La chapelle Sainte-Marguerite, à Chapelle-Villars


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Présenté par
Pascale Turbet Delof







Juin
2021





Cette chapelle du Pilat, nommée la Vieille - chapelle, m’a toujours interpellée…

Pourquoi ne pas l’appeler par son nom Sainte- Marguerite ?

Pourquoi l’eau s’obstine-t-elle à imprégner les murs de cette bâtisse médiévale, malgré les drains et les enduits rénovés ?

Pourquoi la route la frôle-t-elle de si près ?

Autant de questions qui m’ont incitées à pousser la porte d’entrée…

 

La voie d’accès, la voie « royale », se fait par le chemin antique qui descend du col de Grenouze. Ce sentier révèle un pavage par endroit, qui a dû voir passer nombre de pèlerins, carrioles, écoliers ou marchands : nous sommes sur une grande voie de communication du Pilat, reliant le Rhône et la Loire. Patrick Berlier nous en a fait un tracé précis :




Ce chemin est bordé de plantation de sapins qui dissimulent de nombreux tumulus entourés de vestiges de muraille. Un des tumulus a un fond de cabane encore bien préservé. Nous sommes donc sur un site de rituels funéraires.

Plus bas, des terrasses rythment la pente entre 2 lacets de sentier. Ces terrasses sont tenues par de larges murs, parfois à double paroi. Nous sommes en présence de construction sans doute d’époque celte … ?

Un front de pierre, ancien front de taille, borde le chemin. Un œil imaginatif y découvre la représentation d’un reptile, un saurien, à l’air menaçant, ou tout du moins sur le qui-vive ! Energétiquement, il s’agit d’un gardien du sentier, un esprit de la roche matérialisé. L’approche de cette roche est difficile, comme si une force nous repoussait !



A partir de ce gardien, la chapelle est visible. Nous sommes maintenant dans son périmètre énergétique et visuel.

En continuant la descente, un puisard attire le regard, sur la droite du sentier. Une maçonnerie en pierre, fermée autrefois par une porte en bois (charnières visibles). De l’eau, dans le creux du puisard.

Une croix de bois, de taille respectable (environ 1.50m), est fichée dans le sommet de cette construction. Mais, oh ! stupeur, la croix a traversé la paroi supérieure et pend au-dessus de l’eau, sans la toucher !



Maintes fois remise en place, elle retombe aussitôt …

Cette source dégage une énergie ambivalente : un goût de métal dans la bouche voire même un goût de sang, une mémoire de combat et en même temps une grande lumière, une sorte de feu d’artifice blanc éclatant perçue dans les yeux de qui sait recevoir.

Quel est ce combat mené ici ? Pourquoi la croix perfore-t-elle la voute de pierre ? Veut-elle être avalée par la source qui sourd en dessous ? Quel être dégage donc une telle énergie lumineuse de puissance et de douceur ? Encore des questions … !

Nous continuons notre chemin, à l’approche de la chapelle.



 Nous sommes maintenant comme dans une bulle d’énergie, paisible. Nous prenons le temps de tourner autour de la chapelle, avant d’y entrer. La route la frôle, la violente même. Nous apprendrons, plus tard, que le cimetière entourait la chapelle. Des ossements ont été transportés jusqu’au nouveau cimetière à l’occasion des travaux d’élargissement de la route.

La paroi rocheuse affleure derrière le chœur de la chapelle. Du mur, a dû sortir autrefois un filet d’eau, au-dessus de cette pierre qui l’éloigne de la paroi.



Côté Ouest, une maison d’habitation, avec ses hangars agricoles. Derrière, en amont, une boutasse dont l’eau est tirée pour l’arrosage du jardin. Elle se trouve dans l’alignement Ouest de la chapelle.

Il est connu de mémoire d’homme que de l’eau passe sous la chapelle…D’ailleurs, un bénitier orne cette même façade. L’eau bénie est bien là !



