêt de Quategrains

    Pour compléter notre information il faut préciser l’emplacement de « château Bélise », par rapport à son environnement. Nous empruntons cette description à M.Chavas : Cette construction était sur l’ancienne route antique des crêtes au carrefour de deux voies importantes, la route de la croix de Montviol à Condrieu et la route qui reliait le Jarez à son château de Chanson sur le Rhône, et près du croisement du chemin de Chatelneuf. Elle dominait la portion de territoire du Pilat au Rhône qui pendant plusieurs siècles faisait partie du territoire du Jarez. C’était donc pendant tout le haut Moyen-Âge un point stratégique du contrôle de la circulation entre le Rhône et la Loire, entre le Viennois, le Jarez et le Forez. La légende orale révèle qu’il y avait là un abreuvoir en or où quinze chevaux pouvaient boire ensemble, ce qui confirmerait l’existence d’un lieu de passage pour les marchands, les pèlerins et les soldats.

 

    Notons que peut-être cet abreuvoir, n’est autre que le puits de deux mètres en tous sens, qui a été fouillé il y a quelques années. Le qualificatif « d’or », n’étant qu’une interprétation de la dénomination : « d’ore » dans le sens d’entrée, d’orée, de porte.

 

    Enfin, Louis Dugas, dans une note indique : Le vieux chemin celtique … partant du col de Pavezin, d’où on le suit fort bien, tantôt emprunté par le chemin qui mène de Pavezin à la grange Rouet, et au col de Montvieux, tantôt légèrement en dessous de ce chemin. A quelques 600 ou 800 mètres avant la grange Rouet de ce vieux chemin s’arrête brusquement et tournant à angle droit grimpe directement dans la direction du château Bélise.

    A peu de distance avant ce tournant du vieux chemin, il semble même qu’il y ait eu une espèce de première enceinte, très réduite d’ailleurs, et qui a pu être un premier lieu de rassemblement.

 
Le rocher de la fausse monnaie dans les environs de Bélise

    Aujourd’hui Bélise est une ruine bien difficile à repérer mais en 1830 les vestiges devaient être importants puisque, nous dit Chavas, les géomètres impressionnés en ont reproduit le dessin sur la feuille de la section E de l’ancien cadastre de Pélussin.

    Un peu plus loin le même auteur écrit : Le traité de 1173 entre l’Archevêque de Lyon et le comte de Forez, ne semble mentionner Bélize, pas plus que l’acte d’achat par Renaud de Forez des seigneuries de Virieu, Malleval et Chavanay.

    Prenons donc le traité de 1173 et voyons ce qu’il dit, concernant cette région. Le texte latin est : similiter Changium cum mandamento suo et castella Sancti Ennemondi cum mandamentis suis infre terminos ecclesiae sunt salva strata comite a cruce Montis Violis usque Forisium, ce qui veut dire : « de même Chagnon et son mandement les deux châteaux de Saint-Chamond et leurs mandements sont de la part de l’Eglise sauf le chemin de la Croix de Montviol jusqu’au Forez ». Par ailleurs le même acte donne à l’Eglise les villes ou châteaux de Saint-jean-Bonnefonds, Saint-Genest-Lerpt, Villars et Saint-Victor-sur-Loire, ce qui coupe en deux parties les possessions du comte de Forez. Notons que cela permettait à l’Archevêque d’avoir un accès à la Loire et aux saumons qui remontaient le fleuve, nourriture appréciée surtout pendant les périodes de carême.

    Au cours du XIVe siècle, les comtes de Forez créèrent, puis se rendirent maîtres du mandement du Fay, près de Saint-Jean-Bonnefonds, ce qui permettait de relier les deux parties du comté, après avoir acquis les seigneuries mentionnées plus haut.

