CLISSON : ET IN ARCADIA EGO DE LA CITÉ DE LYON À
LA CITÉ
DU LION |
À gauche :
armoiries de Lyon 1376,
de gueules au lion d'argent au chef d'azur chargé de trois
fleurs de lys d'or
qui est de France.
À droite :
armoiries du Connétable
de France Olivier de Clisson 1397, de gueules au lion d'argent
couronné,
lampassé et armé d'or. Devise « Pour ce qu’il me plest ».
Au
sud-est de Nantes, la cité de Clisson (Loire-Atlantique),
cité des Marches de
Bretagne et du Poitou, véhicule aujourd’hui encore toute une
aura de mystère
que le temps n’a fait qu’épaissir.
Son nom
est une énigme. Les formes connues les plus anciennes sont Clizun
en 1075 et Clicio en 1152. [Il pourrait rappeler l’époque où
le primitif château n’était
entouré que de clisses, enclos de branches entrelacées
mais ce mot n’est pas
attesté en français avant le XIIe
siècle. E. Coarer Kalondan en
1959, dans sa plaquette consacrée à Clisson, rêve
d’une druidique
Kleiziodunon : la Forteresse des Glaives. Cet auteur
régional qui fut
Druide du Collège Bardique de Bretagne, inspiré par les
lieux, raconte la venue
des Sages à la blanche vêture dans la
forteresse où dansent les glaives. Ces Druides, indique
l’auteur, vivaient
sous le couvert de la forêt de Dunem. Les Prêtres de
Dumen ou Dou-Men (la
Pierre Noire) avaient répondu à l’appel des chefs des
forteresses du Sud-Loire
réunis dans le nouveau Dunom pour décider de la marche
à suivre face à l’avancée
rapide des Romains.
La
vision romantique d’E. C. Kalondan a le mérite de dresser le
décor environnant
de la cité de Clisson. Tous les érudits locaux aiment
à citer l’étymologie
celtique de Clisson assurément car elle affirme ainsi le
passé lointain de la
cité. La carte ci-dessous permet de bien situer cette possible
Kleiziodunon.
Limite Ouest du territoire de la tribu des Ambilitates près du
Pagus Médalgicus
(les Mauges), Pays du Métal de
l’époque romaine.
Situation de la cité de Clisson
Pline
l’Ancien dans son « Histoire naturelle »,
positionne dans le
Sud-Loire trois tribus gauloises :
1) Les
Agésinates Cambalectri dont la capitale correspondait pour
certains historiens
à la cité vendéenne d’Aizenay. Certains
érudits affirment qu’ils auraient
fondés la cité d’Angoulème.
2) Les
Anagnutes (gaulois Ana Gnatos : les Fils d’Ana) dont la capitale
fut
peut-être Ratiaton, actuelle cité de Rezé, face
à la cité de Nantes.
3) Les
Ambiliates dont la capitale correspondait suivant les historiens
à
Doué-la-Fontaine célèbre pour ses caves
souterraines.
Clisson
apparait très proche du Pays des Anagnutes où se situe la
forêt de Dumen,
actuelle forêt de Touffou, mentionnée par l’auteur
druidisant.
L’abbé
Taverson dans le document « Clisson, hier et aujourd’hui »
notait :
« On s’aperçoit que la racine
grecque
Kleis (qui se prononce clisse) indique une idée de clef, de
fermeture, de porte
et, par extension, gorge, défilé,
forteresse. »
Bien
que l’érudit abbé ne retienne pas une origine purement
grecque du nom de
Clisson, il reconnait au travers de cette racine, une origine
préromaine du nom
de la petite cité. L’idée de clef est aujourd’hui retenue
par plusieurs érudits
locaux. Clisson placée au confluent de la Sèvre et de la
Moine est bien la Clef
médiévale permettant de passer du Poitou à la
Bretagne. La contrée fut
évangélisée par saint Martin de Vertou qui
vécut un temps dans la forêt de
Dumen. Plus tard, les Chevaliers de l’Ordre du Temple érigent
une commanderie
au faubourg de la Madeleine. La chapelle templière se dresse
toujours dans la
cité.
Patrick
Ferté dans son livre « Arsène Lupin
supérieur inconnu »
(Edition de la Maisnie) consacre tout un chapitre à
« CLISSON HAUT LIEU
INITIATIQUE ». Il cite Ogée, historien de Bretagne
qui affirmait à la fin
du XVIIIe sicle que le peintre Nicolas Poussin se serait
inspiré des
paysages du Clissonnais pour son tableau « Diogène
rejetant son écuelle ».
