AVRIL 2007 / SEPTIEME ÉTAPE
Nous abordons maintenant
un espace sacré : celui de la
zone des crêts, allant du Crêt de la Perdrix au Crêt
de l’Œillon. Suite de
sommets arrondis, désertiques, à la
végétation rabougrie, terre de légendes et
de croyances. J’ai longuement abordé ce thème dans le
chapitre intitulé
« le royal secret des six crêts » du tome I
de mon livre « La
Société Angélique » (voir en rubrique
Librairie). Et cela fera l’objet
d’un film, actuellement en cours de tournage : « le
Druide du
Pilat ». « Regards du Pilat » ne
manquera pas de vous en dire
plus dans les semaines qui vont suivre. Je m’attarderai donc seulement
aujourd’hui
sur une pierre peu connue, et sur un fait divers dont le souvenir
mérite d’être
rapporté.
Accès : pédestre
uniquement, par un
sentier en boucle au départ de la Jasserie. Monter en direction
du Crêt de la
Perdrix. Lorsqu’on arrive au col, dans le creux entre les crêts
de la Perdrix
et de l’Arnica, prendre à gauche en suivant les balises
« Crêt de la
Chèvre ». Inutile d’accéder à cette
colline, sous le Crêt de l’Arnica,
vers le chalet Bourguisan, prendre le sentier descendant qui serpente
dans la
forêt, puis à la fourche prendre le sentier de droite, qui
sort du bois rapidement
et passe devant la Borne des Trois Seigneurs. Poursuivre par le sentier
des
crêtes. Au col, entre les crêts du Rachat et de Botte,
descendre à gauche. Le
sentier oblique à l’ouest après un lacet et ramène
tranquillement à la Jasserie
en passant devant les deux stèles de la catastrophe
aérienne de 1944. Compter
une demi-journée pour le parcourir tranquillement.
Aucun des auteurs anciens qui ont
parcouru le Pilat à la recherche de ses pierres
mystérieuses n’a signalé la
présence de la « Borne des Trois
Seigneurs », toute proche du col qui
sépare le Crêt de l’Arnica du Crêt de
l’Étançon. En particulier, F. Gabut qui
dit avoir arpenté toute la lande de la zone des crêtes ne
l’a pas remarquée.
C’est l’association « Visage de notre Pilat » qui
l’a trouvée ou
plutôt « retrouvée » en 1994, en se
référant à ce qu’en disaient les
anciens. Depuis, le Parc Naturel Régional du Pilat a
facilité son accès, grâce
à un nouveau sentier balisé qui passe juste devant.
C’est une pierre taillée, de forme
cylindrique, haute de 70 cm pour un diamètre de 30 cm environ.
Elle était
plantée verticalement (mais a légèrement
basculé depuis) entre plusieurs
pierres plates qui parsèment la lande. La partie
supérieure plate du cylindre
est ornée d’une gravure très nette en forme de chevron ou
d’équerre (selon
l’angle de vision). La plus grosse pierre plate est également
ornée d’une
gravure, de facture plus grossière, ressemblant à une
croix de Lorraine, ou à
une croix grecque soulignée d’un trait, ou encore à un T
barré (toujours en
fonction de l’angle de vision). On y remarque également d’autres
« gravures »,
peut-être d’origine naturelle : une longue rigole et
quelques petites
alvéoles qu’il est délicat de qualifier de cupules. Cette
dalle longtemps
laissée « à plat » a aujourd’hui
retrouvé la station debout qu’elle
devait avoir jadis, ce qui laisse penser qu’il y eut en fait deux
marques de
limites au même endroit : la pierre et la borne, datant sans
doute de deux
époques différentes.
Selon la tradition, cette pierre
servait de frontière entre les trois seigneurs de
Rochetaillée, de Malleval et
d’Argental, croyance surprenante à priori dans la mesure
où d’autres seigneurs
possédaient des fiefs beaucoup plus proches, comme Doizieu,
Virieu, ou le Toil.
Le temps aurait-il déformé la tradition d’origine ?
On peut avancer que
cette pierre servit de limite commune à trois territoires
apparaissant sur les
cartulaires à partir du Xe siècle :
« Ager Jarensis », ou Jarez, qui dépendait du comté de
Lyon ; « Ager Masclaticensis », dont la capitale était
Maclas ; et « Ager
Annonaicensis », dont la capitale
était
Annonay, ces deux derniers dépendant du comté de Vienne.
À la réflexion,
Rochetaillée, Malleval et Argental constituaient bien chacun
l’une des
principales places fortes de ces territoires. La pierre dut aussi
servir de
frontière entre le Lyonnais et le Viennois, puis en 1173 entre
le Forez et le
Viennois. En 1296 cette partie du Viennois fut annexée au Forez
et la pierre
perdit toute utilité.
La borne cylindrique
paraît plus récente. Il s’agit plus
vraisemblablement d’une limite de propriété, semblable
à celles qu’on voit en
divers endroits dans les bois autour de Doizieu.
Descendons un peu sur la
face nord de la montagne. Ce
« côté obscur » du Pilat, ce
« pays du froid et de
l’épouvante », fut le décor d’un tragique
accident d’aviation, le 1er
novembre 1944. En ce jour de la Toussaint, un avion américain
Dakota en mission
sanitaire tentait de rallier Montélimar au départ de
Luxeuil. À son bord cinq
membres d’équipage, quinze soldats blessés, des
américains et quelques
prisonniers allemands, et une infirmière militaire
américaine. Le temps était
brumeux, le plafond bas. En début d’après-midi, l’avion
percutait le massif du
Pilat, en contrebas du Crêt de Botte sur la commune de Doizieu,
et prenait feu
immédiatement. Les premiers secours venus du village mirent
plusieurs heures
pour arriver sur place en raison du terrain escarpé, et ils ne
purent que
constater l’absence de survivants.
À
la
mémoire
des
cinq
membres d’équipage du Dakota américain
et
des
quinze soldats blessés alliés et Allemands
qui
ont
trouvé la mort lors du crash du 1er novembre 1944.
Sous
la
responsabilité de l’infirmière
Lieutenant
Aleda E. Lutz D.F.C.
qui
fut la
première militaire américaine tombée en
opération
PROCHAINE
ETAPE :
DE LA CHAUX D'EGALLET A LA CROIX DE MONTVIEUX,
EN PASSANT PAR LE GRAND HOTEL DU MONT PILAT
<Imprimer la page> <Retour au Sommaire du Site> <Haut de page>