<Retour au sommaire du site>


Les Châteaux de Pélussin




Présenté par
Thierry Rollat






Juin
2023



     De nos jours le seul château de Virieu, une propriété privée, qui semble laissée à l’abandon, se présente comme le dernier vestige d’une riche Histoire de châteaux sur la commune de Pélussin.

Tout un chacun peut observer ce château qui mériterait une sérieuse rénovation ; il ne manque pas de projets pour l’occuper utilement et notamment au service de la collectivité.


Vue générale  sur le  château  de Virieu de Pélussin

Le nom « Virieu » proviendrait de Virius, qui était un personnage romain qui aurait occupé en son temps ces lieux. Cette famille a laissé une trace de son passage sur une inscription aujourd’hui disparue à l’Abbaye Saint-Pierre de Vienne.

Il est fort probable qu’une maison romaine puisse avoir pris place ici même à Virieu. Les Romains s’installaient là où il y avait de l’eau en abondance et c’était le cas à Virieu. La position est dominante en plus.

On ne sait rien de cette époque romaine, pas plus que de ce qui prenait place ici même au Haut Moyen-Âge. On peut raisonnablement envisager que ces lieux furent constamment occupés.

Le château que l’on peut observer aujourd’hui à Virieu fut construit au 16ème siècle, bien qu’une rénovation de ce dernier fût réalisée vers les années 1890.

Le château du 16ème siècle aurait eu 4 tours pourtant il n'y en avait plus que deux en 1780 (voir plan). Ces deux tours en fin du 19ème siècle seront retouchées avec ce style néo roman.

Au 16ème siècle il ne fut pas décidé de fortifier ce château. Il a donc été construit en style renaissance. Il en était bien autrement au Moyen-Âge car hautement fortifié, il était réputé imprenable.

Il possédait alors un puissant donjon, un fossé à l’ouest et un mur d’enceinte conséquent se refermant sur un bourg fermé. On peut toujours observer l’emplacement de la porte ogivale de cette époque, tout près de la Halle.


Plan du quartier de Virieu en 1780

L’histoire de ce château se perd dans les méandres du 11ème siècle. Au 12ème siècle il est une des possessions des comtes de Forez qu’ils vont remettre au Lavieu lorsque ceux-ci s’installent dans le Jarez et alentours.

Ce sont les Jarez, cousins des Lavieu et même sans doute branche ainée qui a pris le nom de Jarez, qui vont succéder à ces mêmes Lavieu ici même à Virieu.

En 1173 Virieu dépend officiellement du Comté du lyonnais et c’est une dépendance des Seigneurs de Saint-Chamond, en l’occurrence les Jarez.

La construction de la chapelle Saint-Georges en 1300, sans doute en lieu et place d’une plus ancienne d’un autre vocable, n’est pas anecdotique.

Jacques de Jarez, le Seigneur régnant, la fit construire sur le modèle identique à celle d’Argental, d’où venait sa bien-aimée, Béatrix de Pagan.




La chapelle Saint-Georges du château de Virieu

Ce couple n’a officiellement pas eu d’enfants et ce point important a précipité la fin de ce nom de Jarez puisque les deux frères de Jacques qui vont lui succéder ne vont même pas se marier.

Jacques et Béatrix résidaient à Saint-Chamond et Virieu n’était qu’un château parmi d’autres de ce couple puissant. Notons aussi que Jacques était le neveu de Guillaume de Roussillon ; sa mère étant la sœur de Guillaume.

Je me suis, de longue date, interrogé sur cette fin précipitée des Jarez. Maintenant est-ce qu’il faut retenir qu’ils n’ont réellement pas eu de descendance. Je ne répondrai pas oui et donc dans ce cas-là elle serait officieuse ou clandestine comme vous le voulez ; un changement de nom n’étant pas à exclure.

Lorsque nous aborderons le second ou même troisième château de Pélussin, nous reviendrons un peu sur ce point intrigant.

Les Jarez qui auraient contracté des dettes importantes vont d’abord se séparer de l’un de leur château de Chavanay puis viendra le tour de celui de Virieu.

En 1307, les Dauphin du Viennois vont acheter Virieu aux Jarez, en leur laissant l’usufruit jusqu’à la mort de Jacques.

Ces mêmes dauphins de Vienne ne vont pas le conserver bien longtemps puisque dès 1336 ils le revendirent à Renaud de Forez le Baron de Malleval.

