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DOSSIER


NOVEMBRE 2017








Par Notre Amie

Martine MAZOYER



LES CAMIERS

Au Moyen Age, une partie du Vivarais, lui-même dépendant des Etats du Languedoc, fait partie du Comté de Vienne. En 1296, le Viennois est rattaché au Forez par le mariage de Jean Ier de Forez avec Alix de Vienne qui apporte en dot, entre autres, Malleval qui devient alors le centre du Viennois d’outre-Rhöne. Son mandement, (ce qui est sous son pouvoir), s’étend sur Bœuf, Lupé, Maclas, Saint-Appolinard, Véranne, Roisey et Bessey. Seule la paroisse de Saint Appolinard garde deux tiers de son territoire en Vivarais et un tiers en Forez. Le territoire rentre dans le royaume de France en 1312, le Lyonnais étant rattaché au royaume de France. Le bailliage sera transféré à Bourg Argental en 1481. C’est dans ce contexte qu’on trouve les premiers écrits relatifs au domaine des Camiers dont l’existence est antérieure.

14ème siècle - Le mas des pèlerins - in masso pelerino, près de la route de Gorgia versus Anicium

Des extraits de différents terriers attestent de l’existence d’un Mas des Pèlerins, sur la route de la Gorge au Puy. Le mas est tantôt situé à la Paretary (devenue Chez Paret), tantôt nommé seul Mas des Pèlerins. Mas vient du latin médiéval mansa, mansus, massus, domaine rural tenu en fief, associant maison, jardin, dépendances et champs, géré par le maître et sur laquelle travaillent des paysans tenanciers. Sur cette portion du domaine se concentre la vie industrielle, et tout ce dont le domaine a besoin est produit là (tissage du lin , curtil...).

Dans un acte du 7 janvier 1320, Pierre et Guillaume Paret reconnaissent les droits du seigneur de Lupé sur leurs terres, sous les curtillages (jardins de légumes) audit Mas des Pèlerins, suivant les confins de la Paretary, jouxte le chemin de Vienne au Puy, jouxte le ruisseau de Boucharet, jouxte les terres de Bonne Bonnion, jouxte les terres desdits frères Paret et de Gaudemar de la Barge damoiseau, jouxte la terre de Martin du Buisson et Philippe Chardon.

Le 7 janvier 1377, s’ajoute les noms de Guillaumme Jurie et François Camyer. Depuis lors des actes sont signés Jurie ou Camyer, Cellard, Gaillard, et Jullien et attestent des servis (redevances) payés à Papillon Follatier, fils d’Hugon, sur les terres de la Parétary des Camiers, divisées entre eux quatre.

On trouve tout près le lieu des Jacquards qui existait avant que les métiers du même nom n’aient été inventés. Aussi, ce ne sont pas eux qui lui ont donné le nom. On ne peut pas totalement éliminer le prénom Jacques pour être à son origine. Toutefois les pèlerins de Saint-Jacques-de-Compostelle se sont vu attribuer plusieurs noms selon les époques : les Jacquets (étymologiquement : celui qui va à Saint-Jacques), Jacaires, Jacquaires, ou encore Jacquards.

Un chemin mène du Mas des Pélerins ou Camiers aux Jacquards.

Par ailleurs, le pont Bertrem construit en un endroit stratégique, était le seul point de passage et était emprunté par les pèlerins de St-Jacques de Compostelle pour rejoindre Le Puy.

Enfin Chavanay avait un mas du pèlerin (terrier de Virieu 1375) et Malleval possédait un hôpital (hospitale malevallis 1341), de l’ordre de Saint Jean de Jérusalem, qui se trouvait sur la route qui conduisait au Puy.

