REGARDS DU PILAT
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Novembre 2004 : "L'Eglise à la Révolution"
    Ce sujet nécessite d'élargir à l'échelle du territoire français, le contexte exceptionnel de l'époque. La Révolution française restera pour tous, l'un des événements majeurs de l'Histoire de notre pays.  Les motivations de ce soulèvement, qui a entraîné de profonds bouleversements sociologiques, souvent seulement symbolisées par la prise de la bastille du 14 juillet 1789, sont plurielles. On évoque trop facilement le seul ras le bol du peuple, miséreux et crevant de faim. Ce constat, parfaitement exact, masque les vraies raisons de ce passage à l'acte. L'Eglise était la première visée, ensuite seulement, la monarchie est devenue "l'ennemi" des révolutionnaires. Précisément après que le roi, Louis XVI, ait apporté son soutien aux représentants de la religion catholique. Les vrais instigateurs de la Révolution ne sont pas les petites gens, comme parfois on voudrait, naïvement, nous le faire croire. Ces individus ont été utilisés par une bourgeoisie zélée, qui dans un deuxième temps, ne les a plus forcément contrôlés comme elle l'aurait souhaité. Avide de reconnaissance, mais surtout de pouvoir, la bourgeoisie a mis grossièrement en avant des caricatures de la société d'alors. L'Eglise en France, jusqu'au quatorzième siècle est le premier pouvoir politique ; puis jusqu'au dix huitième siècle, elle est restée le principal "bras droit" de la monarchie, souvent son complice qui fermait les yeux sur des agissements répréhensibles. Au nom de la Justice et "planifiée" par la bourgeoisie, la Révolution française a provoqué de grands malentendus et paradoxalement d'ignobles Injustices !
    En 1789, la France compte 400 000 nobles, 115 000 ecclésiastiques pour 25 500 000 gens du peuple, retenus sous l'appellation "Tiers Etat". Parmi cette dernière catégorie, sous considérée et mis à l'écart du pouvoir par les deux premières citées, prend place la bourgeoisie. Il est sûrement légitime de combattre les pouvoirs absolus des aristocrates. Mais les Bourgeois ont de la suite dans les idées, le dix neuvième siècle révélera en quelque sorte le fond de leur pensée ! Les exagérations iront dans un nouveau sens ; dans la direction et l'intérêt unique de cette bourgeoisie, nouvelle classe dirigeante et exploitante, au pouvoir écrasant, pourvoyeur d'une misère largement comparable à celle que la noblesse a engendrée déjà un siècle plus tôt ! En 1789, c'est un choix de civilisation qui est en cause. "Dieu", jusqu'alors, est le métronome qui permet de réguler beaucoup d'illogisme, notamment une soumission anormale du peuple, relégué à une condition misérable. On pense exclusivement par Dieu, pour tout et n'importe quoi. Les populations sont de ce point de vue là, complètement asservies. Les règles sont claires, ce qui est proclamé par la sainte Eglise est incontestable, l'aristocratie étant le fidèle "partenaire" de cette idéologie qui avant tout la sert. On est bien loin des messages véhiculés dans les messes ou dans la bible et les évangiles. Les premiers signes avant coureurs, en tout cas les références spirituelles de la Révolution, ont trouvé leur terreau idéologique dans les écrits de Jean-Jacques Rousseau et Voltaire. On parle du siècle des Lumières. Leur combat d'idées, qui gagne progressivement l'ensemble de la population, y compris une partie de la noblesse et du clergé, tourne autour de l'Egalité et de la Liberté. 