Cette baronnie de Malleval était unique en France car elle était le résultat d’un petit découpage du comté de Forez dont le siège était à Montbrison. A Malleval il y était surtout rendu justice ; oui, le baron avait ce pouvoir-là.


La dite commanderie de Malleval, là où était rendue la justice

Malleval, à cette époque était une place forte très importante, beaucoup plus puissante que Virieu dont dépendait ce dernier château, au même titre que ceux de Chavanay.

Il faudra attendre les Guerres de Religion pour voir Virieu reprendre de l’importance. La Famille de Fay, protestante au départ va incendier Malleval en 1574.

Devenus catholiques en suivant systématiquement les positions d’Henri IV, et ayant conquis la baronnie de Malleval, ils vont finalement s’installer à Virieu qu’ils firent remettre provisoirement en état de défense sous l’impulsion de Jean de Fay.

Le fils de Jean de Fay, François, ne laissera lui à sa mort que des enfants en bas âge et avec eux, bien trop jeunes, viendra la fin du rôle militaire de Virieu. Nous sommes à peine au milieu du 17ème siècle alors.

Puis les de Fay vont délaisser Virieu au profit de leur Château de Chavanay. C’est d’ailleurs là-bas que François de Fay est mort.

L’Histoire retient que ce sont les de Fay lors de leurs campagnes d’Italie au 16ème siècle qui vont ramener avec eux les premiers futurs mouliniers de soie du Pilat.

Le fief de Virieu, autour de son château verra donc de nombreux mouliniers s’installer. C’est aussi là la base d’une future division du futur village de Pélussin.

Effectivement de nombreux immigrés italiens vont réussir dans leurs différentes entreprises et certains vont même faire fortune et susciter quelques jalousies tels que les Benaÿ.


En souvenir de cette Famille italienne arrivée au 16ème siècle et qui a lancé l'industrie textile dans le Pilat

En 1787, un édit découpe les circonscriptions électorales. Virieu au dépend de Pélussin devient centre d’un arrondissement. Pourtant à la Révolution avec la création des cantons, ce sera Pélussin qui sera choisi comme chef-lieu de canton.

A ces époques, il faut bien comprendre qu’il existe deux entités séparées, à savoir Virieu et le bourg de Pélussin situé dans ce dernier cas autour du quartier Notre Dame ; le quartier des Croix actuel est  un lieu de prairies. Notons aussi qu’en termes de paroisse Virieu avait été rattaché à Pélussin dès 1375.

Nous avions laissé François de Fay avec des enfants en bas âge à Chavanay. Son jeune fils Gabriel finira par épouser une demoiselle de l’Estang qui ne lui donnera point d’enfants.

A la mort de Gabriel, Dame Marguerite de l’Estang devient baronne de Malleval. A ce titre, elle rend hommage au roi de France. Prise dans des tourments judiciaires, elle préfère faire hériter rapidement son neveu Claude de L’Estang.

Nous pouvons toujours observer de nos jours à la Chartreuse de Sainte-Croix-en-Jarez, deux cellules financées ou plutôt rénovées par les soins respectifs de Marguerite et de Claude de L’Estang.


Blason au dessus de l'une des deux cellules à Sainte-Croix choyée par les de l'Estang

Beaucoup de conflits sont à noter entre Claude de L’Estang et des tiers revendiquant des droits plus ou moins justifiés dans les environs directs du château de Virieu.

Différents accords sont passés, entremêlés de procès intentés par des fermiers du domaine royal. Claude de L’Estang aura gain de cause en 1695 par un arrêt du roi de France.

A son décès survenu en 1701 c’est Joseph François de Grolée, comte de Viriville qui devient l’héritier en titre. Il est alors baron de Malleval et Seigneur de Virieu.

Joseph François de Grolée meurt très vite et en 1705, il laisse deux enfants de 11 et 12 ans. Le garçon, Claude François va mourir à son tour en 1714 à l’âge de 20 ans.

Virieu, au gré de ces évènements tragiques va revenir alors à la Famille Olivier de Sénozan, toujours par héritage. Effectivement, la sœur de Claude François avait épousé en 1711, François Olivier de Sénozan.

Ce sont 4 générations d’Olivier de Sénozan qui vont se succéder de 1714 à 1794 ; François, Jean Antoine, Jean-François et enfin Madeleine Henriette Sabine.

