DOSSIER NOVEMBRE 2016



Par Patrick Berlier



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LES CHARTREUX DU PILAT DANS LA TOURMENTE RÉVOLUTIONNAIRE

1789 : l’orage qui grondait depuis longtemps a fini par éclater. Le 20 juin les députés du tiers-état, réunis à Versailles pour les états généraux, ont investi la salle du Jeu de paume à Paris pour se constituer en Assemblée Nationale, laquelle par un serment solennel a posé le principe d’un pouvoir issu de la Nation face au pouvoir royal absolutiste. Pour matérialiser très symboliquement cet acquis, le 14 juillet le peuple de Paris a pris la Bastille, emblème de l’autorité royale. Ceux qui sont désormais à la tête des affaires publiques précipitent les réformes, parfois de manière irréfléchie. Le 2 novembre de la même année, un décret de l’Assemblée Constituante décide de mettre les biens ecclésiastiques à la disposition de la Nation, puis cinq jours plus tard la même assemblée décide de les placer sous la surveillance des autorités locales. Les supérieurs des monastères doivent déclarer tous leurs biens mobiliers et immobiliers.

 

Sainte-Croix-en-Jarez en 1789

(Lithographie ancienne)

Début 1790 se met en place le découpage administratif de la France avec la création des départements. Tout le Pilat se retrouve dans le département de Rhône et Loire, situation qui se révèlera provisoire et verra ensuite quelques années plus tard la scission en deux départements distincts. À cette occasion plusieurs territoires qui appartenaient au Lyonnais sous l’Ancien Régime passeront dans le département de la Loire. C’est ainsi que la commune de Pavezin deviendra ligérienne, et avec elle la chartreuse de Sainte-Croix-en-Jarez. Mais n’anticipons pas.

Le 13 février 1790 l’Assemblée supprime tous les ordres et congrégations. On comprend que rapidement leurs maisons seront saisies et vendues au profit de la Nation. Le 4 mai, la toute jeune municipalité de Pavezin présidée par son maire Fleury Font vient procéder à l’inventaire des biens de la chartreuse de Sainte-Croix-en-Jarez. Elle est obligée de reconnaître que les religieux vivent pauvrement et que la maison ne possède aucune fortune. Le même jour, le maire de Tarentaise Jean-Claude Séon procède à l’inventaire des biens de la maison que les Chartreux possèdent sur cette commune à Prarouet, et il en sera de même pour l’ensemble de leurs propriétés.

C’est en 1673 que les Chartreux ont commencé à acquérir un vaste domaine situé sur les paroisses Rochetaillée (qui comprenait alors le hameau de Tarentaise) et La Valla-en-Gier (qui comprenait le hameau du Bessat). Les Archives Départementales de la Loire conservent l’acte des « aquisitions faites à la montagne », qui commence par ces mots :

« La premiere aquisition que la chartreuse de Sainte-Croix aye fait a la montagne de Pila est celle du domaine du Bessat par le R. P. Dom Malard prieur de cette maison et le R. P. Dom Bertolet procureur qui consistoit en un domaine possede pour lors par Me Jean Ravachol avocat en parlement resident à Ville longe paroisse et mandement de Roche taillee. »

Est respectée bien entendu l’orthographe originelle employée par ce document, ainsi que pour toutes les autres citations à venir. L’absence de ponctuation et d’accentuation était l’usage de l’époque. Nous verrons que par la suite points, virgules et accents apparaîtront, au fil du temps, jusqu’à ce que la norme actuelle finisse par s’imposer dans les dernières années du XVIIIe siècle.


Acte d’acquisition des domaines du Bessat et Tarentaise

(Archives Départementales de la Loire)

Les Archives Départementales conservent, sous la cote H 27, cartons 1 et 2, tout un lot de papiers relatifs aux Chartreux de Sainte-Croix-en-Jarez. Ces documents sont purement civils et ne concernent pas la vie religieuse ; ce sont essentiellement des actes notariés, des inventaires et des plans. On remarque en particulier le plan schématique du découpage des bois d’Argental, partie du Grand Bois appartenant à la chartreuse. Et puis des courriers échangés avec les autorités, et les courriers de ces mêmes autorités relatifs à la chartreuse, pendant la période postérieure à 1789. On suit de la sorte, grâce à ces archives, tous les démêlés que les Chartreux eurent avec les révolutionnaires.