17ème et 18ème siècle Véranne et Maclas font partie de la baronnie de Malleval jusqu'en 1633. Cette année-là, Gabriel de Fay la vend, ainsi que celles de Saint-Appollinard, Véranne et Roisey à Claude de Villars, seigneur de La Chapelle. Le fils de Claude de Villars, Pierre, après une brillante carrière militaire et diplomatique, finit par tomber en disgrâce. Pour payer ses dettes, il doit vendre la baronnie de Maclas à un habitant d'Avignon, François La Beau de Bérard qui la revend à son tour en 1670 à Claude-Nicolas de Fontanés, seigneur de La Valette. L'année suivante, François La Beau de Bérard la lui rachète et la baronnie restera dans sa famille jusqu'à la Révolution.

A la fin de l’ancien régime, Véranne est village et paroisse en Forez, diocèse de Vienne, archiprêtré de Bourg Argental, élection de Saint Etienne, justice de Maclas, bailliage de Bourg-Argental, généralité de Lyon. Le chapitre de Saint-Maurice de Vienne nomme à la cure.

Les Jurie des Camiers sont greffiers, lieutenants et juges de la baronnie de Maclas. Le Greffier est à la fois le secrétaire des procès et l'archiviste de la justice. Il dresse le procès-verbal des interrogatoires et rédige les jugements qu'il expédie aux parties. Il procède aussi aux inventaires après décès et à la vente des biens mobiliers. Le Lieutenant était, le nom l'indique, le remplaçant du juge en son absence.

Jean François Jurie des Camiers fut Electeur du Tiers Etat. Il adressa au roi Louis XVI, le 9 septembre 1789, un ouvrage intitulé Système nouveau présenté au roi, aux États-généraux assemblés à Versailles et au directeur des finances. Le titre de départ portait sur les Causes de la détresse de l'Etat et de la nation françoise et des difficultés de la nation à payer ses tributs. Moyens faciles de donner à l'Etat et à la nation françoise l'opulence dont ils ont besoin. L’année suivante, il écrit Remplacement général des droits onéreux, présenté à l'auguste Assemblée nationale, & dédié aux Français. Enfin, en 1804, il fait éditer à Lyon Couronnement de Napoléon Bonaparte, comme chef de la nation française, par S.S. Pie VII... tiré du grand prophète Daniel, dans son livre mystérieux et prophétique.




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La tour centrale est un ancien colombier. Le colombier provençal, dit en pied de mulet est caractéristique des régions fortement ventées.

Le pigeon a horreur du vent, et pour qu’il se sente bien, le colombier est construit avec un toit à une seule pente dont les côtés exposés au vent sont protégés par des murs. La disposition habituelle des colombiers du Languedoc, à partir du XVIe siècle, est celle d’un bâtiment carré couronné par un toit à une seule pente avec abri. L’implantation d’un colombier était autorisée par le seigneur local. Des propriétaires non nobles pouvaient avoir cette autorisation à la condition de posséder un domaine suffisant et de s’acquitter de redevances. Aussi sa possession est elle une marque sélective de rattachement à une suprématie sociale. Dans la construction initiale des Camiers, le colombier était sans doute situé en façade.





La grange a subi un incendie. Les pierres ont été réutilisées pour sa reconstruction. On distingue les traces du feu sur le granit qui a pris une couleur rouge caractéristique. Elles n’ont pas été utilisées comme à l’origine et on trouve par exemple des linteaux à la verticale.


A remarquer, le linteau en accolade, un élément de construction d'un seul bloc en pierre qui comporte un motif architectural composé de deux courbes et contrecourbes symétriques réunies par un angle sur l'axe de symétrie. Les linteaux de porte avec arc en accolade n'ont pas de signification particulière, sinon qu'ils montrent que la demeure appartenait à une personne aisée qui pouvait se permettre la dépense d'un linteau sculpté. En Provence, ils étaient très à la mode durant le gothique tardif (fin du 15ème siècle.) et surtout dans les débuts de la Renaissance. L’influence provençale dans l’architecture des Camiers est attestée dans plusieurs de ses éléments.

C’est vers la fin du 16ème siècle que l’on commence à employer massivement ces formes engendrées par des arcs de cercle. Les accolades sont, à leur origine, à peine apparentes; puis  elles se dégagent et sont plus accentuées.






