Un Coin Sympa







Présenté par
Patrick Berlier








Avril
2015


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Entre DORLAY ET VALENCIZE



Après avoir, lors d’un précédent « coin sympa », parcouru les vieux chemins autour de la Barollière, nous poursuivons aujourd’hui notre balade sur la voie antique qui franchissait le Pilat par la Croix de Montvieux.

 

La vallée du Dorlay

 

Il faut quitter la D 7, au niveau de Saint-Paul-en-Jarez, pour descendre à gauche au creux de la verdoyante vallée du Dorlay. C’est un nom qui vient d’un hydronyme préceltique dor, très répandu. La balade agréable permet de découvrir les vestiges industriels de cette combe jadis bourdonnante d’activités : moulins, scieries, passementeries, moulinages, fabriques de crayons de couleurs, toutes ces usines étaient animées par la force motrice de la rivière. Un chemin de fer départemental, « le Rapide » pour les cartes postales anciennes, « la Galoche » dans la mémoire collective, venant de la Grand-Croix et se dirigeant sur Pélussin, parcourait cette vallée, s’arrêtant à chaque usine. À la Terrasse-sur-Dorlay, le train suivait un mouvement pendulaire : venu dans un sens, il repartait en sens inverse. Pour cela une manœuvre particulière était nécessaire. La locomotive était détachée, tandis qu’une seconde locomotive, qui attendait déjà plus haut sur la voie, venait se mettre en queue de convoi pour le tracter en direction de Pélussin.

 

Arrivée particulièrement animée du « Rapide » à la Terrasse-sur-Dorlay. Remarquer la locomotive sous pression, attendant sur la voie du haut

pour venir tirer le train en direction de Pélussin

 

La Galoche n’est plus qu’un souvenir, ses arrêts sont envahis de verdure, son ballast est devenu un sentier de randonnée. Les usines sont aujourd’hui silencieuses, hormis celle qui tissait des tresses et lacets et qui est devenue un musée vivant, à visiter absolument. C’est au Moulin Payre que le chemin goudronné, descendant de la départementale 7 entre Saint-Paul et la Terrasse, franchit le Dorlay sur un vieux pont qui dut être romain.

 

Le Dorlay au niveau du Moulin Payre

 

À côté du pont on remarque une minuscule chapelle, à l’intérieur d’une propriété privée. C’est un oratoire particulier non dépourvu de charme naïf. Une façade en pierres de schiste du pays, des parements plus clairs en grès houiller, d’autres en briques. Un joli fronton semi circulaire, surligné d’une rangée de génoises. Le temps semble s’être arrêté.

 

La chapelle du Moulin Payre

 

Le linteau porte la date de sa construction : 1814. Il est orné de deux figures rondes, le soleil et la lune sans doute, entourent une petite croix centrale. Réminiscence de cultes païens ? Non, le soleil et la lune sont des symboles bien chrétiens, même s’ils sont un peu oubliés aujourd’hui, et surprennent donc en façade de cette chapelle. Ils sont un signe de pérennité : de même que le soleil et la lune reviennent toujours, l’œuvre du Christ sur la croix vaudra pour l’éternité. Ils sont aussi les lumières chassant les ténèbres des péchés.

 

Détail du linteau de porte

 

 

VERS LA CROIX DE MONTVIEUX

 

Quelques pas plus loin voici l’amorce du vieux chemin, à gauche de la tranchée où passait la « Galoche », le petit train assurant vaillamment le service entre la vallée du Gier et Pélussin. Ce vieux chemin est le vestige de la voie romaine qui coupait donc la voie de la Galoche, à moins que ce ne fût l’inverse. Il monte tout droit, grimpant vaillamment sur le coteau, et se dirige vers le Crêt Marcoux, qu’il contourne par la gauche pour atteindre la Croix du Pendu. Une humble croix, qui remplaça peut-être une borne milliaire, et qui doit s’élever à l’emplacement des « fourches patibulaires », ces gibets placés aux limites de la juridiction d’un seigneur, et destinés à prévenir les passant qu’ici on ne plaisantait pas avec la justice. La se trouvait sans doute la frontière entre les seigneuries de Doizieu et de Saint-Paul. C’était aussi un petit carrefour de voies romaines, là notre route croisait la voie venant de Sainte-Croix-en-Jarez par la Croix du Mazet et They.