C’est ainsi que le 12 mai 1790 tous les religieux de la chartreuse de Sainte-Croix-en-Jarez, les huit pères et les six frères donnés, sont interrogés pour savoir s’ils désirent se retirer de la communauté et vivre dans le monde, comme le décret du 20 mars 1790 leur en donne le droit, ou continuer à vivre dans la chartreuse. Tous choisissent cette seconde possibilité, à l’exception d’un père et de trois frères. Parmi ces frères est le nommé Georges Pécoul, qui quittera Sainte-Croix six mois plus tard. À cette occasion, le prieur Dom Jean-Baptiste Livinhac lui remettra un certificat signé de sa main et orné du sceau de la chartreuse, document conservé aux Archives, dont voici la transcription :

« Je soussigné prieur de la chartreuse de Sainte Croix en Jarret certifie que le nommé George Pecoul de la paroisse de Contreve en Bugey, agé d’environ quarante années a resté dans la ditte chartreuse en qualité de postulant, novice, et frere donné, l’espace d’environ trois années, pendant lesquelles il s’y est comporté honnetement et en bon chretien. En foi de quoi je luy ai délivré le present certificat pour luy servir tel que de droit. Fait à la chartreuse de Sainte (Croix), le vingt novembre mille sept cent quatrevingt et dix, et ai apposé le sceau de la ditte chartreuse. »


Signature du prieur Dom Livinhac

au bas du certificat destiné au frère Georges Pécoul

(Archives Départementales de la Loire)

Par un courrier daté du 27 mai 1790, Dom Bruno Bon procureur de la chartreuse de Sainte-Croix-en-Jarez s’adresse aux maires de La Valla et Tarentaise. Il expose que de la chartreuse dépendent plusieurs bois de sapins situés sur les territoires de leurs municipalités. Il poursuit en ces termes :

« L’exploitation de ces bois a toujour eté faitte avec soin et regularité ; aussi ces bois sont-ils dans le meilleur etat. Le mois de juin offre toujours une coupe a faire, cette coupe pour alimenter cinq scies et un sixieme dans une autre scie exige ordinairement l’abbattis de huit a neuf cents arbres sapins. Elle est necessaire, indispensable meme, cette coupe, pour fournir aux besoins journaliers et au payement des impositions de la maison de Sainte-Croix.

Les decrets de l’assemblée nationale en declarant les biens ecclesiastiques à la disposition de la nation, laissent aux possesseurs d’iceux la faculté de les regir et administrer jusqu’a ce qu’elle ait statué autrement. »

Le procureur en conclut que cette disposition autorise les Chartreux à procéder à la coupe annuelle et à débiter les arbres, pour leur usage (chauffage, charpentes, ébénisterie, etc.), ou pour les vendre afin de payer les impôts auxquels la chartreuse est de plus en plus soumise. Cependant, soupçonnant une mauvaise volonté de la part des municipalités, il leur rappelle poliment quels sont leurs devoirs, et il prend la précaution d’ajouter une imploration de la part des Chartreux :

« Ils vous supplient messieurs de donner vos soins à ce qu’ils ne soient point inquietés, ny arrettés dans l’exercice d’un droit qui leur est assuré, ils le regrettent, par les decrets de l’assemblée nationale. »


Lettre du procureur Dom Bruno Bon

(Archives Départementales de la Loire)

La municipalité de la Valla se réunit pour examiner la demande des Chartreux, qu’elle décide de refuser. Elle répond par écrit aux Chartreux, et le rédacteur sans doute moyennement instruit use d’une orthographe approximative pour justifier la décision en ces termes :