Les toits sont terminés par des génoises. Ce sont des maçons venant de Gênes qui auraient apporté cette particularité d'abord en Provence puis dans tout le sud de la France, où domine la tuile canal. Cette fermeture d'avant-toit est formée de plusieurs rangs de tuiles-canal en encorbellement et garnie de mortier. Sa fonction est pratique, permettant d'éloigner des murs les eaux de pluie. Le nombre de rangs peut être aussi considéré comme un témoignage du statut social. On remarque des tuiles vernissées. Recouvertes d’une glaçure à base de plomb, elles prennent leur couleur après cuisson.



Les angles sont adoucis par une génoise tournante, obligeant à une savante disposition des tuiles de la toiture. La génoise est également employée comme couronnement des murs et des arcades surmontant les portails.

L
e haut des murs était souligné par un bandeau blanc sous la génoise, dont on voit encore des tracas. C’était un traitement permettant la mise en valeur des formes et des volumes. Le badigeon s'étalait sur une surface lisse formant des bandeaux contrastant de ton avec le parement de la façade. Décoratifs, ces bandeaux éloignaient aussi les insectes.





Les marches de l’escalier monumental ont été taillées dans des blocs entiers de calcaire, une roche sédimentaire qui n’est pas locale au contraire du granit.

On peut distinguer des fossiles, caractéristiques du calcaire limoneux, provenant de la vallée du Rhône.






Le bâtiment situé à l’entrée est la ferme. Elle a été tenue depuis les années 1830 par la famille Guillot, les Antoine dits Toine se succédant de père en fils, jusqu’en 1965.

 

Le 31 janvier 1843, Antoine Guillot, né le 18 avril 1810, fils de Jean Baptiste et Antoinette Mousset, cultivateur domicilié au lieu des Camiers, et Antoinette Tranchant, se marient à Véranne.

Jean Guillot, fils de Jean Baptiste et Antoinette Mousset, et Marie Anne Gagnière se marient le 20 février 1852 à Maclas.

Après le décès de sa femme, Antoinette Tranchant, en 1848, Antoine se remarie avec Marie Cellard.

 

Recensement de 1856 :

Antoine Guillot, 46 ans, et sa femme Marie Cellard, 31 ans, vivent aux Camiers avec les quatre enfants d’Antoine, Marie, 11 ans, André, 10 ans, Marguerite, 4 ans et Antoinette, 1 an.

Jean Cellard, 28 ans, et Jean Baptiste Oriol, 15 ou 18 ans, sont domestiques cultivateurs.

Recensement de 1891 :

Marie Anne Gagnère a 62 ans et vit aux Camiers avec son fils Antoine Guillot, né en 1856, et sa belle fille Marie Tranchant.

23 juilt 1871

Recensement de 1911 :

Antoine Guillot, 45 ans, et sa femme Marie Tranchant, 42 ans vivent aux Camiers avec leurs trois enfants, Marie, 10 ans, Jean, 8 ans et Antoine, 3 ans.

Joannès Toucheboeuf, 24 ans, est domestique de ferme et Marius Reval, 13 ans, est berger.



A l’extérieur de l’enceinte des mûriers attestent de l’industrie de la soie. Des contrats ont lié les propriétaires des Camiers à des moulinages avec lesquelles ils avaient des liens (familiaux ou d’affaire).



Au sud, existait un grand jardin à la française transformé par les fermiers en terre agricole et en potager. On remarque le puits caractéristique de la région. Un ruisseau passait et alimentait fontaines ou bachats en complément de la nappe phréatique très peu profonde.




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A l’intérieur, on remarque le dallage. La fabrication de la tomette est l’une des grandes spécialités de la céramique provençale.

Vermillon, jaune clair, ocre, coquille d'oeuf, rouge foncé ou noir, les couleurs des tomettes sont déterminées par le type d'argile employé, la glaçure à l’oxyde de plomb et le degré de cuisson. Les tomettes et les carreaux sont légèrement biseautés pour un ajustement sans joints apparents lors de la pose. Certains assemblages produisent l’effet d’un tapis.




