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DOSSIER


NOVEMBRE 2019










Par Notre Ami

Michel BARBOT



Le mystérieux Dorlay de Noël Gardon

 

Noël Gardon dans son livre Mon Pilat Etymologies Rêves Légendes et… Réalités consacre deux paragraphes, plutôt énigmatiques, au Dorlay, rivière du Mont Pilat. Dans le  second paragraphe, l’historien Forézien indique :

« C’est le ‘’Gier’’ qui, avant d’être capté, était le ‘’Dorlay’’, nom qui veut dire ‘’près de la porte’’, mais une fois transformée par Rome la rivière allait à Lyon et plus à la mer. »

« Une fois transformée par Rome »… le Gier, primitivement le Dorlay, selon l'auteur, la rivière « Près de la Porte », coulait désormais dans l'aqueduc construit par les Romains pour alimenter en eau Lyon la capitale de Gaules. Auparavant, il coulait jusqu'à Givors où il se jetait dans le Rhône, et de là ses eaux mêlées à celles du fleuve allaient jusqu’à la mer. Cela dit, l'aqueduc ne captait pas la totalité des eaux, une bonne partie continuait à couler normalement.

 

Ruines de l'aqueduc du Gier à son arrivée à Lyon

 

Cet événement pourrait paraître anodin, mais il possède sa part de mystère dont la clef surgit des eaux plus loin dans le texte... On comprend, en lisant l'auteur, que la rivière nommée aujourd'hui le Gier fut jadis le Dorlay, et fit l'objet d'un culte particulier : des souhaits, des demandes, étaient confiées à ses eaux pour qu'elles les conduisent jusqu'à la mer. Mais après le captage de la rivière par les Romains, les souhaits risquant d'aboutir à Lyon, le culte passa à un cours d'eau parallèle, qui prit et conserva le nom Dorlay.

Doucement mais sûrement, Noël Gardon entraîne le lecteur au rythme des eaux du Dorlay vers la seconde partie de ce paragraphe où va se développer une symbolique aquifère venue du passé mais jaillissant dans un futur prophétique…

Pour traduire Dorlay par « près de la porte », Noël Gardon sépare les deux syllabes du nom : DOR et LAY. En ancien français le mot dor désigne une porte. On allait jadis « de dor en dor », comme on va aujourd’hui « de porte en porte » pour délivrer quelques messages. Quant à lay, l'auteur choisit de le traduire par « près de », soit le Lès ou Lez médiéval, mot que l’on retrouve à la porte des cités, dans les anciens faubourgs ou actuelles banlieues, tel Villeneuve-lès-Avignon. Le Dorlay se situe « près de la porte ». De quelle porte s’agit-il ? Le mystère inhérent au Dorlay et donc à cette porte, jaillit subitement dans la seconde partie du second paragraphe :

« Ce nom de Dorlay, dont du Choul ne fait pas mention, est le nom de la rivière qui en a été dépossédée pour en prendre un autre, quand elle a cessé d’être la rivière descendant le Pilat de laquelle il est dit : ‘’Il mesura mille coudées et il me fit passer par l’eau, il y avait de l’eau jusqu’aux chevilles, il en mesura encore mille et me fit passer par l’eau, il y avait de l’eau jusqu’aux genoux. Il en mesura encore mille il me fit passer par l’eau, il y en avait jusqu’aux reins. Il en mesura encor mille, c’était un torrent que je ne pouvais traverser, et il me conduisit le long du torrent et voici qu’il y avait sur les bords du  torrent des arbres en très grand nombre des deux côtés. Et il me dit ; ces eaux s’en vont vers le district oriental, elles descendront dans la plaine et entreront dans la mer, dans les eaux salées et les eaux deviendront saines. »

Jean du Choul, en effet, dans sa Description du Mont Pilat publiée en 1555, ne fait pas mention du Dorlay, car en réalité il lui donne un autre nom, la Doyse, qui paraît donc être son nom primitif. Comme par ailleurs il cite le Gier, il semblerait qu'à son époque le Gier ait perdu son nom primitif alors que la Doyse, futur Dorlay, le conservait encore.