Voici ce qu’écrit précisément Jean-Baptiste
Ogée en 1780, dans son « Dictionnaire
historique et géographique de la Bretagne » :
« Il est en effet probable que le
Poussin qui a peint plusieurs vues de Nantes, avait soigneusement
étudié les
sites de Clisson. On les retrouve du moins dans la plupart de ses
compositions.
Le paysage de son tableau de Diogène brisant sa tasse est une
vue exacte du
château de Clisson. : c’est une remarque de M Lemot, et cet
académicien,
qui a longtemps habité l’Italie, ne trouve que Tivoli,
l’ancienne Tibur, qu’on
puisse comparer au Clissonnais. Ce sont ici, comme dans les Apennins,
des
coteaux ombragés ou couverts de vignes, de fraîches
vallées, des retraites
solitaires, des rivières, des ruisseaux, des cascades, des lacs,
des grottes,
des rochers : le chêne étalant le luxe de son
feuillage : le peuplier
s’élançant dans les airs : des fabriques
isolées an milieu des vallons, ou
groupées en amphithéâtre sur les collines parmi des
masses de verdure. Chaque
site, chaque instant, varient les effets de la lumière :
chaque pas offre
de nouveaux points de vue et des accidents pittoresques de
différents genres.
C’est un vaste tableau dont toutes les parties sont harmonieusement
liées, et
dont chaque partie peut s’isoler pour former plusieurs
tableaux. »
Nous ne
savons si le peintre originaire des Andelys est venu à Nantes,
voire même à
Clisson, pas plus si les paysages du Clisonnais figurent «
dans la plupart de ses compositions » ainsi que
l’affirme bien rapidement Ogée. Mais le voyage à pied que
Nicolas Poussin effectua
dans sa jeunesse en Poitou ne vient pas
contredire cette hypothèse, bien au contraire !
À Paris,
le jeune peintre rencontra Alexandre Courtois, noble poitevin, valet de
chambre
de la Régente, grâce à qui il pu étudier les
estampes d’après Raphaël et Jules
Romain, ainsi que les antiques et les tableaux italiens (le Titien) des
collections royales. Alexandre Courtois lui proposa de décorer
son château du
Poitou. Nicolas Poussin accepte et c’est ainsi qu’il se retrouve dans
les
marais du Poitou en Charente-Maritime suivant certains auteurs, bien
que le
lieu précis n’ait pu être localisé. Faut-il
entendre le Marais Poitevin, ancien
Golfe des Pictons, bien connu aujourd’hui sous le nom de Venise
Verte ? Ce
grand marais qui s’étend dans les départements de la
Vendée, des Deux-Sèvres et
de la Charente-Maritime, délimitait à l’époque de
Nicolas Poussin, l’évêché de
Maillezais de l’évêché de Luçon.
La mère
du protecteur de Nicolas Poussin, peu inspirée par les talents
du jeune
peintre, ne lui permit pas d’aménager le château.
Déçu, Poussin rentra sur
Paris où il arriva malade. Il ne serait pas improbable que ses
pas l’aient mené
à Clisson et à Nantes, couchant au passage, sur le
papier, les paysages vallonnés
du Clisonnais qu’il aurait pu, par la suite, réutiliser pour
quelque(s)
tableau(x).
Si les
paysages de son tableau de Diogène rappellent effectivement ceux
du Clissonnais,
le château, il convient de le reconnaître, y brille par son
absence. Jérôme Choloux reconnaît
malgré tout
que l’église Notre-Dame de Clisson semble présente (www.passion-rlc.fr/clisson.htm) bien que ce ne soit pas une
certitude. D’autres chercheurs
préfèrent, sans l’affirmer par le
texte, l’affirmer par l’image. Le tableau représente le
philosophe cynique
Diogène Laërce se dépouillant et renonçant
à son écuelle pour ne plus boire que
dans la main, comme le fait un jeune homme. mais commençons par
chercher pour
quel commanditaire Nicolas Poussin a réalisé cette œuvre…
Clisson, la Cité du Lion, au reflet
scintillant dans le miroir de la Cité de Lyon
Nicolas
Poussin a peint le tableau pour le banquier Lyonnais Marc-Antoine
Lumagne. L’historien amateur de Sannois, Jacques
Delaplace, est l’auteur d’un texte de conférence,
particulièrement intéressant
dans lequel il évoque l’histoire depuis ses origines de LA
FAMILLE
LUMAGUE : LES BANQUIERS DU ROYAUME
(sdhaa.free.fr/lumague/cadreluma.htm).