Carreaux rouges orangés et coquille d’œuf





Carreaux formant tapis





Tomettes ayant subi l’usure du temps





Carreau réparé avec une pièce




Une cheminée monumentale a conservé un tournebroche à contrepoids. Deux fournettes encadrent la bretagne (plaque de cheminée).

Les biches de lait étaient mises à cailler au chaud dans les placards taillés dans l'épaisseur du mur, de chaque côté de la plaque en fonte.





Dans la pièce à côté, un potager est constitué d’une grosse pierre, percée de plusieurs ronds, posée sur un muret. Les braises de la cheminée située dans la pièce à côté, étaient déposées dans ces trous, et la cuisinière y posait ses marmites. On utilisait le potager pour faire mijoter des plats longtemps et à basse température, ou pour garder au chaud des plats cuits au préalable sur le feu ouvert. Plusieurs foyers de cuisson d’intensités différentes permettaient une cuisine délicate.





Les ouvertures éclairant la chapelle ont été (malheureusement) remaniées au début du 20ème siècle. A l’intérieur, des ferrures attestent l’existence ancienne de la chapelle. Le plafond est en croisée d'ogives, caractéristique de l'architecture gothique, en usage jusqu'au milieu du 16ème siècle. Elle correspond aux diagonales formées par l’intersection de deux voûtes en berceau.

Un trou dans le plafond permettait le passage d’une corde reliée à une cloche.




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Il est grand temps de retrouver notre nouvel invité et pas des moindres. Nous avons la chance d'avoir rencontré M. Marcel Miribel, le doyen et ancien président de l'association des Guides Animateurs du Parc Naturel Régional du Pilat. Cet alerte nonagénaire, véritable mémoire vivante de l'association, a bien voulu répondre à nos questions et nous l'en remercions encore une fois chaleureusement.





Regards du Pilat : Vous avez été l'un des membres fondateurs de l'association des Guides Animateurs du Parc Naturel Régional du Pilat, et vous l'avez présidée pendant plus de vingt ans. Pouvez-vous nous raconter comment cette association a vu le jour, il y a maintenant plus de trente ans ?

Marcel Miribel : tout a commencé en 1974 avec la création du Parc Naturel Régional du Pilat. Dès ses premières années d'existence, ce nouveau parc reçut de nombreuses demandes d'accompagnements ou de visites, de la part de groupes souhaitant découvrir le Pilat. Bien que l'éducation au territoire fût un des buts du Parc, son personnel peu nombreux à l'époque ne parvenait plus à satisfaire toutes les demandes. Il fallait trouver des intervenants extérieurs. Jean Andersson, animateur culturel du Parc, qui ne manquait pas d'idées associant l'économique et le culturel, pensa aux étudiants de l'université de Saint-Étienne. Mais les demandes émanaient surtout des écoles, qui souhaitaient sortir en semaine, et principalement aux beaux jours en mai-juin. C'était incompatible avec l'emploi du temps des étudiants, lesquels en plus souhaitaient une petite rétribution. Jean Andersson se tourna alors vers l'Université pour Tous, fréquentée par beaucoup de retraités qui trouvaient là une application pratique à partager les savoirs acquis. Ils étaient disponibles en semaine et en mai-juin, et ils n'avaient pas besoin d'un retour financier. Les retraités, de plus en plus jeunes depuis que l'âge de la retraite avait été abaissé à 60 ans, constituaient donc les candidats idéaux pour devenir les futurs Guides du Pilat. Des volontaires furent demandés, et une douzaine de personnes répondit à l'appel.

