LES REGARDS DU PILAT
PRESENTENT
LES EAUX DU PILAT
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par Patrick BERLIER

   À toutes les époques, les caractéristiques, la qualité ou la puissance des eaux du Pilat ont impressionné ou émerveillé les hommes. Fontaines sacrées, marécages maudits, sources captées ou détournées forment les éléments d’une longue « histoire d’eaux ». Laissez-moi vous en conter quelques épisodes…
LA SOURCE DE SAINT-SABIN
   Si tout le monde connaît la chapelle Saint-Sabin, bien peu de personnes savent qu’à proximité immédiate existe un curieux point d’eau. Il faut descendre le talus sur quelques mètres, côté nord de la chapelle, se glisser à droite dans un bouquet d’arbres, pour découvrir dans un creux de rochers une petite vasque naturelle toujours remplie d’eau. Par un miracle quotidien, les bœufs de saint Sabin pouvaient dit-on boire ensemble dans la fontaine, sans qu’il fût nécessaire d’ôter leur joug. Un autre petit miracle a épargné la source de justesse, lors de la tempête de décembre 1999 qui dévasta le site. Elle est hélas souvent bien sale aujourd’hui. Le promeneur qui, s’apitoyant sur son état, décide de la vider pour la nettoyer, a la surprise de voir la vasque se remplir à nouveau, au bout de quelques minutes. Puis le niveau se stabilise.
D’où vient l’eau ?

   La source de Saint-Sabin a fait l’objet de polémiques. Sa position presque au sommet d’une colline et son altitude (1100 m) surprennent, à première vue. Mais elle est loin d’être la source la plus élevée du Pilat : le Ternay prend naissance à 1200 m, le Gier à 1300 m, et la source de Bote jaillit à 1325 m, soit 200 m plus haut que Saint-Sabin ! Autre élément curieux : s’il s’agissait de la résurgence d’une nappe phréatique située à un niveau supérieur, l’eau jaillirait du rocher comme une source vauclusienne et s’écoulerait vers le bas de la colline. Au contraire, la source de Saint-Sabin ne « coule » pas, elle se contente de se renouveler lorsqu’on prélève de son eau. Le phénomène est on ne peut plus naturel : en physique on dit que l’eau tend sans cesse à reprendre son niveau, en application d’une loi bien connue, celle des vases communicants. Bref rappel du principe : pour qu’un liquide soit en équilibre dans deux vases communiquant entre eux, il faut que les niveaux de ce liquide, dans les deux vases, soient à la même hauteur. En théorie donc, la source de Saint-Sabin ne peut provenir que d’une étendue d’eau située à la même altitude, et communiquant avec elle par des fissures ou conduits souterrains naturels.

   Selon une théorie qui a connu une certaine vogue, les eaux de Saint-Sabin viendraient des Alpes. Mais il y a la distance, et surtout le dénivelé. Cette eau alpine devrait passer sous le Rhône, et remonter ensuite de près de 1000 m pour arriver à Saint-Sabin. En l’absence d’une étude scientifique qui établirait ces faits de manière indiscutable, ou prouverait leur impossibilité, on ne peut que rester circonspect.

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Source sacrée et ex-voto
   On imagine très bien à quel point la source de Saint-Sabin a pu impressionner les populations anciennes. De nombreux ex-voto y furent découverts : des statuettes en pierre, représentant des membres inférieurs humains, et surtout des petits enfants dans leurs langes. Un rituel fut sans doute attaché à la fontaine à l’époque celtique ou pré-gauloise. Puisque la fontaine « renaissait » de suite après avoir été vidée, sans doute implorait-on les dieux pour faire revenir à la vie de même façon les enfants mort-nés ou décédés peu après leur naissance. C’est peut-être à Saint-Sabin qu’il faut chercher l’origine du culte identique attaché à Notre-Dame de Sous-Terre de Pélussin.

 
   Peu de ces objets nous sont parvenus : beaucoup ont été cassés par les paysans sous le prétexte qu’ils « portaient malheur », les autres ont été dispersés. Un rapport de plusieurs pages, avec relevé des figurines, avait été dressé par le docteur Marcellin Ghautiet en 1889. D’autres découvertes eurent lieu semble-t-il vers 1930, en particulier celle d’une statuette que j’ai eu le rare privilège de pouvoir photographier. La source fut forcément l’élément prépondérant dans l’occupation du site de Saint-Sabin, à toutes les époques, que ce soit comme fontaine sacrée ou comme simple mais indispensable point d’eau.

 Autres sources d’altitude

 Au nord du Crêt de l’Œillon, sur la Chaux d’Égallet, un panneau d’information commémore le souvenir du Grand Hôtel du Mont Pilat, disparu dans un incendie en 1931, et dont il ne reste aujourd’hui quasiment plus un seul vestige, sauf peut-être… la source qui l’alimentait en eau potable. Aucun balisage n’y conduit, elle ne figure pas sur les cartes topographiques, mais elle est connue des amateurs car il y pousse un cresson sauvage particulièrement goûteux et recherché ! Cette source est à 1200 m d’altitude.

   Un peu en dessous, et encore un peu plus au nord, il faut citer la source de la chapelle Sainte-Madeleine, située à l’aplomb de la chapelle, juste au-dessus de la route. Son eau rafraîchissante est particulièrement appréciée. La source alimentait la petite communauté d’ermites jadis installée ici, à 1030 m d’altitude.

   Un mot, pour terminer, sur le « Puits de la Fée » du Pic des Trois Dents. Aujourd’hui un sentier passe au pied des trois « dents » et longe l’antique muraille d’enceinte ; au pied de la première dent, au débouché du sentier, il faut monter un peu à gauche pour aller admirer ce « puits », cavité creusée dans le roc qui recueille l’eau de pluie grâce à un ingénieux système de rigoles naturelles et de canaux creusés par l’homme. Cet aménagement semble fort ancien, et remonte sans doute au moins à l’époque celtique. Attention ! Le sentier est assez « sportif », réservé aux bons marcheurs : chaussures de randonnée et cannes sont indispensables, ainsi qu’un téléphone portable pour alerter les secours en cas d’accident.

PROCHAINEMENT :

L’ÉNIGME DE L’AQUEDUC DU JANON, FANTASME OU RÉALITÉ ?

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