« …attendü les couppes extraordinaire par eux faite depuis le mois d’octobre dernier jusqu’a la fin du mois de mars de l’année presente qui on causée un dégat affreux dans ladicte forêt es qui ons produit des sommes considerables aux supplians : elle se croit au contraire otorisée et même obligée à employer toute son autorité pour que les dégats fait dans ladicte forêt ne soient pas continuer »

La municipalité conclut en accusant les religieux de ne pas exploiter les forêts « en pères de famille », finissant même par mettre en doute leur légitimité dans la possession de ces bois. La commune de Tarentaise agira de même. Les Chartreux feront la sourde oreille, et passeront outre la décision des municipalités. Certains de leur bon droit, en juin ils abattent leurs arbres comme ils avaient prévu de la faire.

Le 31 juillet suivant, un nommé Chirat, procureur général syndic du directoire du département de Rhône et Loire, envoie à son supérieur un courrier ainsi rédigé :

« J’ai l’honneur de vous adresser ci-joint une lettre de la municipalité de Tarentaise par laquelle elle informe le département de Rhône et Loire d’un abbatis considérable d’arbres fait par les Chartreux de Sainte-Croix dans la forêt de Praroé et ce (malgré) son refus de les autoriser à y faire une coupe des bois. »

Chirat craint que les religieux ne s’adressent au directoire pour obtenir cette autorisation, et il prend les devants. En effet, les Chartreux persistent et s’entêtent… Finalement, le 26 août le Directoire leur interdit toute coupe de bois dans leurs forêts. Le 15 septembre le même Chirat envoie un nouveau courrier :

« J’ai l’honneur de vous adresser ci-joint un mémoire présenté par les Chartreux de la maison de Sainte-Croix dans lequel ils demandent 1° d’etre autorisés à la coupe ordinaire de leurs bois, 2° que main levée leur soit accordée des saisies faites par les collecteurs des Municipalités de Tarentaise Lavala et Rive de Gier surs leurs revenus à raison des impositions qu’ils doivent dans ces différentes paroisses. »

En d’autres termes, les Chartreux se plaignent de payer trop d’impôts et demandent à en être relevés, d’autant que la commune de Tarentaise a fait abattre des arbres de leurs forêts à son profit, ce qui n’empêche pas l’Administration révolutionnaire de réclamer aux Chartreux un impôt sur ces mêmes forêts.

 

Signature du procureur général syndic Chirat

(Archives Départementales de la Loire)

Le 21 septembre, les Chartreux adressent au Directoire du district de Saint-Étienne une requête par laquelle ils présentent les faits et réclament justice :

« Les paroisses de Rive de Gier et de Tarentaise principalement ont mis le comble aux vexations. Elles ont fait saisir à leur préjudice [celui des Chartreux] des biens qui se trouvent compris dans leur étendue... La municipalité de Tarentaise a encore poussé plus loin sa méchanceté, elle a fait saisir toutes les planches qui se sont trouvées dans différentes scieries, quoiqu’il fût à sa connoissance que la majeure partie d’icelles soit vendue et payée. »

Le 19 octobre, c’est Dom Livinhac en personne, le prieur de Sainte-Croix-en-Jarez, qui revient à la charge dans une longue missive adressée au même Directoire :

« Puisque contre les vœux bien prononcés des décrets de l’Assemblée Nationale, il n’est pas libre aux Chartreux de continuer l’exploitation de leurs bois sapins, il est de toute justice qu’ils ne soient pas soumis à des impositions pour des propriétés sur lesquelles il leur est interdit de prelever toute recolte… »

Le prieur détaille point par point différents griefs. Sa requête va être examinée en détails par les officiers municipaux de la commune de Tarentaise, et fera l’objet d’un jugement rendu le 29 octobre 1790. La publication imprimée de ce jugement est également conservée par les Archives Départementales. Cette fois l’orthographe de l’époque, comme la langue française, sont rigoureusement respectées, et le réquisitoire a même recours à des citations latines et à des références évangéliques. On se demande si la plume d’un Danton, d’un Robespierre, ou d’un Saint-Just, n’est pas venue se substituer à celle des officiers municipaux bien incapables d’une telle prouesse stylistique. Le ton est cinglant et railleur. Les Chartreux se plaignent de voir les parts modifiées à leur détriment, ce qui les a prodigieusement chargés : jadis propriétaires du huitième des biens appartenant désormais à la nation, ils sont taxés sur la moitié. Les officiers municipaux reconnaissent avoir modifié leurs parts, et s’expliquent :