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    Les religieux sont divisés en deux clans bien distincts, finalement opposés. Le Haut clergé, où prennent place les Archevêques et les Evêques, domine le Bas clergé qui comprend lui, les congrégations religieuses, les curés et les vicaires. Les premiers cités sont généralement issus de la noblesse ; le Bas clergé lui, est essentiellement composé de personnes du Tiers Etat. Les dirigeants des congrégations religieuses font un peu exception en venant aussi de la noblesse. Cet ensemble, permet un parfait "contrôle" par la monarchie, puisque le Haut clergé est totalement dévoué aux intérêts de celle-ci. Le Bas clergé, défend les plus pauvres, accueille les sans abri... est en fait en adéquation avec les messages et buts premiers de la religion chrétienne. Ses représentants sont pourtant des victimes, bien injustes de la Révolution, des boucs émissaires faciles désignés comme symbole par les révolutionnaires. Ce point précis est une aberration de la Révolution, généralisée sur tout le territoire français.Chronologiquement, le 2 novembre 1789, on confisque d'abord les biens ecclésiastiques en les mettant à la disposition de la nation. L'Etat s'engage à prendre en charge les frais de culte, l'entretien des Ministères, des Eglises... Le 14 juillet 1790, les catholiques participent à la grande fête révolutionnaire, car malgré les bouleversements provoqués par la décision de novembre 1789, le socle spirituel de l'Église n'est pas, à première vue, remis en cause. Mais le 24 août 1790, est mis en place la "constitution civile du clergé". Louis XVI, parle pour l'occasion de "l'oeuvre des ténèbres" ! A partir de là, les Evêques, comme les curés ,sont élus par le corps électoral qui a désigné les députés des Etats généraux. Ce changement est fondamental, car dorénavant le Pape, ne peut avoir son mot à dire. Il est depuis toujours le Décideur, tout au moins l'Elu qui officiellement "nommait". Mais la Révolution va aller plus loin, le 27 novembre 1790, un décret oblige, sous peine de révocation, tous les religieux à prêter serment à la Constitution Civile du clergé. Le Pape ne prend pas position. Dès lors, certains prêtent serment, on les appelle les assermentés ou les constitutionnels. D'autres, en revanche, entrent en opposition, conscients du but inavoué : faire disparaître à terme la religion catholique du sol de France. Cette deuxième catégorie est appelée les insermentés ou réfractaires. Il a fallu attendre le 11 mars 1791 et le 13 avril de cette même année pour voir le Pape Pie VI, condamner en bloc cette constitution, qui est une supercherie d'un point de vue religieux.
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    La Révolution française prit une tournure que sans doute personne n'avait imaginé. Passées les années du bien être "libérateur", ressenti suite à 1789, on s'engagea progressivement vers ce que l'Histoire a retenu sous le nom de Terreur. Les prêtres réfractaires furent quand même tolérés un certain temps, grâce au soutien de nombreuses municipalités et bien sûr d'un nombre très important de citoyens. Mais un décret du 27 mai 1792  les rendit passibles de déportation en Guyane, s'ils ne renonçaient pas à poursuivre dans la voix qu'ils avaient choisie. Malgré cet article de loi, peu de changements virent le jour. Les révolutionnaires, s'ils voulaient atteindre leur but, durent progresser en douceur et surtout pas agir de manière impopulaire. Car ces derniers étaient lucides et voyaient bien que les religieux, notamment en campagne, étaient soutenus et épaulés par une bonne partie de la population qui se reposait toujours sur eux, aussi bien pour les baptêmes que pour les enterrements. On note à ce sujet, des querelles entre les religieux réfractaires et les constitutionnels. Ces derniers se plaignaient régulièrement au Directoire que les premiers cités leur faisaient de l'ombre, pire qu'ils étaient souvent reconnus comme les vrais religieux par les citoyens.... Le 21 octobre 1793, un changement de cap se produisit, un nouveau décret confirma une déportation systématique des prêtres qui ne portaient toujours