En 1980 une formation leur fut dispensée au sein de l'Université pour Tous par des responsables du Parc. Les thèmes abordés furent très divers : la forêt, l'agriculture, la botanique, l'architecture, etc. Parmi ces pionniers il y avait Antoine Molette, Madeleine Devillers, Jacqueline Darne, Paulette Thévenon, Maurice Decultis. C'est en mai 1981 qu'ils accompagnèrent un groupe dans le Pilat pour la première fois. Cette initiative connut rapidement le succès. Devant une demande accrue, Jean Andersson décida de recruter de nouveaux futurs guides. Il fit paraître des articles dans les journaux, posa des affiches dans les mairies, etc. Une soixantaine de personnes s'inscrivit. Une première réunion eut lieu le 10 janvier 1983. Elle fut suivie de six jours de formation à l'Université pour Tous, et de six sorties en car pour concrétiser sur le terrain les sujets abordés.

Les Guides du Pilat n'avaient jusqu'alors qu'une existence informelle. En 1983 le Parc leur proposa de se constituer en association. La première Assemblée Générale se tint en décembre 1983 à Saint-Romain-les-Atheux. Antoine Molette en était le président, Madeleine Devillers la secrétaire, pour ma part j'acceptai le poste de vice-président, avant de devenir président quelques années plus tard.

 

Article de presse locale de 1984 relatant la création de l'association
Marcel Miribel et Antoine Molette

Il fallut trouver un local pour nous réunir. C'est Madame Grossetête qui nous attribua une salle de la Maison des Associations, rue André Malraux à Saint-Étienne. Nous en avons pris possession en février 1984. Nous tenions une permanence les mardis, pour attribuer les nombreuses demandes de sorties. L'habitude a perduré, même si le jour a changé (nous nous réunissons aujourd'hui le lundi), ainsi que la salle (la première étant devenue trop petite).

RDP : Quelles sont, principalement, les activités de l'association ? Ont-elles évolué avec le temps ?

MM : Notre but est d'accompagner les groupes constitués (écoles, centres sociaux, associations, etc.) lors de promenades découverte, généralement pédestres. Pendant longtemps les écoles ont constitué notre « clientèle » principale. Mais nous sortions aussi des groupes du troisième âge en car, et nous faisions des projections de diapos. Tout cela a bien changé. Pour les enseignants, le Pilat est désormais trop proche, les sorties scolaires se font aujourd'hui beaucoup plus loin ! Quant au troisième âge, il a aussi évolué. Aujourd'hui notre association travaille essentiellement avec les centres sociaux ou maisons de quartier, qui proposent des randonnées pédestre guidées à un public adulte.

 

Article de la revue Notre Temps de 1986

RDP : C'est sous votre présidence qu'ont été mises en place les Marches de l'Été, qui continuent d'emmener chaque été des randonneurs à la découverte du Pilat. Racontez-nous les débuts de cette manifestation sympathique.

MM : Les membres d'un groupe de marcheurs du centre social des Allocations Familiales avaient pris l'habitude de se balader entre eux les mardis après-midi d'été. À l'initiative de Madame Defayes, membre des Guides, ce groupe se retrouvait à Saint-Genest-Malifaux où elle avait une résidence. Un jour je l'ai vue avec une quarantaine de personnes. Je lui ai alors proposé la prise en charge de ce groupe par les Guides, sous l'égide du Syndicat d'Initiatives de Saint-Genest-Malifaux, dont j'étais membre, et d'élargir ces marches à l'échelle du canton, soit 8 communes. Ce qui faisait 8 marches, une pour chaque  commune, en juillet-août.

 

Les « Marches de l'Été

Au début ce fut un peu improvisé, sans grande préparation. Puis pour être en règle il y eut déclaration en Préfecture, et publicité par le Syndicat d'Initiatives. Les marches étaient accompagnées surtout par des Guides ayant une résidence secondaire dans le canton : Mesdames Defayes et Ledin, Messieurs Bonnefoy, Brunon, et moi-même. Le succès fut tel que l'on doubla le nombre de marches, qui passa à 16, deux par commune. C'était le même circuit, que nous faisions le mercredi dans un sens, et le vendredi dans le sens inverse. Des gens venaient aux deux et pensaient faire deux circuits différents ! Nous avons même atteint les 19 marches certaines années, en proposant des circuits d'une journée, les dimanches. Cependant, le nombre grandissant de participants, parfois plus de 100, finit par poser des problèmes de sécurité. Il était impératif de définir un cadre plus rigoureux. En 2005, Pierre Bessenay  le nouveau président de l'association était réticent à conserver les Marches à cause de la responsabilité que cela entraînait. C'est finalement le Parc, désireux de maintenir cette manifestation, qui fixa les règles : pas plus de 50 personnes, et la présence d'un guide professionnel pour la sécurité, le Syndicat d'Initiatives assurant la responsabilité juridique.