Après les
guerres de Religion et l’accession au trône du roi Henri IV,
l’heure est à la
reconstruction. « Les
financiers et les marchands, écrit
Jacques Delaplace vont se manifester, en
particulier les "Italiens". ». L’historien ajoute :
« Lyon, par sa situation, a toujours
été une ville de commerce. C'est donc le lieu où
se sont établis les banquiers.
Dès avant l'époque de Catherine de Médicis des
familles italiennes, comme les
Gondi, travaillaient sur cette place. »
Originaires de l’actuel canton des Grisons de la Confédération Helvétique, les Lumagne ou Lumagué arrivèrent à Lyon possiblement vers 1581, année retenue pour l’arrivée les Mascranny ou Mascrany, eux-mêmes originaires des Grisons. Jehan André Lumagué né semble-t-il en 1564 à Piuro (Plurs) dans le pays des Grisons, se lie à Paul Mascranny vers 1589 en créant une société. Les deux hommes nous dit, J. Delaplace, deviendront, s'ils ne l'étaient auparavant, amis et même alliés jusque dans leurs progénitures.
Détail
important pour la suite de
cet article : « Cette
Société
reçoit l'appui d'un marchand de Troyes, Oudart Colbert, grand
oncle de Jean-Baptiste
Colbert qui deviendra ministre. Nous ne connaissons pas l'acte de
constitution.
Nous la trouverons plus tard dénommée banque Mascranny et
Lumague de Lyon. (…)
Les autres frères Lumagué qui interviennent ont seulement
la procuration des
deux fondateurs tout en étant constamment liés aux
diverses opérations. »
La
famille Colbert ainsi que l’indique J. Deplace, pèse lourd dans
la Société de
Lyon qui très vite ouvrit une succursale à Paris : « (…) la famille
Colbert : Oudart, qui avait soutenu la société à
Lyon et lui avait facilité
l'obtention par le roi des lettres patentes pour la création de
la manufacture
; Gérard qui fut marchand à Amiens et à Paris,
Jean Baptiste le futur ministre
qui débuta chez Mascranny et Lumagué à
Lyon. »
Les études
consacrées à
Jehan-André, indiquent que l’un de ses fils se prénommait
Marc-Antoine,
lui-même banquier à Lyon dans la Société.
Nicolas Poussin aurait donc peint le
Diogène pour ce fils de Jehan-André. Je découvris
ensuite que le fondateur et
principal actionnaire de la Société avait un frère
nommé Pierre-Antoine mais
appelé plus souvent Marc Antoine ou Anthoine, lui-même
banquier à Lyon dans la
Société. Bien entendu je commençais à
douter. Le banquier Lyonnais pour qui
Poussin peignit le Diogène était-il l’oncle ou le
neveu ? Je contactais
Patrick Berlier bien renseigné sur l’histoire lyonnaise de ce
XVIIe siècle et principalement sur
la Société Angélique contemporaine de la
Société Lyonnaise. Il se peut, au vu
des personnages qui gravitèrent autour de cette banque aux
activités diverses que ces deux sociétés
aient eu des contacts bien
spécifiques. D’autant que les Mascrany devaient devenir les
propriétaires du
domaine de l’Angélique où au XVIe siècle se
réunissait la Société du même nom, autour
du maître des lieux Nicolas de Lange. Patrick transmit ma
question au Guichet
du Savoir de la Bibliothèque de Lyon. Je tiens à
remercier le Guichet du Savoir
pour la réponse rapide et surtout précise donnée
à la question :
Dans Poussin,
le livre d’Alain Mérot nous trouvons cette information :
« Le groupe
des amis lyonnais de Poussin est particulièrement imposant.