pas serment, qui fut renforcé par un nouveau calendrier dit "républicain", dans lequel on supprima tous les Saints, qui furent remplacés par des noms de fruits, de fleurs... On passa alors de douze mois à dix. Les religieux, récalcitrants furent moins nombreux qu'auparavant, mais leurs protecteurs furent déterminés. Ces derniers risquèrent leur vie à partir du 11 avril 1794, où la peine de mort fut prononcée pour toute personne qui cachait un Ministre de Dieu. On alla même jusqu'à créer une nouvelle religion, par l'intermédiaire du "tyran' Robespierre : le Culte de la raison et de l'Etre Suprême. Le calendrier, comme cette religion de circonstance, improvisée par un sanguinaire, furent deux échecs. Jamais le peuple n'y adhéra, ni de loin, ni de près. Mais, les prêtres à ses périodes de troubles caractérisés, furent recherchés activement, nombreux périrent sous l'action et la folie d'hommes peu scrupuleux qui ne savaient même plus pourquoi ils se battaient, mais en tout cas plus pour un idéal légitime. Notre belle région du Pilat ne fut pas épargnée par ces stupidités massivement meurtrières contre les représentants de l'Eglise catholique, particulièrement pour le Bas clergé. Ceux qui avaient prêté serment, ont remis à terme leurs lettres de prêtrises, à la demande empressée des révolutionnaires qui en demandaient toujours plus contre cette Eglise qu'ils voulaient supprimer. Pour prouver leurs nouveaux engagements envers la société, des prêtres se mariaient. La Terreur battit son plein jusqu'au milieu de 1795. L'apaisement qui s'en suivit n'anéantit pas toutes ces persécutions, elles s'étalèrent encore pendant des années. Le Concordat proclamé en juillet 1801 fut vraiment la fin du calvaire pour les catholiques. Ces douze années ont profondément marqué l'Eglise qui jamais après ne retrouva son rayonnement d'avant 1789. Aucun village du Pilat ne fut indemne de ces troubles sur fond religieux. Les religieux étaient divisés dans la même commune. On pouvait voir le curé réfractaire et le vicaire assermenté, ou vice versa. Le Pilat était réputé être une bonne cache naturelle par ses nombreuses forêts, mais les populations ont aussi joué un grand rôle de "résistance" pour souvent protéger de leur mieux les représentants de l'Eglise, qui coûte que coûte ont bravé les interdits pour exercer leur mission. On peut vraiment parler de foi concernant ces courageux. 
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    Les populations du Pilat, plus particulièrement du canton de Pélussin, n'ont jamais été euphoriques et pro révolutionnaires. Les valeurs de ces dernières, sont restées plutôt conservatrices et fidèles au roi de France, en ces périodes insurrectionnelles. Bien sûr, chaque village avait ses adeptes du "progrès" qui portait l'Egalité et la Liberté. Sûrement sincères pour certains, d'autres n'étaient néanmoins que des aigris, qui ont dénoncé et "chassé" gratuitement, parfois avec acharnement des religieux insermentés. Sans parti pris sur les bienfaits de la Révolution, sans parti pris non plus sur le fait d'être croyant ou non, il est une évidence, c'est qu'ici en Pilat, comme partout en France, des victimes bien innocentes de la Révolution, provenaient du clergé et de ses dévoués religieux. On porte trop souvent en triomphe, la mémoire des Révolutionnaires, notamment celles de ceux qui sont morts pour cette cause, il est au moins aussi important de se souvenir de ceux qui ont perdu leur tête, ou qui sont parfois morts dans des conditions bien pire encore et qui n'étaient pourtant que de simples et modestes religieux, qui n'avaient rien demandé à personne. Sûrement que la Révolution a apporté du positif dans la société d'aujourd'hui, bien que là encore il faudrait remettre certaines pendules à l'heure, mais ce n'est pas le sujet du moment.