La porte Ouest s’ouvre, clé et serrure remarquables ! Pas de pierre de seuil comme dans nombre de chapelles romanes (la pierre de seuil est un point de décharge, souvent une pierre plate de belle taille, sur lequel le pèlerin passe pour se débarrasser de ses vieilles énergies).

Nous descendons précautionneusement les marches. Nous nous sentons, au fil de la descente, avec des pieds de plomb… les marches font donc office de pierre de décharge !



Sur la gauche, un fond baptismal en pierre. Il révèle encore l’emplacement d’un couvercle en bois, rivé au-dessus. Le couvercle, souvent octogonal, dynamisait l’eau par son onde de forme. Celui-ci a disparu…



 Sensation de traversée du Jourdain, présence de Saint -Jean le Baptiste…

Dans une niche au Sud, face au fond baptismal, une statue surplombe la nef :  la sainte du lieu, Sainte-Marguerite. A ses pieds, un dragon noir… !



Mais qui était donc Sainte-Marguerite ? Ecoutons sa légende…



Sainte Marguerite aurait vécu dans le courant du IIIè siècle de notre ère et serait originaire d’Antioche de Pisidie, au cœur de l’Anatolie, Turquie actuelle. Selon toute vraisemblance, elle aurait subi le martyr pour ne pas avoir voulu abjurer sa foi chrétienne. Sainte thaumaturge (qui fait des miracles de guérison), on l’invoque plus particulièrement pour les maux de reins et les accouchements. Cette fonction est à rattacher au principal épisode de sa vie, rapporté par Jacques Voragine dans « la légende dorée ».

Selon Victorien Leman (docteur en histoire médiévale), Sainte-Marguerite aurait eu à affronter un dragon qui la dévore. Mais la sainte, ayant été avalée par le dragon, parvient miraculeusement à s’extraire du ventre du monstre en s’aidant d’une croix : elle lui ouvre le ventre, s'en échappe et le piétine. Elle est souvent associée à Saint- Michel, l’archange qui maitrise la force du dragon de terre !



Photo : la croix de bois de « la vieille-chapelle » entrant dans le ventre du dragon d’eau, dragon noir !

Un peu d’éthymologie : Marga en celte/gaulois veut dire argile, il a donné en français, Mare, Marnes, Marais, etc.. Nombre de lieux Margarat jalonnent nos monts, que ce soit sous le rocher du Dentillon, ou sur les monts du lyonnais, autour de la rivière Coise. Ces lieux indiquent que ces eaux étaient sacralisées par de grands rituels, pour apporter la bénédiction à de vastes bassins versants.

Et la symbolique du dragon : il représente la victoire sur le mal. Il y a des dragons terrestres, aquatiques, sous-terrain et céleste (Quetzalcoatl). Ce sont les 4 aspects de la puissance divine.

Chez les Celtes, le dragon symbolise le roi sur son trône associé à la foudre (le feu représente la fonction royale) et à la fertilité (l’eau = le rythme de la vie).

En Chine, c’est le symbole de l’empereur. La perle du dragon contenue dans sa gorge est la parole de l’empereur. Il vit dans l’eau, fait naitre les sources, produit la pluie et le tonnerre. Il est le lien entre la terre et la pluie céleste qui la féconde.

Le dragon est aussi l’inconscient collectif, la mémoire ancestrale, la puissance maléfique.

Le dragon recrache sa proie, ici Ste Marguerite, après l’avoir transfigurée !

 

Jean-Louis Augay, dans « La voie des pierres », parle de la légende alchimique du dragon qui divulgue, par sa symbolique, la véritable transmutation de l’homme !

 

Mais avançons un peu plus dans la chapelle et plaçons-nous face à l’ancien autel en bois, disparu aujourd’hui (encore une fois, le bois a été utilisé de manière éphémère).



Entre les 2 chapelles latérales, juste avant l’estrade actuelle, se trouve un point énergétique fort intense, que l’on peut nommer vortex.