    Nous pouvons donc conclure ce que fut ce site, et n’en déplaise à Dauzat et à ses émules, ainsi qu’aux courants telluriques, Château Bélise ne doit rien aux dieux et déesses. Cela est prouvé d’abord par l’absence de pèlerinage et de traditions de cette sorte liés à ce lieu. A 880 mètres d’altitude c’est relativement peu élevé par rapport au « Pic des trois dents », c’est presque le bas pays, pourquoi l’aurait-on si vite abandonné ? Ensuite ce nom de Bélise qui a déchainé les interprétations les plus fanatiques quant à l’antiquité du site et à sa valeur religieuse n’a rien à voir avec Belisame, Bellenus ou Esus, car, comme nous l’avons relevé, Bélise est un nom récent. Autrefois il s’agissait de Bérisse ou Bérize. « Territotium de Berize sive de Buen en 1375 (terrier de Virieu f 38), memus situm in territotio de Berisses juxta nemus N. de Marechias et justus nemus Johannes Masagnon 1405 (terrier de Chateauneuf f 122 v) ; Nemus situs in Beris 1405 (id.f133), dit le dictionnaire topographique du Forez de Dufour.

    Remarquons la première référence : Territorium de Berize sive de Buen, qui se traduit : Territoire de Berize ou de Buen. Or, d’après le dictionnaire du langage forezien de J.P. Gras le mot « Buen » signifie « Borne ». Nous sommes donc là sur une limite.


Un autre fond de cabane sur le site de Bélise ; à l'ouest

    Voici donc ce qu’est « Château Bélise », situé à la frontière des Allobroges et des Ségusiaves. Le site est un lieu de surveillance de l’antique voie joignant le Rhône et la Loire, occupé épisodiquement par un petit groupe de gardes. Au XIIe siècle lors du traité entre l’Archevêque de Lyon et le comte de Forez, celui-ci y installa des gardes permanents qui réaménagèrent le site d’où la présence d’un deuxième dallage trente centimètres au-dessus du pavement primitif qui avait disparu sous les détritus soit tombés des chaussures des premiers et sporadiques occupants, soit venus de la décomposition des herbes poussées pendant des décennies. Lorsque le passage par la Croix de Montviol eut perdu de son importance, pour le comte de Forez, le poste fut abandonné. Sans doute y eut-il de temps à autre une occupation précaire par quelques bergers ou fugitifs au cours des temps ultérieurs, mais « Château Bélise » est « camp militaire » et rien d’autre. Il est probable que les cabanes trouvés dans les bois environnants ont une relation directe avec cette occupation par des militaires au Moyen-Âge et servaient à la population qui suivait jadis les armées. On trouve également des tombes, et même des tombes de chefs.

     « Château Bélise » étant un camp militaire il est arrivé que certains d’entre eux fussent tués ou blessés lors d’escarmouches. Si certains furent enterrés sur place, d’autres furent ramenés au camp et y furent enterrés, surtout s’il s’agissait de chefs. La proximité d’un sol rocheux ne permettant pas de creuser une tombe le corps ou les corps étaient, posés au sol et autour d’eux on disposait quelques grosses pierres soigneusement mises les unes à côté des autres formant comme les parois d’un grand coffre, ou la base des murs d’habitation, puis on recouvrait le, ou les, cadavres de pierres, chacun apportant les siennes, chacun apportant sa pierre à l’ouvrage. Il y a quelques années encore, dans certaines campagnes, il était de tradition, lors d’un enterrement de jeter une pincée de terre dans la tombe du défunt. Ces tombes sont l’origine de cette espèce de nécropole que l’on peut reconnaître autour du camp.

    Si l’on voulait donner une date à la construction première de ce camp, et en se basant sur les fouilles opérées, un calcul sommaire donne quinze centimètres de terre noirâtre, depuis 1173, représentant environ 800 ans, 30 centimètres représentant environ 1600 ans, ce qui conduit à environ 500 ans avant notre ère. C’est la période des invasions gauloises dans un pays occupé par les Ligures.



<Retour au sommaire du site>