A la Révolution, les biens de Madeleine Henriette Sabine vont être saisis puis rendus à la Famille en 1798. Entre temps, en 1794 Sabine est arrêtée comme aristocrate et noble. Elle mourra sur l’échafaud.

Le mari de cette dernière va lui survivre et prendra le titre de duc de Talleyrand. Il sera l’héritier du vieux château de Virieu avant que ce dernier ne passe aux mains de sa fille Françoise Xavier Mélanie Honorine de Talleyrand Périgord.

Elle a 16 ans lorsqu’elle épouse le comte Just de Noailles qui sera son tuteur. La Famille de Sénozan était endettée et pour éponger ses dettes le comte de Noailles a vendu la baronnie de Malleval dont le château de Virieu.


Autre vue sur le château de Virieu

Les acheteurs sont des négociants lyonnais, Etienne Marlier et Henry Rousselon. Ils n’ont pas eu pour but de garder les nombreux biens acquis avec cette opération dont aussi Malleval, Chavanay, Pélussin, Bœuf… Ces domaines seigneuriaux furent vendus par parcelles au plus offrant. Nous sommes en 1812-1813.

C’est à cette date qu’apparaissent les Jullien comme propriétaire du château de Virieu. Ils le sont toujours aujourd’hui bien qu’entre- temps leur nom est devenu Jullien de Pommerol.

C’est Roch Jullien qui va acquérir le château de Virieu en l’achetant aux enchères proposées par les négociants lyonnais évoqués il y a deux paragraphes.

La Famille Jullien et Pélussin sont à la source d’une longue histoire. On dit que Roch Jullien fut le premier maire de Pélussin. Son fils Alexandre du Colombier sera également maire de Pélussin et là sur deux longues périodes, de 1815 à 1830 et de 1830 à 1848.

Jullien du Colombier fut également conseiller général. Il est à l’origine de la construction de l’église des Croix. C’est son neveu, Benoit, qui lui succède à Virieu, même s’il passe sa vie entre Pélussin et Lyon.

En 1865 sera construite la magnifique maison bourgeoise des Jullien que l’on apparente encore de nos jours à un château, à ne pas confondre bien entendu avec le château de Virieu dont Benoit était évidemment propriétaire.


La maison bourgeoise des Jullien construite en 1865

C’est à partir du fils de Benoit, un nouvel Alexandre, que la particule de Pommerol sera ajoutée au nom de Jullien. Alexandre Jullien de Pommerol sera maire de Pélussin de 1852 à 1870 et à nouveau de 1871 à 1875 car entre temps révoqué par le préfet.

Le château de Virieu, en ces époques, continue donc d’être la propriété des Jullien de Pommerol. Gabriel succède à son père Alexandre, puis ce sera le tour de François puis d’un nouveau Gabriel.

Pélussin ne devient plus qu’un pied à terre avec principalement la maison bourgeoise évoquée un peu avant. Le château de Virieu est délaissé malgré la rénovation en 1890 des deux tours que nous connaissons aujourd’hui.

Gabriel va confier la propriété de Pélussin à son fils Roger en 1967. Roger est aujourd’hui décédé et c’est une société immobilière propriété de la Famille Jullien qui gère les intérêts notamment pélussinois.

Je viens de m’efforcer de remonter le temps avec cette longue histoire du château de Virieu et je déplore à nouveau dans le texte qu’un si beau patrimoine ne puisse pas profiter à la collectivité d’une manière ou d’une autre car il est en état d’abandon depuis des lustres.

Si on ne cherche pas à fouiller plus avant l’histoire de Pélussin, on pourrait imaginer que Virieu fut le seul château ayant jamais existé dans cette jolie petite ville, or il en est bien autrement.

Si on admet qu’il y eu de longue date une occupation du site de Virieu, il en fut jadis de même au quartier Notre-Dame. Aucune trace ne laisse présager qu’un château puisse avoir pris place en ce dernier lieu cité.

Pourtant un château primitif, peut-être apparenté à une maison forte, a bien pris place autour de l’an mil dans les environs directs de l’église actuelle de Notre Dame.


L'église Notre Dame aujourd'hui

L’histoire religieuse de Pélussin commence en ce secteur. On peut retenir qu’un prieuré dépendant de Saint-André le Bas à Vienne fut érigé ici même à partir du 6ème siècle.