 

Notre voie antique se poursuit de l’autre côté de la D 62. Elle grimpe à travers le Bois de They, longeant de vieilles cabanes en pierres sèches, connues des mycologues, c’est autour d’elles que l’on trouverait les plus beaux cèpes du Pilat… Mais faut-il croire les ramasseurs de champignons ? Qu’importe, nous voici au col de la Croix de Montvieux.

 

Le col de la Croix de Montvieux (carte postale ancienne)

 

Deux anciennes fermes, une de chaque côté de la route, sont aujourd’hui reconverties en auberges. Il y a aussi tout près le gîte rural « chez la Marie » qui peut vous accueillir « seul ou à plusieurs, pour en profiter sans retenue », dit la publicité. Allons ! La formule n’est ambiguë que si vous avez l’esprit mal tourné !

 

Au Moyen-Âge il y avait ici une « infirmerie », entendez par là un lieu où l’on soignait les infirmes, ce qui prouve que la route devait être fréquentée. Pendant longtemps le nom « Lafermerie » (L’infirmerie) est resté attaché au site, puis on a fini par l’oublier lui aussi, on ne le trouve plus que dans de vieux documents, des terriers ou des pouillés, pour parler savamment. Méfiez-vous des « faux amis », Montvieux n’est pas un « vieux mont » ; ce nom se disait jadis Montis Violeti, ce qui signifie « le violet de la montagne », un violet n’étant pas autre chose qu’une route, c’est un mot qui vient du latin via. Quant à la croix, elle est aujourd’hui en bois, sur un socle en pierre, l’ancienne croix de pierre ayant disparu depuis longtemps.

 

La croix actuelle

 

Passez par la Croix de Montvieux, à vélo ou en voiture : vous montez pour y arriver, vous descendez ensuite, quel que soit le sens dans lequel vous empruntez la route. Vous êtes alors à 811 m d’altitude, d’un côté vous avez le Crêt de Montivert à 954 m, de l’autre le Crêt de Neufond à 1041 m, crêt nommé improprement Chirat-Rochat sur les cartes. En conséquence il est clair qu’il s’agit d’un col. Pourtant ni sur la carte, ni sur le terrain, n’apparaît la mention « col », allez donc comprendre…

 

Pour suivre l’ancienne voie romaine en direction de Pélussin, il suffit de descendre à droite sitôt le col franchi. On retrouve alors le vieux chemin, bien qu’il ne soit pas porté sur la carte, étant trop près sans doute de la route, qu’il longe en parallèle à quelques mètres en contrebas.

 

Le vieux chemin, sous la Croix de Montvieux

 

Il s’en écarte ensuite, passant par le hameau du Bouchet, un groupe compact de fermes hors du temps, pour couper la départementale, un peu en dessous du virage en épingle à cheveux.

 

Le hameau du Bouchet

 

Faisons un petit aller-retour jusqu’à ce virage, histoire de nous souvenir des trois pilotes militaires, le lieutenant-colonel Robert Bataille, le lieutenant Jean-Christophe Hugou, l’aspirant Michel Eguia, de la 30e escadre de chasse de Reims, qui perdirent la vie lors du crash de leurs trois Mirage F1, juste un peu plus haut, le 20 mai 1987. Un petit monument commémore leur souvenir.

 

Le « Monument des Aviateurs » près de la Croix de Montvieux

 

 

EN DESCENDANT SUR LA VALENCIZE

 

L’ancienne voie romaine se dirige alors sur le hameau de l’Ortil, un nom qui signifie « jardin » en vieux dialecte mâtiné de celtique et de provençal, puis elle se perd dans la nature. Elle devait sans doute passer par l’Olagnière, plantation d’olagnes (noisettes, en patois) ou domaine d’une famille Olagnier, ce qui revient au même (olagnier = cultivateur d’olagnes). Mais il est sûr qu’elle devait franchir la Valencize, nom pittoresque d’une « vallée sciée », un peu avant le hameau des Thurettes, où on en retrouve le tracé très net.

 

La première cascade de la Valencize, près du Moulin

 

Enfin, par la Métrarie et la Bonnetarie, elle rejoignait Pélussin. Ces deux hameaux conservent de belles maisons traditionnelles, parfaitement restaurées.

 

Une belle maison à l’architecture traditionnelle du Pélussinois,

au hameau de la Bonnetarie

 





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