Banquiers ou riches
marchands, toujours en affaires à Paris ou à Rome, ils se
réservèrent une très
grande partie de sa production, contribuant à faire monter sa
cote jusqu’à des
sommets rarement atteints au XVII° siècle. Au premier rang
d’entre eux figurent
Jean Pointel, installé à Paris, et son associé
Jacques Serisier (ou Cérisiers)…
Le grand banquier et industriel Lumague (ou Lumagne), l’un des hommes
les plus
riches de son temps, n’eut pour sa part qu’un seul Poussin, mais l’un
de ses
sommets dans l’art du paysage : Diogène jetant son
écuelle (vers 1648, Louvre). »
Dans la
dernière partie de ce document appelée « petit
dictionnaire poussinien », le
nom de Lumagne ou Lumague est mentionné : Famille de banquiers
et d’industriels
lyonnais. L’un d’entre eux (peut-être Marc-Antoine, mort en 1654)
posséda le « Paysage
avec Diogène jetant son écuelle. »
Cet
autre ouvrage
consacré à Nicolas Poussin et édité par la
Réunion des musées nationaux indique
qu’il fut peint en 1648 pour « Monsieur Lumague »
probalement le banquier
lyonnais originaire des Grisons, établi à Gènes en
1619, mort à Milan,
Marc-Antoine II de Lumague, 1566 ?-1654.
À la lecture de ces pertinentes indications relatives à la vie de Marc-Antoine II de Lumagne, il apparait que ce « Monsieur Lumague » pour qui Poussin peignit le tableau, fut le fils de Jehan-André Lumague.
L’intérêt des Lumague pour la peinture est reconnu. Jehan Lumague possédait dans sa maison de Paris, plusieurs tableaux de maître. Barthélemy Lumague en 1634 avait commandé au Guerchin le tableau de l’autel du couvent des Carmes Déchaussés de Lyon, l’Apparition du Christ à sainte Thérèse, conservé aujourd’hui dans le musée Granet d’Aix-en-Provence. Dans le château de Lumagne (ou de la Citadelle) situé sur la commune de Saint-Genis-Laval, dans le Rhône, on découvre un salon orné de fresques de l’école de Nicolas Poussin.
Les diocèses frères de Maillezais
et de Luçon
Ou l’Appel du Lyon rugissant dans les Marais
En
1665, le tableau « Diogène et
l’écuelle brisée » deviendra propriété du duc de
Richelieu. Le chef-d’œuvre rejoindra la collection de Louis XIV. Le duc
de
Richelieu avait-il quelque raison de s’intéresser au tableau de
Nicolas
Poussin ? La seule acquisition du tableau par le cardinal permet
de
l’affirmer mais dans l’hypothèse où Nicolas Poussin
aurait bien voyagé dans le
Clissonnais, l’acquisition de Richelieu devient des plus
intéressantes. Le
cardinal connaît très bien le Bas-Poitou.
Dans le
Haut Moyen-Âge les évêques de Poitiers
géraient un important diocèse qui
s’étendait jusqu’à l’Océan à l’Ouest et
jusqu’à la Loire au Nord. C’est ainsi
qu’au VIe siècle saint Martin de Vertou, archidiacre
du diocèse de Nantes,
à la demande de saint Félix, évêque de
Nantes et ami de Fortunat évêque de
Poitiers, évangélisa le Sud-Loire jusqu’en Vendée.
En 1317
le pape Jean XXII « afin de pourvoir
plus efficacement à l’avancement spirituel des
âmes », détacha de
l’immense diocèse toute la région occidentale et en forma
les deux diocèses de
Luçon et de Maillezais. L’évêque de Nantes ainsi
que l’évêque de Poitiers s'accordent
sur la division des évêchés et des paroisses, qui
rejoignent l’un et l’autre
diocèse. Le pays de Retz est intégralement
rattaché au diocèse de Nantes.
Le
diocèse de Luçon comprenait les doyennés
d’Aizenay, de Montaigu, de Pareds, de
Talmond et de Mareuil qui renfermait Luçon. Le doyenné de
Montaigu permettait
l’accès direct à Clisson, cité du duché de
Bretagne en Pays de Retz. Le diocèse
de Maillezais comprenait en plus l’archiprêtré d’Ardin,
les quatre doyennés de
Fontenay, Saint-Laurent, Vihiers et Bressuire. Il débordait sur
le Haut-Poitou
et sur l’Anjou englobant une partie du Pays des Mauges. Les deux
premiers
évêques de ces deux diocèses furent pour
Luçon l’abbé Pierre de la Voyrie
(1317-1333) et pour Maillezais l’abbé Geoffroy Pouvreau
(1317-1333). Les deux
derniers abbés occupèrent ainsi dans leur abbaye
respective, le nouveau siège
épiscopal durant une même période.