Nous pouvons supposer que, la chapelle ayant été agrandie, l’officiant célébrait à cet emplacement précis.

 

Pénétrons dans la sacristie : Saint Jacques le Majeur, coquille sur le front de son couvre-chef. De sa main démesurée, il bénit le pèlerin qui marche vers l’eau guérisseuse…Il tient le livre ouvert, le livre de la connaissance. Il la transmet !



Face à lui, dans la sacristie, un petit « lavabo » en pierre, pour le lavage des mains de l’officiant ; c’est donc d’ici que s’écoule l’eau à l’extérieur sur la façade Est.



Il était important de se laver les mains…Quelles hypothèses pour cette chapelle entourée d’eau et de sa symbolique ???

Des drains ont été installés autour du bâtiment, lors de la rénovation. Les enduits ont été refaits dans les règles de l’art…Mais l’eau s’infiltre toujours, laissant des traces sur les dalles, sur les marches, sur les murs…



Ce chef d’œuvre d’origine romane, mentionné dès l’an 984, détruit à multiples reprises (guerres de religion, baron des Adrets, révolution, abandon suite à sa désaffectation en 1860…), a été reconstruit depuis la création en 1984 de l’Association de Sauvegarde de la Vieille Chapelle, qui a su, avec ténacité, récolter les moyens et mettre en œuvre la rénovation dans les règles du respect du patrimoine (notons que l’association a vu le jour pour le 1000ème anniversaire de la chapelle). De ce fait, l’énergie de la chapelle est remarquable !

Les vitraux uniques et emplis de symboles, évoquent les 4 éléments, le passage du matériel au spirituel. Celui du Sud-ouest représente la mer, les vagues, une voile de planche à voile. Ils sont dans les mêmes tons que les restes de fresques peint dans le chœur sur le mur Est.

Nous sommes donc face à un lieu sans doute guérisseur, ou considéré comme tel, l’eau coulant depuis le Mont Monnet et le Mont Ministre étant d’une grande qualité vibratoire.

De nombreux pèlerins sont venus, des marchands, des passants…quels rituels étaient donc pratiqués à l’emplacement de la chapelle où l’eau sourdait ?

Descendait-on des marches pour s’immerger dans des fonds baptismaux païens ? Soignait-elle les maux de reins ? Sa source rendait-elle les accouchements plus faciles ? Y pratiquait-on déjà des césariennes ?

Un certain Monsieur Lazare aurait été actif et efficace dans le déblocage de la restauration de la chapelle…



Photo : n’est-ce pas la lumière entrant dans le tombeau vide ?

Par analogie avec la symbolique de ce nom, nous pouvons nous poser la question : cette eau redonnait-elle vie aux bébés morts-nés, le temps d’un baptême, comme le sont les vierges noires et leurs sources associées.

Toujours par analogie, cette fois-ci avec la chapelle Saint-Sabin à Véranne : bordée de tumulus, lieu de pèlerinage, sa source sacrée est bien connue - des fouilles ont révélé des ex-votos pour des bébés sans doute morts en bas âge…

Que d’hypothèses que nous laisserons en suspens (terme qui trouve son origine dans le droit canonique, désignant un ecclésiastique suspendu de ses fonctions), le temps de rassembler d’autres éléments…

Moyen en quoi, la date fixée par l’Association pour les concerts à l’intérieur de la chapelle, retenue « par hasard, pour ne pas concurrencer d’autres fêtes pilatoises » est le 3ème week-end de juillet. Notons que dans le calendrier, Sainte Marguerite est fêtée le 20 juillet ! Quelle justesse !

Pascale Turbet Delof, le 29 avril 2021

www.aufildelaterre.fr

 

Je remercie sincèrement l’Association pour la sauvegarde de la vieille-chapelle ainsi que ses membres

Je remercie Pierre Dumas, qui a su, par ses photographies, donner vie à mes propos.




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