C'est curieusement à la Révolution que nous devons de pouvoir encore aujourd'hui observer cette ancienne Chartreuse

    A présent nous allons vous énumérer, grâce au rigoureux travail d'Odile Faivre, des cas concrets, subits par des religieux, sans ordre chronologique. D'Hieres, premier vicaire de Pélussin, revenant de voir un malade, fut roué de coups par une bande de révolutionnaires et laissé pour mort. Il se réfugia durablement au quartier de Virieu, toujours à Pélussin, croyant y être en sécurité. Il continua à célébrer secrètement. Découvert par ses ennemis, il fut lié et traîné jusqu'à Chavanay. En chemin, ils n'osèrent aller plus loin et l'abandonnèrent en lui demandant pardon. Le 26 août 1792, il passa en Suisse au moment où une ordonnance prévoyant la déportation des prêtres non assermentés fut proclamée. Certains prêtres insermentés, décidèrent de s'exiler officiellement pour éviter la déportation en Guyane. Tel est le cas du curé Oriol de Lupé, qui s'exila en Savoie. Ses biens auraient dû être respectés. Ils n'en furent pas moins mis sous séquestre et vendus. Le 31 décembre 1793, le curé Mousset, de Pélussin, qui se cachait dans les villages alentours, tomba entre les mains des gendarmes. Il eut beaucoup de chance et retrouva la liberté. Après que la population l'a secouru, il avait quand même été emmené par des gendarmes rusés, qui avaient fait courir le bruit sur un faux itinéraire qu'ils allaient emprunter pour le conduire à Lyon, d'où plus tard il fut libéré. Toujours en 1793, le curé Barjon, de Pélussin, accompagné de quelques autres personnes furent descendus en direction de Chavanay en attendant d'être transféré dans les prisons de Lyon. Avant d'arriver à Chavanay, des habitants de Pélussin se portèrent au secours des prisonniers. Ils sommèrent et forcèrent les agents du gouvernements à laisser la liberté aux captifs, sous peine de mort. Ils furent libérés. Jean Antoine Mathivet, ancien curé de Maclas, malade et alors âgé de 67 ans fut accusé de fanatiser les habitants et d'abuser de la confiance qu'il s'était acquise. Le malheureux prêtre fut condamné à mort le 28 janvier 1794. Louis Honoré Bertrandy, curé de La Chapelle Villars, fut condamné à mort en novembre 1793. Mathieu Etienne Camyer, curé de Malleval, fut arrêté en 1794 et emprisonné dans un couvent. Le 2 août de cette même année, il fut condamné à la réclusion perpétuelle. La commune de Chuyer fut un point central où les prêtres se réfugiaient et trouvaient des asiles sûrs. On peut citer le curé Borel de Saint Michel sur Rhône, le curé Pose de Tarentaise, l'aumônier Caldagel de Condrieu et futur curé de Chuyer. L'abbé Brut qui était vicaire de Condrieu, se cachait aussi bien à Chuyer, qu'à St Michel sur Rhône, à Poncin exactement. Un jour, il dut même fuir après une messe clandestine, sans avoir eu le temps d'enlever sa soutane. A Trèves, Jourdan vicaire, exerça ses fonctions clandestinement dans des maisons. Suite à une arrestation, dont le vicaire fut la victime, une partie de la population a forcé la garde nationale à laisser s'évader les prisonniers. Notons qu’à toutes ces époques de troubles, des prêtres des environs de Trèves, qui n’avaient pas prêté serment se réfugiaient au hameau du Garon. Un caveau de moins de 2m², creusé dans la roche servait de protection aux religieux. C’était toujours mieux que de perdre sa tête !
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    Il est également intéressant de s'attarder quelque peu sur des exemples concrets là aussi, de prêtres constitutionnels, au durcissement des lois et notamment de celle intimant l'ordre de remettre ses lettres de prêtrise, pour échapper à la peine de mort. On se rend compte que si les insermentés était résolus dans la plupart des cas à poursuivre leur mission au péril de leur vie ; les constitutionnels, non sans un jeu de mot, ne se sont pas fait prier pour vite oublier qu'ils étaient des religieux ! Le 6 janvier 1794, Antoine Chorel, curé de Bessey, écrivit au District, qu'il donnait sa démission avec plaisir et assura qu'il faisait cette démarche d'un grand coeur. Jean Louis Catelan, curé de Lupé, remit ses lettres de prêtrise à sa municipalité. Claude