C’est en 1993 que les lecteurs découvrirent dans le livre de Noël Gardon cette étrange exégèse appliquée au Dorlay. Les dix lignes rédigées en italique ont dû assurément intriguer les lecteurs. Ce texte est intercalé dans le livre par l'auteur à la façon d’un tailleur de pierre glissant dans son mur une pierre de réemploi porteuse d’un véritable message. Notre tailleur de mots glisse cet étrange paragraphe avec une certaine discrétion. Il ne s’agit pas ici d’informer Paris et donc le monde entier…, mais cette insertion n’est pas sans évoquer « L’AFFAIRE DES PLACARDS » – qui intrigua fortement les Parisiens lorsqu’ils découvrirent en 1623 le texte intriguant des affiches étalées à tous les carrefours, ainsi que nous le rappelle Patrick Berlier dans la « 1e partie : fondements et origines » de son article « La Rose-Croix » http://regardsdupilat.free.fr/rose.html

À ceci près que le texte ainsi placardé par Noël Gardon ne soit pas précisément inconnu, si tant est que le lecteur du livre ait pu lire ou entendre ce passage ici adapté du Livre d’Ézéchiel, récit biblique de l’Ancien Testament. Cette adaptation du texte biblique pourrait émaner, bien que le texte ne l’indique point, d’une association pilatoise dont Noël Gardon se ferait l’ambassadeur. Dans cette hypothèse, cette association – qui contrairement à la Rose-Croix ne donne pas son nom – jugea peut-être, en cette ultime décennie du XXe siècle, que l’heure était venue de révéler son existence tout en restant, un temps encore, dans l’anonymat ?

Quelle catégorie de lecteurs était visée par ce « placard » d’inspiration biblique ? Assurément un lectorat susceptible en bonne connaissance de cause, de comprendre et reconnaître dans un premier temps, ces phrases dans leur aspect biblico-eschatologique, puis dans un second temps, de les concevoir dans une paraphrase purement pilatoise. Ce lectorat ciblé se composerait-il de catholiques pratiquant qui auraient pu entendre le prêtre du haut de sa chaire, ainsi que cela ce faisait encore il y a quelques décennies, lire ce texte ? Ceci est loin d’être certain, surtout lorsque l’on sait que la liturgie de la Parole, constituée par la lecture tirée des Saintes Écritures reste invariable d’une année liturgique à l’autre.

Quelques lecteurs possédant une Bible chez eux et la lisant – elle reste le plus souvent au fond d’un placard – ont pu reconnaître, pour certains, et ce, avec surprise, ces phrases mystérieuses, qu’ils savaient, pour l’origine, étrangères au Mont Pilat. Le groupe qui informa, par la plume de Noël Gardon, les lecteurs de ce que nous pourrions dès à présent nommer l’Énigme Dorlay, ne le firent assurément pas dans l’espoir d’obtenir des résultats immédiats. Si tel eut été leur désir, ils l’auraient fait à visage découvert ou presque. Le lecteur ciblé aura tout le temps, par la suite, si tel est son désir, d’approfondir le sujet et de découvrir le moment venu ce que cache véritablement cette énigme.

 

Ceux qui savent ou les Gardiens de la Porte ?

Le Dorlay aurait été primitivement le nom sacré ou secret du Gier, non pas pour l’ensemble de son cours, mais plus spécifiquement pour « la rivière descendant le Pilat », rivière « de laquelle il est dit »… Cette formule d’introduction au dit placard, que nous serions tentés de ouïr, de cabaler : « inédit(e) », l’est effectivement en ce sens, que ce qui « est dit », par tradition orale, « est (à présent) écrit »… Cette différence notoire fait que le texte rédigé en italique, jusqu’à présent transmis sub rosa tout au long des générations, apparaît à présent transmis par ceux qui savent, au travers de l’écrit au commun des mortels.