Quelques religieux accompagnés d’un prieur vivaient en ces lieux. Ce prieuré se situait dans la rue dite du cloitre, derrière la boulangerie actuelle.

On peut envisager qu’en lieu et place de l’église, toujours au 6ème siècle, prenait place une chapelle avec en ces sous-sols la crypte Notre Dame soubs Terre que nous connaissons encore en 2022.

L’abbé Batia, dans ses précieux écrits laissés à la postérité en 1923, n’hésite pas à retenir qu’il y avait déjà un site religieux à l’emplacement de Notre Dame soubs Terre en l’an 177.

De toutes les manières, on peut affirmer que cette crypte est la plus vieille construction chrétienne de tout le Pilat. A une date inconnue une première église apparut forcément et au 11ème siècle, une église flambant neuve fut construite.

Cette église du 11ème siècle sera rasée à la fin du 19ème siècle pour laisser place à celle que nous connaissons aujourd’hui. Notons que la crypte Notre Dame soubs Terre fut conservée lors de l’érection de la nouvelle église.



L'église primitive du 11ème siècle qui portait le vocable de Saint Blaise

Pour revenir au prieuré il faut savoir qu’ils étaient forts nombreux en ces époques ; 1500 dépendaient de Saint André le Bas. Pour les protéger des pillards, les monastères font fortifier leurs prieurés.

On sait qu’une galerie souterraine permettait aux religieux d’aller prier en bonne sécurité de leur prieuré jusqu’à la crypte Notre Dame soubs Terre située à moins de 100 mètres.

On ne sait pas en revanche à quelle date exacte ce prieuré fut transformé en paroisse mais il l’était de manière certaine en l’an 1030 puisqu’à cette date on retrouve dans les textes la paroisse de Pulcin.

C’est dans cet environnement historique là qu’il faut envisager l’apparition de ce premier château, que nous retenons plutôt comme une maison forte.

Le commun des mortels n’a pas conscience aujourd’hui de cette réalité fort ancienne pourtant la courageuse mémoire collective de vieilles familles porte encore la trace de ce château primitif.

Ce château primitif avait vocation à protéger ces sites religieux et par là même sans doute aussi les rares habitants du futur quartier Notre Dame.

Il est légitime de se demander où prenait place cette maison forte. La mémoire collective précise que c’est dans la rue actuelle de la Ranconie qu’il faut rechercher cet emplacement ancestral.

Un puit magistral qui a traversé de très nombreux siècles pourrait bien être comme le souligne Noël Oriol une mémoire du pays, le puits de cette première maison forte du futur village de Pélussin.

L’abbé Batia évoque des Chevaliers de Pélucin qui auraient eu leur fief en ces lieux de cette maison forte primitive. L’histoire, là devient plus précise, puisque ces Chevaliers de Pélucin auraient abandonné ce petit château primitif aux alentours de 1307.

Cette date de 1307 sera notre transition puisqu’elle nous entraine directement vers l’histoire du 3ème château de Pélussin. Les Chevaliers de Pélucin écrit un temps Pulcin ou encore Polcin, vont intégrer le futur site de La Valette.

Aujourd’hui quand on s’intéresse à l’histoire de Pélussin, on apprend très vite qu’un château fut démantelé à la Révolution française dans le hameau toujours actuel de La Valette.

La Valette présente une grande histoire qui commence dans l’obscurité de réalités oubliées et gommées par le temps qui passe et efface. Sans le travail de l’abbé Batia beaucoup de pans de cette histoire auraient disparu.

Lorsque les Chevaliers de Pélucin intègrent le site de La Valette celui-ci se nomme La Grange-lez-Pélucin. Nous sommes en 1307 et on ne sait que bien peu de choses de cette époque.

Qui étaient ces Chevaliers de Pélucin ? La question reste posée. Ces seigneurs ont pris le nom du petit bourg qu’ils avaient en garde sur le quartier Notre Dame mais qui étaient-ils vraiment, nous ne pouvons y répondre.

En première intention, l’abbé Batia les voit plutôt comme des non affiliés aux seigneurs de Jarez qui règnent entre autres sur Virieu. Etaient-ils concurrents ou au contraire étaient-ils alliés voire parents ? Nous ne pouvons répondre par une quelconque affirmative.

Il existe à La Valette de nos jours quelques rares vestiges de ces époques révolues mais il reste difficile de les dater avec exactitude. L’histoire de La Valette s’étend au moins jusqu’à La Révolution française.