« Le seul fait dont nous convenons, en niant tous les autres, c’est d’avoir diminué nos cotes et celles de nos voisins. Conformément aux décrets de l’Assemblée Nationale, l’imposition des ci-devant privilégiés, doit tourner au profit des ci-devant Roturiers. Il falloit donc bien diminuer nos cotes et celles de nos voisins, à moins de ne pas imposer ceux, qui, par les nouvelles loix, doivent l’être. Le seul crime que peuvent nous reprocher les Peres Chartreux, c’est de ne les avoir pas imposés dans la même proportion que les autres taillables. »

Les officiers municipaux en profitent pour contester cette part d’un huitième annoncée par les Chartreux, affirmant que même si cela était vrai sa valeur serait bien supérieure à celle d’un huitième des parts. Les forêts des Chartreux, gérées avec intelligence, ont en effet sans doute bien plus de valeur que les autres, ce qui ne peut qu’exciter des convoitises. Les roturiers qui voient leurs impôts diminués comptent sur cette économie pour pouvoir les acquérir à vil prix lorsque la Nation décidera de les vendre, ce qui ne saurait tarder. Quant aux arbres coupés, ils ont servi, affirment les officiers, à réparer toiture et plancher de l’église de Tarentaise qui menaçait ruine. Le réquisitoire conclut l’examen de ce premier grief par une formule assassine :

« A qui doit-on donc se fier, si des bouches qui ne doivent être occupées qu’à chanter jour et nuit les louanges du Seigneur, se plaisent à distiler le mensonge ? »


Publication du jugement rendu le 29 octobre 1790 à Tarentaise

(Archives Départementales de la Loire)

Vient ensuite l’examen du second grief. Les Chartreux s’étonnent qu’un scieur de Monsieur de Rochetaillée ne soit pas soumis à l’imposition. Les officiers municipaux rétorquent que ce scieur a toujours été considéré comme un domestique, non imposable donc, d’où cette conclusion :

« Il suffit sans doute, nos Peres, pour vous imposer silence, de vous prouver que la cote de ce Scieur est comprise dans celle de M. de Rochetaillée. Comparez vos revenus avec les siens, comparez sa cote avec la vôtre ; et il vous sera aisé de vous convaincre qu’il paie, et pour lui, et pour son Scieur : il n’y a donc que lui seul qui puisse avoir le droit de se plaindre. »

Poursuivant sur le même ton, le jugement observe avec ironie :

« Depuis long-tems, nous reconnoissons en vous les Lévites et les Prêtres de l’Evangile ; et dans M. de Rochetaillée nous reconnoissons le charitable Samaritain. Il est toujours disposé à voler au secours des malheureux ; et, sans l’avoir consulté, nous pouvons affirmer qu’il se félicite de supporter la cote de son Scieur […] S’il n’est plus notre Seigneur, il sera toujours notre pere, nous serons toujours ses enfans. Tels sont nos sentimens ; notre cœur se dilate en lui rendant ce témoignage de reconnoissance et d’amour. »

Curieuse disposition d’esprit de la part de révolutionnaires, que l’on aurait cru moins enclins à une telle gratitude envers un aristocrate… Mais ce respect, ils sont loin de l’appliquer envers les Chartreux, qu’ils poursuivent de leur haine :

« …depuis plus de neuf mois vous ne cessez de commettre toute espèce de dégradations dans les bois de Tarentaize […] vous y coupés, non en pères de famille, mais en vrai brigans qui cherchent à tout renverser et détruire […] par la plus grande des injustices, vous refusez de payer la valeur des instrumens servant à vos déprédations, sous le ridicule prétexte que c’est à la Nation… »

Au final, les Chartreux sont déboutés de leur requête, et condamnés à payer l’impôt prévu.