 

Le Gier près de sa source

 

L’Énigme Dorlay prend sa source dans cette rivière biblique descendant, ou plus justement appelée, suivant le Livre d’Ézéchiel, à descendre aux Temps Messianiques, du Mont du Temple... Ce texte présenté en italique par Noël Gardon apparaît comme une adaptation des versets 3 à 8 du chapitre 47. Le prophète biblique exilé à Babylone est conduit par Dieu à Jérusalem dans un temps futur où doit-être bâti le 3e Temple. Près de la Porte (Dor-lay…) Orientale du Temple, le prophète Ézéchiel découvre une source qui sortait de dessous le côté droit du Temple, au sud de l’autel. À l’invitation de « l’homme au cordeau », le prophète va traverser à différentes reprises le cours d’eau d’abord chétif puis peu à peu véritable torrent. Ce cours d’eau, tout au moins dans la vision du prophète, apparaît comme une création spontanée. Ézéchiel découvre à mesure qu’il avance, des arbres dont les fruits seront une nourriture perpétuelle et dont les feuilles seront un remède.

Il n’est pas inintéressant de rappeler que certains exégètes, en marge de l’habituel commentaire proposé, voient dans cette vision prophétique du 3e Temple, une projection du Temple juif de l’île d’Éléphantine érigé en Égypte...

 

Viser dans le mille

Le prophète Ézéchiel fut invité par l’ange au cordeau, à traverser par quatre fois, à distance de mille coudées, le cours d’eau. Noël Gardon dans sa paraphrase  pilatoise de la traversée du cours d’eau, indique : « Notons qu’une coudée valait approximativement quarante cinq centimètres, en conséquence, mille coudées, environ quatre kilomètres et demi. » L'auteur commet semble-t-il une petite erreur d'arithmétique, puisque mille fois 45 cm donne 450 m et non quatre kilomètres et demi. Retenons tout de même cette distance de 4,5 km donnée par Noël Gardon, non sans raison sans doute. Effectuée le long des rives du Gier, devenu le Dorlay, par l’Ézéchiel Pilatois, elle permet peut-être de localiser l’énigmatique « Porte », ou pour le moins, le lieu « Près de la Porte ». Pour Patrick Berlier, cette porte pourrait se situer au Saut du Gier, dont la cascade, selon la légende, masque l'entrée d'un monde souterrain où dormirait le fabuleux trésor des Rois du Pilat.

 

Le Saut du Gier

 

Patrick, interrogé à ce sujet, précise encore : « Si nous suivons le cours du Gier à partir de là, en décomptant 4,5 km, on aboutit sous le village judicieusement nommé la Valla-en-Gier, précisément au niveau de la chapelle Notre-Dame de Leytra. 4,5 km plus loin, nous sommes à la Martinière ».

N. Gardon entraîne, assurément en connaissance, le lecteur en direction de cette Martinière (la Mar Tine ou Grande Tine : gaulois Mar- grand  et Tine, grand réservoir, grand tonneau), lieu dit au-dessus de Saint-Chamond où le Gier « était en effet capté ». L’auteur rapporte à l’occasion le simple jeu de mot fait sur Saint-Jean-Porte-Latine, qu’il convient d’entendre Saint Jean « porte la tine ».

 

Lieu de captage supposé des eaux du Gier pour l'aqueduc romain

 

Patrick poursuit : « Encore 4,5 km et nous sommes à la sortie de Saint-Chamond, là où le Gier grossi par plusieurs affluents commence à prendre une plus grande largeur. Et à la quatrième étape, 4,5 km plus loin, le Gier est encore plus gros. »

Lors de la première traversée, Ézéchiel avait de l’eau jusqu’aux chevilles, la seconde jusqu’aux genoux, la troisième jusqu’aux reins mais il n’y eut pas de quatrième traversée, le cours d’eau était devenu un torrent très profond et assurément dangereux. Ces données peuvent se décalquer sur le Gier ; lorsqu'il est en crue, ce qui arrive souvent en hiver, à la quatrième étape il devient en effet un torrent infranchissable.

 

Le Gier devenu un torrent infranchissable

 

Le nombre 1000 des coudées, nombre de la multitude dans la tradition hébraïque, apparaît comme un nombre cyclique s’appliquant tout à la fois au temps et à l’homme qui occupe le temps ainsi qu’il occupe l’espace.