RDP : Ces marches ont connu cette année un beau succès. Nous savons que vous vous y êtes investi personnellement, en amont, pour renseigner les marcheurs et prendre les inscriptions. On vous a vu également au départ de plusieurs randonnées.

MM : J'ai aimé les « Marches de l'Été ». C'était pour moi une grande satisfaction de savoir que beaucoup de personnes seules venaient passer un bon moment convivial. Je continue à m'y intéresser en prenant les inscriptions à l'Office du Tourisme, et aussi en allant au départ de certaines marches prendre des photos, qui sont ensuite publiées sur notre site Internet.

RDP : Depuis 2003 vous n'êtes plus président de l'association, ayant laissé votre place à des plus jeunes. Comment s'est passée cette transition ?

MM : Cela a été un peu difficile. Michel Raboisson a bien voulu prendre la suite, mais très consciencieux et perfectionniste cela a été lourd pour lui et il a démissionné au bout d'un an. C'est Pierre Bessenay, un nouveau guide possédant une certaine expérience, de l'assurance et une autorité naturelle, qui a accepté de prendre la suite. Il est resté président pendant 5 ans. Depuis 2009 c'est Bernard Jamet, bien secondé par Maryse sa compagne qui s'occupe de la trésorerie, et par Solange Narbey pour le secrétariat, qui assure la continuité avec succès. L'association a su recruter de nouveaux membres, qui viendront relever ceux qui ne peuvent plus assurer les encadrements de marches, ayant toujours bonne tête mais les jambes flageolantes !

RDP : Quels sont vos meilleurs souvenirs de l'époque où vous étiez président de l'association ?

MM : Je me souviens en particulier de certaines grandes journées d'accompagnements. En 1986, les Ponts et Chaussées, où j'avais travaillé pendant 10 ans, ont su que je m'impliquais  dans l'association des Guides du Pilat. On m'a alors demandé d'organiser la sortie annuelle des Ponts et Chaussées de la Loire. Je l'ai préparée avec Antoine Molette. Un petit livret rédigé par nous, et édité par les Ponts et Chaussées, était remis à chacun des 800 participants. Pas moins de 16 cars furent nécessaires pour emmener tout le monde. Les cars partaient de la Plaine Achille, chacun avec un itinéraire différent, commenté par un guide, et se retrouvaient pour le repas de midi servi sous chapiteau à Saint-Genest-Malifaux, avec une après-midi festive...

En 1996, les 15, 16, 17, 18 mai, nous avons organisé le challenge des Comités d'Entreprise des Caisse d'Épargne de France. Les participants étaient hébergés au château du Buisson à Maclas. Après une soirée d'accueil, nous avons encadré trois randonnées : la première en direction de l'Œillon, la seconde vers Saint-Sabin, la troisième dans la vallée du Rhône. Les 180 participants partaient chaque jour de Maclas, sans avoir à prendre un car, ce qui fut très apprécié. Les randonnées avaient été très bien préparées par le regretté Robert Gineys.

Mon troisième souvenir concerne le rassemblement des Guides de France à Burdignes, 16 cars ont sillonné le Pilat avant de converger à la Croix de Chaubouret.

RDP : Il faut croire que marcher au bon air du Pilat vous a conservé, car vous semblez avoir toujours bon pied, bon œil ? Vous avez un secret ?