Dupuis, curé de Maclas, rendit ses lettres de prêtrise et reçut même un certificat de civisme pour son comportement particulièrement zélé et de circonstance pour la Révolution. Louis Drivet, curé de Pélussin remit ses lettres de prêtrise et renonça à toutes les fonctions liées au Ministère qu'il occupait. Louis Ginet, curé de Malleval, rendit ses lettres de prêtrise et insista sur le fait qu'il avait bien fait publier son mariage, car précédemment, il avait été écroué à Saint Etienne. Il expliqua qu'il n'avait pas eu connaissance des exigences lui demandant de renoncer à ses engagements, mais dès qu'il l'a su il s'y est conformé ! Le curé André Tavernier, curé de Roisey, a porté lui même ses lettres de prêtrise au district le 17 janvier 1794. Il précisa qu'il y renonçait pour toujours, qu'il devint un citoyen ordinaire et en preuve il ajouta qu'il se mariait. Jean Pierre Thomas, curé de Véranne, envoya sa lettre de démission en précisant qu'il quittait sa cure sans regret. Claude Fronton, curé de Chavanay, abdiqua lui aussi et précisa officiellement qu'il voulait devenir agriculteur. Jean Anet Combe, curé de Saint Michel sur Rhône obtint un certificat de civisme. Il insista sur le fait qu'il s'était toujours conduit en bon citoyen depuis la Révolution, qu'il a manifesté dans toutes les occasions son attachement aux principes éternels de liberté et d'égalité. Difficile de connaître les raisons profondes de ses comportements. La peur engendrée par la Terreur y est sûrement pour beaucoup, certains sont peut-être de vrais convaincus des bienfaits de la Révolution ! Le courage n'était pas forcément la qualité première de ses ex-religieux. Aurions-nous mieux résisté qu'eux : c'est loin d'être sûr ! 
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    La Révolution a en partie réussi et en partie échoué dans sa mission de supprimer l'Eglise catholique. Echoué, car les insermentés, rejoints par la hiérarchie du Haut clergé, ont fait preuve d'une vrai résistance, de ce fait au final, ce combat reste une victoire. En revanche, la Révolution a porté un coup fatal à longue échéance à cette même religion catholique, sur une pente descente depuis cette date. Lentement, mais sûrement, le poids de l'Eglise catholique est de moins en moins important dans le quotidien de tout un chacun. Ce n'est plus qu'un modeste repère spirituel aujourd'hui, par le fait qu'un nombre de moins en moins important de personnes y puise des modèles.
    A présent nous allons retrouver notre invité, le prêtre actuel de la commune de Pélussin, responsable de la paroisse nouvelle : le Père Mougin
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  Passionné d'Histoire, le Père Mougin a toujours oeuvré au service de nécessités urgentes. Il y a déjà plusieurs décennies, il s'est notamment investi dans la restauration de l'ancienne Chartreuse de Sainte-Croix-en-Jarez. Il fut l'un des membres fondateurs de la société de sauvegarde de ce Monument. Il s'est toute sa vie voué dans une grande modestie, au service des personnes qui en avaient le plus besoin. Certains penseront, que c'est le rôle d'un religieux. Oui, sûrement, mais la conviction de l'engagement du Père Mougin est vraiment une référence. Féru du passé, il s'intéresse naturellement et machinalement à la Recherche. L'Eglise est tellement omniprésente depuis deux mille ans, dans presque tout événement, que c'est une richesse que d'avoir le point de vue, souvent très complémentaire, du Père Mougin. Originaire du Jura, il a plusieurs fois changé de région pour les besoins de sa mission au service de l'Eglise. Toujours recommencer, est un devoir pour lui, mais c'est aussi un plaisir de connaître à chaque fois des personnes nouvelles, avec lesquelles il peut échanger. "L'échange", c'est tout un symbole dans la vision de la vie par ce prêtre. A l'écoute des autres et d'une franchise touchante, que l'on soit croyant ou pas, on ne peut qu'être sensibilisé par cet homme qui est un vrai représentant de l'humanisme.
    Questionnaire réalisé auprès du Père Mougin, en charge de la Paroisse Nouvelle Sainte Marie entre Rhône et Pilat(1), qui a chaleuresement bien voulu nous accorder un peu de son temps...