Lorsque l’on se rend sur le site du vieux château disparu, dans la montée goudronnée qui nous y conduit, nous pouvons observer sur la droite, une croix en granit aussi intéressante que curieuse.


La croix énigmatique de La Valette

Dans le livre du patrimoine publié par l’association Visages de notre Pilat en 2004, Michel Lhortolat n’hésite pas à écrire que cette croix s’avère la plus étrange de la région ; je partage son point de vue.

Elle possède au dos, deux symboles non chrétiens à proprement parler à savoir la lune et le soleil. Le plus intéressant se trouve sans doute sur sa face avec au centre une belle croix pattée en mouvement.

Il est tentant de lorgner du côté des Templiers car de vieilles rumeurs évoquent la présence templière ici même à La Valette. Outre la mémoire collective qui porte ces vieilles rumeurs, Patrick Berlier a aussi argumenté dans ce sens.

En 2002, Patrick a publié un ouvrage « Avec les pèlerins de Compostelle ». Lorsqu’il mentionne le site de La Valette, il s’étend quelque peu sur des croyances populaires qui parlent carrément de rassemblements secrets de Templiers ici même en ces lieux.

Claude Bonnard et Louis Ericher, tous deux décédés évoquaient également la trace de l’ombre du Temple ici même. On peut d’ailleurs se demander si cette date de 1307 qui correspond aussi à la date d’arrestation des Templiers sur le sol de France reste ici le fruit du hasard.

Il n’est pas possible de dater cette croix mais elle nous arrive d’une époque fort reculée, cela on ne peut en douter. Est-ce qu’elle est la dernière signature nous rappelant la présence ancestrale des moines soldats ici même ?  Nous ne franchirons pas le pas en répondant par la négative.

La maison forte de Grange-lez-Pélucin n’était pas apparemment au départ un château. Ce site le deviendra au fil du temps. Avant d’en arriver aux différents propriétaires successifs, attardons nous sur une autre construction toujours en place et qui génère des questionnements.


Une des sorties, bouchée, de la galerie souterraine de La Valette

A environ 100 mètres de l’emplacement du château prend place une construction titanesque dont on n’arrive pas clairement à définir la raison d’être.

Certains parlent de caves, d’autres d’un souterrain, d’autres encore d’un site jadis religieux. Il n’est pas à exclure que ce soit encore une autre utilisation alors inconnue qu’il faille retenir.

Cette construction a traversé les siècles mais combien ? Elle possède des ouvertures, des fenêtrons ouverts plein sud. Ceci empêche de retenir que ce soit une cave traditionnelle car le soleil brûlant, en période estivale, l’aurait réchauffée.

Un souterrain, même si cette construction est en partie enterrée,  qui à priori ne mènerait nulle part, n’a pas à première vue un réel intérêt. Maintenant, il est vrai que ces voutes majestueuses qui la composent sur toute sa longueur pourraient rappeler une grande chapelle, mais ceci reste tout de même difficile à retenir.

Nous ne détenons aucune réelle certitude sur la raison d’être de cette construction longue de près de 60 mètres sur 10 m de large pour plus de 4 m de hauteur. En revanche, il y avait eu forcément une bonne raison pour se lancer dans une telle construction en parfait état de conservation encore aujourd’hui.

Pour être exhaustif sur les vestiges extérieurs au château encore debout ou presque, signalons les murs d’enceinte sur plusieurs kilomètres de ce qui était une réserve de chasse importante.

Ces murs très hauts, sont à mes yeux les plus beaux de la commune de Pélussin. Des pierres de 300 kilos au moins se retrouvent en hauteur et on ne peut être qu’admiratif face à ces constructions d’un autre temps.

Si l’on se rend sur place aujourd’hui pour comprendre le château de La Valette à proprement parler, eh bien sans explication cela devient impossible.

Plusieurs cartes postales anciennes du début du 20ème siècle commencent à définir un pourtour. Ce pourtour est toutefois clairement tracé par le cadastre napoléonien.



Ancienne tour du château de La Valette

On retient qu’à La Révolution le château de La Valette fut entièrement démantelé. Ceci reste bien erroné car une habitation actuelle constitue encore en réalité une partie intacte de ce château oublié.