À la même époque, les révolutionnaires ont brusquement décidé de réunir les religieux d’un même ordre en une seule maison par département. Il en découle que les chartreuses de Lyon et de Sainte-Croix-en-Jarez se voient contraintes de se réunir en une seule maison, un projet irréaliste qui connaîtra quelques rebondissements. En attendant la décision des autorités, fin novembre 1790, Dom Livinhac reprend la plume pour écrire aux administrateurs du département de Rhône et Loire. Le courrier est reçu le 29 novembre, et renvoyé au district de Saint-Étienne le 1er décembre. Le prieur proteste contre une décision inique :

« …par délibération du district de Saint-Étienne du vingt-trois du présent mois dont copie est ci-jointe, il a été fait déffense aux nommés Coron père et fils, grangers du domaine d’Antouilleux, paroisse de Rive de Gier, et autre granger de la dite chartreuse, de délivrer trente-cinq ânées de vin et quatre-vingt dix bichées de blé appelé blondin revenant à la dite chartreuse, sous le prétexte que cette denrée vu le prix d’icelle doit être versée entre les mains du Receveur du district pour servir au payement du traitement du clergé. »

Dom Livinhac fait poliment remarquer que la chartreuse fait partie du clergé et qu’elle n’a jamais perçu le moindre traitement.


Début de la lettre de Dom Livinhac, annotations de l’Administration en marge

(Archives Départementales de la Loire)

Le 28 février 1791 resurgit le projet d’union des deux chartreuses. Les édiles lyonnais sont obligés de constater qu’il est impossible de loger tout le monde à Sainte-Croix-en-Jarez :

« Nous ne pouvons assurer l’exécution des dispositions de la loi du 14 octobre 1790 et ordonner en conséquence la réunion des religieux Chartreux de Lyon au nombre de 15 et de 3 frères convers, à la maison du même ordre établie à Sainte-Croix, qu’autant que la disposition des bâtiments et des appartements de cette maison le permettrait. »

Le directoire se range à cet avis, et décide au contraire d’envoyer à Lyon les Chartreux de Sainte-Croix-en-Jarez. Mais le 26 mars le conseil municipal de Lyon fait remarquer que les bâtiments de la chartreuse de Lyon, plus grands et plus modernes, situés dans le voisinage de la ville, se vendraient plus facilement et plus cher que ceux de la chartreuse de Sainte-Croix perdus dans la montagne du Pilat. La décision est prise, et la chartreuse de Lyon est rapidement vendue. Quelques religieux s’en vont, mais il en reste une poignée qu’il faudra bien réussir à loger à Sainte-Croix. Les administrateurs du département viennent une nouvelle fois inspecter les lieux. Finalement, les huit derniers Chartreux de Lyon abandonnent leur maison dans la nuit du 21 au 22 décembre 1791. Après une longue marche éprouvante, ils arrivent à Sainte-Croix-en-Jarez, où Dom Livinhac réussit à tous les loger. Mais il sait bien que la vie de sa maison ne tient plus qu’à un fil.

Le 17 août 1792, un décret-loi supprime définitivement les congrégations religieuses et ordonne l’évacuation complète des monastères pour le 1er octobre suivant. Le 14 septembre, en vertu de cette loi les officiers municipaux de Pavezin viennent procéder à un ultime inventaire des biens de la chartreuse, dont les clés sont remises au maire. Quelques jours plus tôt les meubles de la maison de Prarouet ont été vendus. Le 1er octobre, comme prévu les Chartreux de Sainte-Croix-en-Jarez quittent définitivement leur maison, qui va être vendue comme bien national. Ils se dispersent, chacun allant vers son destin. Dom Livinhac se réfugie en Suisse à la chartreuse de la Part-Dieu, puis il finira ses jours en Allemagne. Plusieurs pères originaires du Velay retournent dans leur pays natal. Seul Dom Norbert Baumann ne peut se résoudre à quitter le Pilat. Il restera dans la paroisse de Pavezin, caché dans quelques fermes où il apportera le soutien de la religion aux populations locales restées très pieuses. Les révolutionnaires le traquent, mais certaines fermes possèdent des portes dérobées communiquant avec d’autres bâtiments. Dom Baumann parvient toujours à échapper à ses poursuivants, quitte à se cacher dans les bois qu’il connaît bien. Après la signature du Concordat il sortira de sa retraite secrète et finira ses jours à Saint-Martin-la-Plaine.