R.D.Pilat: Mon Père, de quand date votre grande passion pour l’Histoire ? 

Père Mougin : Aussi longtemps que je me souvienne, j'ai toujours apprécié l'Histoire. Partout où j’ai exercé, je me suis toujours, presque naturellement, intéressé à l’histoire locale et aux différentes anecdotes historiques que me proposait la région concernée. Je peux vous citer pour exemple mon profond attachement à la Chartreuse de Sainte-Croix-en-Jarez où je me suis longuement investi dans la sauvegarde de ce patrimoine unique, lorsque j’étais prêtre à Rive-de-Gier. 

R.D.Pilat : Justement, en lien avec cet ancien monastère, concernant précisément ses multiples transformations et travaux de rénovation, la Révolution et ses conséquences sont-elles seules responsables à vos yeux du mauvais entretien marqué qui a failli provoquer un délabrement irréversible de ce superbe monument il y a de cela quelques décennies ? 

Père Mougin : A la Révolution, la Chartreuse de Sainte-Croix aurait pu devenir une carrière de pierres, comme ce fut le cas pour bon nombre de gros bâtiments de ce type. Par bonheur pour les générations futures, il fut décidé de vendre en partageant en petits lots à des particuliers, permettant ainsi de ne pas voir disparaître cette oeuvre architecturale. Je peux vous préciser que si la Révolution n’avait pas éclaté, l’ancienne Chartreuse que nous pouvons visiter aujourd’hui ne serait plus visible, car un projet des Chartreux eux-mêmes prévoyait de raser et reconstruire à cette même époque une autre Chartreuse moderne ! Vous voyez donc que ce patrimoine, pour la petite histoire, était déjà menacé. Mais plus concrètement il est vrai que dans les années soixante, un bien triste constat se dressait à Sainte-Croix. Le monument était en grand péril. Faute de moyens financiers, et il en fallait d’importants, il était menacé dans plusieurs de ses parties de disparaître. C’est sûrement une conséquence lointaine et indirecte de la Révolution bien sûr, car en 1789 l’Etat s’était engagé à prendre en charge ce genre d’entretien. L’histoire a montré que l’action dynamique et déterminé de bénévoles est bien souvent le vrai rempart à la décadence matérielle de bâtiments du patrimoine.

R.D.Pilat : A ce sujet vous êtes là encore, aujourd’hui, un maillon important dans une association plutôt récente de sauvegarde, visant l’intérieur des Eglises de Pélussin, à savoir Rénov’Eglises (2), qu’en est-il ?

Père Mougin : Un peu dans la même logique que pour la Chartreuse de Sainte-Croix, on s’aperçoit que de nombreux biens religieux, l’intérieur des églises principalement, sont menacés à leur tour de connaître de graves abîmes. Je suis heureux du très grand élan de générosité rencontré ici à Pélussin pour sauver durablement ces héritages du passé.

R.D.Pilat : Mon Père, nous vous remercions de votre gentillesse en ayant répondu à ces quelques questions.


Peinture de la voûte du choeur de l'église Notre-Dame à Pélussin


(1) la paroisse nouvelle permet de mieux coordonner l'activité religieuse, dans l'ensemble des communes du canton de Pélussin, ceci autour d'un acteur principal le Père Mougin, entouré d'une équipe structurée et organisée, ceci dans chaque village. Cet ensemble contribue à palier efficacement les insuffisances de notre société, au vu par exemple d'une manque de candidats à la prêtrise. 

(2) Rénov’Eglises : Cette association comprend environ une centaine de personnes, d'horizons très variés ; leur volonté est de remettre en état l'intérieur des deux églises de Pélussin, afin de sauver ce patrimoine culturel. Ces édifices n'ont fait l'objet d'aucune réparation intérieure depuis leur construction (à savoir 1840 pour l'église Saint-Jean et 1831 pour l'église Notre-Dame). Pour rejoindre ce groupe dynamique n'hésitez pas à contacter le Père Mougin à la cure de Pélussin. 



Intérieur de l'église Saint Jean de Pélussin

 En Mars prochain, dossier réalisé par notre ami l'écrivain Patrick Berlier, qui s'intitulera :
Les Templiers et le Pilat

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