Luçon au début du XXe
siècle – au fond le clocher de la
cathédrale (carte postale ancienne)
Il
convient également de citer durant cette même
période, sur le siège épiscopal
voisin de Maillezais, Thibaud de
Lucé (1432-1455),
noblesse du Maine,
successeur de son oncle Guillaume de
Lucé (1419-1432).
Thibaud en qualité de Conseiller
du Roi Charles VII, fonction exercée également par son
oncle, effectue
plusieurs missions, aux côtés notamment de Jean II de
Chambes ou Jambes.
Par lettres datées de Montilz-lèz-Tours
le 11 avril 1453, ils
négocièrent un traité d'alliance avec les
envoyés de Frédéric
II de Saxe, comte palatin du Rhin et
duc de Bavière, traité qui fut conclu à Tours
le 13 avril 1453. Thibaud de Lucé
remplit également ses fonctions de
Commissaire aux côtés de JEAN de Bar, autre Conseiller du
Roi.
Les années qui vont suivre s’avèrent d’importance pour cette étude. A la tête de l’évêché jumeau de Luçon, apparait la famille de Richelieu. François du Plessis, seigneur de Richelieu, père du futur cardinal Armand de Richelieu, occupe la charge de Grand Prévôt de France. Capitaine des gardes du futur roi Henri IV, il meurt au combat le 10 juin 1590 durant les guerres de religion. Il laisse une famille endettée que le roi Henri III récompense pour la participation de François aux guerres de religion, en donnant l’évêché de Luçon. La famille Richelieu en perçoit ainsi les revenus ce qui mécontente les ecclésiastiques.
Le premier Richelieu à occuper le siège épiscopal de Luçon fut Jacques 1er (Jacob ou Jacobus), oncle de François. A sa mort en 1592, un problème se pose pour la famille de Richelieu. La perte de cet apanage héréditaire n’est pas envisageable. François Hyver ou Yver, curé de Braye dans la paroisse de Richelieu est nommé, au mois de juin 1593, évêque confidenciaire de Luçon, et reçoit d’Hernri IV le titre d’administrateur du diocèse, sous réserve d’en percevoir les revenus au bénéfice des RICHELIEU (régime de la Commende ou régime de la confidence). Le Chapitre reproche à cet homme de paille de la Dame de Richelieu, bien que pourvu des bulles au mois de mars 1598, d’avoir négligé de se faire sacrer. (Voir site web du diocèse de Luçon avec l’extrait de l’ouvrage « Les évêques de Luçon », 1740, par Jean-Baptiste Brumauld de Beauregard, vicaire général - Archives de l’évêché).
François 1er Hyver servira d’intérim en attendant la nomination d’un autre Richelieu : Alphonse-Louis qui termine ses études de théologie. Si le frère du futur cardinal de Richelieu, apparait dans la liste des évêques de Luçon de 1605 à 1607, il en refusa la consécration. Pour Alphonse-Louis de Plessis-Richelieu, Luçon apparait comme une étape qui le mènera rapidement, car tel était son désir, à la Grande Chartreuse, avant d’endosser la robe de Doyen de Saint-Martin de Tours. Suivra ensuite un passage en 1625 à la tête de l’archevêché d’Aix avant d’accéder à la tête de l’archevêché de Lyon en 1628. Nommé cardinal l’année suivante il fera preuve d’un comportement héroïque durant la grande peste de Lyon. Ses qualités dans la diplomatie le mèneront à Rome en qualité d’ambassadeur. Bien que présent à la tête de l’archevêché de Lyon, Alphonse-Louis du Plessis De Richelieu restera toujours présent dans le Bas-Poitou ainsi qu’il sera vu plus avant.
Ce fut son
frère aîné, Armand-Jean
du Plessis de Richelieu, le futur cardinal et ministre de Louis XIII,
qui occupa
de 1606 à 1624 le siège épiscopal de Luçon.
Ces années passées à la tête de
l’évêché durant lesquelles il dû faire face
aux Protestants, furent pour lui un
véritable apprentissage pour le gouvernement futur de la France.
Durant 14 ans,
de 1608 à 1622, l’évêque de Luçon
reçut en commende l’abbaye de l’Ile-Chauvet
dans l’actuelle Baie de Bourgneuf. Devenu ministre de Louis XIII, il
restera
très impliqué dans la vie de cette abbaye. En 1625 il
décide d’y
installer des prêtres séculiers qui resteront dans
l’Abbaye jusqu’en 1679,
année de la venue des Camaldules.