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Bernard Serva est un vrai personnage du Pilat, une figure locale particulièrement attachante. Ce fut un grand bonheur que de le rencontrer et ensemble réaliser l'interview que vous allez découvrir. De la seule race des humains, il consacre sa vie aux autres. Il demeure un exemple, une référence d'humilité et de bonté. Toujours partant, dynamique et enthousiaste, on peut compter sur lui. Combien d'associations se sont significativement appuyées sur lui et d'abord sur sa gentillesse extrêmement désintéressée ? Merci Bernard, vous avez tout compris, il n'y a plus qu'à continuer sur cette voie.






1/ Regards du Pilat : bonjour. Véritable touche à tout, votre métier premier se rapproche du travail des métaux, donc de compétences techniques et manuelles. Comment définiriez-vous cette approche humaine, une aspiration finalement ?

Bernard Serva : j’aime comprendre ce qui a été créé par l’Homme, j’essaie juste de l’améliorer.

2/ Regards du Pilat : il transpire de votre personnage que les enfants, plus largement la jeunesse sont très chers à votre cœur. Qu’en est-il exactement ?

Bernard Serva : depuis tout petit je travaillais avec mon père, à dix ans placé chez des paysans pendant les grandes vacances, à dix huit ans j'étais déjà ouvrier boulanger, donc je n'ai pas eu de jeunesse, je vis ma jeunesse à travers eux.

3/ Regards du Pilat : grand sportif (sans humour déplacé)  du dimanche, fidèle bénévole du club de Football Mont Pilat, que représente le sport à vos yeux ?

Bernard Serva : d'abord un amusement, où l'on peut se permettre de se dépasser et pour ceux qui y arrivent, montrer que tout est possible.

4/ Regards du Pilat : musicien, chanteur, ce sont là si l’on peut dire, d’autres cordes à votre arc. Quelle place tiennent ces autres hobbies dans votre vie ?

Bernard Serva : mon patron en boulangerie n'aimait aucune musique, je le plains encore, il est passé à côté d'un monde merveilleux. 

5/ Regards du Pilat : épris de convivialité, d’animations festives de village, vous aimez vraiment les gens. Etes-vous d’accord avec ce constat ?

Bernard Serva : bien sûr, que c'est jouissif de voir pendant ces moments-là, le monde, ces gens, oublier leurs misères quotidiennes.

6/ Regards du Pilat : vous adorez aussi l’informatique, autodidacte dans ce domaine, comment qualifieriez-vous cette attirance ?

Bernard Serva : d'un côté, il apporte un progrès inestimable, improbable il y a cinquante ans, d'un autre je vois les jeunes s'enfoncer dans un monde virtuel où ils ne se parlent plus.

7/ Regards du Pilat : évidemment, nous pourrions dire, passionné d’Histoire et de Patrimoine, que vous inspire le Pilat avec cette approche ?

Bernard Serva : c'est ma terre, mon paysage, ma vue, mon PILAT est incommensurablement ma patrie.

8/ Regards du Pilat : vous avez même été jusqu’à écrire un ouvrage de qualité, un conte médiéval se déroulant, entre autres, dans le Pilat et à Malleval plus exactement. Comment vous est venue cette idée ?

Bernard Serva : pour que ceux qui l'auront lu, se rendent compte qu'ici il y a des milliers de personnes qui ont vécu des histoires d'amour, et ce n'est qu'une aventure parmi toutes, que j'ai imaginée et qui a peut-être existée, qui sait.

Merci Bernard. Nous vous remercions.