On peut même écrire avec exactitude que les caves du château disparu sont encore visibles. Elles sont magnifiques sur leurs plafonds voutés même si le niveau du sol a été sérieusement remonté par de multiples inondations qui ont drainé de la terre en quantité.

Au commencement de l’histoire connue ou partiellement connue avec La Grange-lez-Pélucin, on connait les premières familles ayant occupé les lieux. Ceci n’indique nullement que c’étaient les toutes premières.

Il n’est pas rare de voir dans les livres que le site puisse avoir été occupé avant et de très longue date. Il était sur le chemin de Compostelle né au 12ème siècle et peut-être même une halte étape de celui-ci.

La Valette était juridiquement un arrière fief de Malleval et non de Virieu par exemple. Il y avait en plus de La Valette deux autres arrières fiefs avec notamment la seigneurie de Lupé et son château.


château de Lupé vue de l'extérieur

On retrouve dans les textes anciens quelques traces des seigneurs de Pélucin avec des mariages ou des traités et ce, dès 1200. A La Valette, lorsqu’ils y furent possessionnés définitivement en ayant abandonné leurs positions au Bourg de Pélussin (quartier Notre Dame), ce nom va vite disparaitre.

Par mariage, ce sont des Clavel qui vont leur succéder. Les de Pélucin et les Clavel restent les premiers seigneurs connus du site à l’époque de La Grange-lez-Pélucin.

Il faudra attendre l’arrivée d’un nouveau nom, toujours par mariage d’une demoiselle avec un autre patronyme masculin pour voir un changement de nom et ce sont les Rochefort dit de La Valette qui vont arriver.

C’est à partir de cette arrivée des Rochefort et au cours du 15ème siècle que Grange-lez-Pélucin va céder son nom au profit de celui de La Valette. De nombreux seigneurs Rochefort de La Valette vont se succéder jusqu’en 1617.

A cette date, c’est le nouveau mariage d’une demoiselle, ici en l’occurrence d’une Rochefort de La Valette qui va amener un nouveau patronyme celui de Fontanès de Cheme. Ces derniers vont régner ici même jusqu’en 1759 au travers de multiples seigneurs de ce nom-là.

A propos des Fontanès l’abbé Batia s’interroge à propos de leur blason qui rappelle à s’y méprendre celui des Jarez, Jarez dont le nom a disparu quelques trois siècles plus tôt. C’est là un questionnement intéressant car je l’ai signalé dans ce travail, les Jarez ont officiellement disparu par les mâles de manière bien surprenante.

Les Fontanès vont laisser la place par le nom au Pradier d’Agrain en 1759 mais cette fois en ne laissant pas d’héritier direct en l’occurrence pas d’enfants.

Les Pradier d’Agrain, des cousins éloignés des Fontanès, vont avoir le triste privilège de clôturer la longue histoire des seigneurs de La Valette, une fin précipitée par la Révolution française.

Le seigneur qui régnait à cette date de 1789 sera en fuite et échappera à la mort. Ces biens en revanche seront confisqués et vendus aux enchères.

Le château de La Valette qui était surnommé le Fontainebleau du Forez, ne trouvera pas preneur et ce sont des maçons de Véranne et Maclas qui vont l’acquérir comme carrière de pierres.

Il est parfaitement exact qu’une bonne partie du vieux colosse qui n’a jamais été fortifié à proprement parler malgré la présence de fossés, va disparaitre en termes de constructions.



Vue de loin là où était le château de La Valette

L’abbé Batia, à défaut de présenter un dessin ou encore une lithographie de ce beau château de plaisance, propose un descriptif complet de ce dernier dans son ouvrage référence « le Forez Viennois ».

On peut alors se laisser à rêver à l’imaginer en parcourant à travers les lignes besogneuses du religieux historien toutes les pièces du château démantelé. Quel dommage !

Aujourd’hui, il ne reste qu’une seule habitation pouvant se déclarer être un reste authentique du château. On doit quand même y ajouter une ferme attenante à cette propriété.

A travers ce dossier consacré à l’histoire des châteaux de Pélussin, je viens d’essayer de proposer une synthèse seulement car un livre ne suffirait pas à contenir tous les nombreux développements qui seraient nécessaires.

J’espère que vous avez apprécié ce voyage que j'ai pu vous proposer grâce à mes recherches personnelles, celles de Tonin Chavas et bien entendu celles de l'abbé Batia.



<Retour au sommaire du site>