Pendant vingt ans, de 1633 à 1653, son frère Alphonse Duplessis de Richelieu, devenu grand aumônier de France et archevêque de Lyon, reçoit du roi Louis XIII, à la demande de son ministre, le Cardinal, la commende de l’abbaye de l’Ile-Chauvet.
Hugues Du Tems en
1774 dans son
livre « Le
clergé de France, ou tableau
historique et chronologique des archevêques ... » indique :
« XI
ALPHONSE Louis DU PLESSXS DE RICHELIEU appelé le Cardinal de
Lyon
étoit Abbé de l’Isle Chauvet en 1633 & 1643 Il fit
faire une cloche avec
cette inscription San Benedicte ora pro nobis. »
Durant cette période qui vit la présence de la famille Richelieu sur le siège épiscopal de Luçon, un personnage d’importance arrive dans la cité de Clisson, il s’agit du vénérable Jean-Jacques Olier, fondateur de la congrégation de Saint-Sulpice. Né en 1608 à Paris, le jeune Jean-Jacques quitte la capitale pour la cité de Lyon en 1617 où son père est nommé administrateur de justice. Alors qu’il achève ses études dans la cité de Lyon, il se voit pourvu dès l’âge de dix-huit ans, du prieuré de la Trinité de Clisson. En 1638, allant donner une mission en Saintonge, il passa par son prieuré où une maladie l'obligea de séjourner quelque temps ; il y retourna encore en 1641. Toutes les fois qu'il y résidait, il avait coutume de faire les exercices de la retraite spirituelle à la chapelle de Notre-Dame-de Toutes-Joies.
L’histoire
de l’évêché de Luçon que nous n’avons pas
quitté, devient une fois encore, bien
intéressante, au vu de cet article. Le 8 février 1661,
Nicolas Colbert, frère
du ministre de Louis XIV devient pour 10 années, le 28ème
évêque de
la cité vendéenne. Cet ami des lettres laissa dans la
cité de Luçon le souvenir
d’un homme vertueux mais aussi d’un homme à la santé
fragilisée par la proximité,
du Marais Poitevin. Le futur cardinal de Richelieu qui aimait cette
région fut
lui-même incommodé par le climat local.
Dans
l’évêché frère de Maillezais, en 1660, en la
cité de Maulévrier, Edouard
François Colbert, l’autre frère, grand soldat des
armées de Louis XIV et futur
lieutenant général, acquiert le comté de
Maulévrier. Entre 1679 et 1683 il fait
construire le château actuel avec comme architecte principal
Jules Hardouin
Mansart grand architecte du palais de Versailles.
Le
dernier évêque de l’évêché
frère de Maillezais fut Jacques Raoul de la
Guibourgère ancien maire de Nantes et dernier
évêque de Maillezais. En 1648,
sur recommandation de saint Vincent de Paul, il devient
évêque de la Rochelle.
En 1852, l’abbé Lacurie dans son « Histoire de l'Abbaye de Maillezais depuis sa fondation jusqu'à nos jours », évoque la venue dans les murs de l’ancienne abbaye/évêché, en l’année 1589, de François Agrippa d’Aubigné, nouveau gouverneur de la cité. Si l’on doit au poète et écrivain le retour des moines dans l’abbaye, il fut aussi le geôlier d’un personnage bien énigmatique, ainsi que nous le raconte l’abbé Lacurie :
« D’Aubigné
resta gouverneur de la cité conquise, et nous ne le voyons
guère plus prendre
part aux expéditions militaires. C’est à lui que Henri
Navarre, salué roi sous
le nom d’Henri IV, confia la garde du cardinal de Bourbon, cet ancien
évêque de
Saintes que la ligue avait fait roi sous nom de Charles X. Toutes les
tentatives faites pour enlever le prisonnier, échouèrent
contre la vigilance du
vieux capitaine. Transféré de Maillezais dans les prisons
de Fontenay le roi de
la ligue mourut le 9 mai 1590. »
À
suivre !
Pourquoi
le sculpteur lyonnais Frédéric Lemot,
auteur de la célèbre statue équestre de Louis XIV
Place Bellecour à Lyon,
alla-t-il s’installer à Clisson ? Pourquoi chercha-t-il
à y recréer
l’Arcadie de Nicolas Poussin et son célébrissime
tombeau ?
À
découvrir le mois prochain, dans la suite de ce dossier.