MM : J'ai de la chance d'avoir une bonne santé, et mon père qui avait conservé des habitudes de sa jeunesse en Ardèche m'avait inculqué les bons principes : à midi une grosse salade, le soir une soupe de légumes. J'ai toujours marché, pour aller à l'école, puis au travail, et dans la mine où j'ai passé 34 ans. Je n'ai jamais veillé tard le soir, sauf quelques fois pour Noël ou une fête. Je ne sors pas le soir, je déteste les banquets. À 15 ans j'ai eu une hépatite A, qui a été finalement bénéfique pour ma santé. Ma fragilité du foie m'a obligé à ne pas boire d'alcool, je mets de l'eau dans mon vin et je ne mange pas le gras de la viande.

RDP : Parlez-nous un peu pour terminer de votre vie professionnelle. Nous savons que vous vous investissez aussi beaucoup pour le puits Couriot, où vous avez travaillé, qui est devenu le Musée de la Mine de Saint-Étienne.

MM : Avant guerre on faisait sa 6e en primaire, à la fin de laquelle j'ai eu mon Certificat d'Études avec mention bien. En 5e je suis entré dans une école professionnelle, ce que l'on nomme aujourd'hui un Lycée technique. Beaucoup de maths, dessin, sciences (physique et chimie), littérature, histoire et géographie, pas de sciences naturelles. Le Pilat a parfait ce qui me manquait dans ce domaine. En 4e il y a eu beaucoup de visites d'usines : aciéries, menuiseries, imprimeries, etc. En fin d'année il fallait choisir un métier. Beaucoup optèrent pour la mécanique, le tissage, la marbrerie, pour ma part je choisis de devenir géomètre des mines. Le matin on allait à l'école, et l'après-midi en entreprise. Moi c'était à la mine. En octobre 1938 à l'âge de 14 ans je suis descendu pour la première fois dans un puits de mine, c'était le puits Sainte-Marie, puis dans le puits Rambaud, et dans le puits Couriot en décembre. En octobre 1939 mon père fut mobilisé. J'ai été embauché pour remplacer l'adjoint du chef géomètre de Couriot, lui aussi mobilisé. Ensuite j'ai navigué : puits de la Loire, puits Montmartre, puits Rochefort. En 1942 j'ai passé, à titre personnel, un CAP de dessinateur industriel. En 1950 le bassin houiller du Gier a fermé, c'était le début de la récession. À Saint-Étienne, les quatre divisions (Villars, Loire, Couriot, Montmartre) ont été regroupées à Couriot avec un seul chef au lieu de quatre : économie oblige ! En 1964 j'ai passé un CAP d'opérateur géomètre.

En 1971, encore à la mine, premier « avant-projet » irréalisable : recherche de vieux travaux, niveau de l'eau... J'ai fini ma carrière à Pigeot : surveillance du barrage nous séparant de de Couriot pour ne pas remonter l'eau de Couriot, et repérage des sondages du charbon restant à Roche-la-Molière. Le charbon reprenait de la valeur avec la crise pétrolière, et on faisait durer la mine pour des raisons sociales. Finalement je fus invité à prendre ma retraite à 50 ans en 1974. Avec mes deux diplômes, j'ai réussi à entrer aux Ponts et Chaussées. La vraie retraite, je l'ai prise en 1984.

 

Clair de lune sur le puits Couriot

Je me suis peu impliqué au début dans la réalisation du Musée de la Mine, étant déjà bien pris avec les Guides du Pilat. J'ai commencé à m'y consacrer en 1998, ma charge de président des Guides devenant moins prenante. Je suis devenu l'organisateur d'une sortie annuelle, d'abord dans des sites miniers, puis bien d'autres. En 2017 j'ai organisé la 16e sortie, chez Michelin à Clermont-Ferrand et au Puy de Lamptégy. Je fais profiter de mon expérience acquise chez les Guides. Je suis devenu la mémoire du puits Couriot, et ma participation à la deuxième Fête de la Science portera sur la cartographie et le rôle des géomètres des mines.

RDP : Marcel Miribel, il ne nous reste plus qu'à vous remercier pour cet entretien, et vous souhaiter encore de longues années avec la passion du Pilat.

 

Marcel Miribel

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