 

Zaramtam, Shena, Yiyou 

Cette double signification biblique du nombre 1000 apparaît dans le Livre des Psaumes, notamment dans le Psaume 90 dont l’auteur ainsi qu’indiqué au verset 1, ne serait autre que Moïse :

« Tu réduis le faible mortel en poussière, et tu dis: ‘’Rentrez dans la terre, fils de l’homme.’’ Aussi bien, mille ans sont à tes yeux comme la journée d’hier quand elle est passée, comme une veille dans la nuit. Tu les fais s’écouler, [les hommes], comme un torrent : ils entrent dans le sommeil ; le matin, ils sont comme l’herbe qui pousse, le matin, ils fleurissent et poussent, le soir, ils sont fauchés et desséchés. »

« Tu les fais s’écouler, [les hommes], comme un torrent : ils entrent dans le sommeil ». Cette traduction présentée dans la Bible du Rabbinat français Zadoc Kahn, apparaît comme l’interprétation de trois mots hébreux : « Zaramtam, Shena et Yiyou ».

Le premier mot « Zaramtam » est majoritairement et approximativement traduit par « Tu les emportes », une traduction qui amoindrit considérablement la signification hébraïque du mot Zaram (assyrien zarâmu, submerger) dont le sens en hébreu biblique est « inonder de pluie », « emporter comme avec une inondation (comme un déluge) » ou bien encore « emporter comme un torrent ».

Le second mot, « Shena » signifie « sommeil » tandis que le troisième mot, Yiyou (soit le verbe « être » conjugué à la troisième personne du pluriel) prend ici le sens de « entrer ».

Les mots utilisés par le psalmiste dans ce verset, traduisent son désespoir, les hommes finissent au soir de leur vie « fauchés et desséchés », pire, ils entrent dans le sommeil de la mort, emportés comme dans un torrent. La vision d’Ézéchiel démontre que cette fatalité n’est pas de toute éternité. Le prophète ne traversera pas le cours d’eau lorsque celui-ci se fait torrent et ainsi il pourra découvrir en aval, les terres paradisiaques générées par le cours d’eau devenu fleuve. L’homme après sa vie sur la Terre, ne descendra plus au Shéol mais pourra contempler son créateur dans les hauteurs du Ciel.

Les commentaires rabbiniques relatifs à cet enseignement de Moïse, se révèlent assez curieux, pour que nous nous y arrêtions dans un prochain dossier consacré au souterrain de Trèves long de 1 km. (ou… 1000 m) suivant l’abbé Chavannes.

 

Confluent du Gier et du Rhône à Givors

 

Projection dans le Mont Pilat de la symbolique des Quatre Royaumes…

La tradition juive fait état, au cours des six premiers millénaires de l’Ère Adamique, de quatre royaumes ou empires à durée variable ayant contraint Israël à l’exil.

Le rituel d’immersion imposé par « l’homme au cordeau » au prophète Ézéchiel, prend appui sur la symbolique des Quatre Royaumes ou Empires bibliques.  

Pour comprendre les subtilités prophétiques de ce texte biblique, il convient tout d’abord, de le rapprocher d’une autre vision prophétique, celle de Daniel, elle-même postérieure à la déportation du peuple juif en 597 av. J.-C. en Babylonie. Il s’agit de l’énigmatique vision du roi Nabuchodonosor dans laquelle apparaît une statue colossale dont la tête désigne l’Empire de Babylone, la poitrine d’argent l’Empire Médo-Perse, les reins d’airain l’Empire de la Grèce, tandis que les jambes de fer et les pieds d’argile désignent l’Empire d’Édom ou Rome.

 

Les quatre empires prophétisés par Daniel

http--www.bibliquest.org-Prophetie-BRPI

 

Le tableau ci-dessous tente à démontrer que des Quatre Empires prophétisés par Daniel, seuls deux empires (le 3e et le 4e) émergent dans la traversée des eaux effectuée par Ézéchiel.

 

Tableau des empires prophétisés par Daniel et Ezéchiel

 

Le voyage du prophète Ézéchiel – dans, et le long – du cours d’eau prenant source dans le Temple, apparaît comme un voyage linéaire. D’intéressantes études évoquent la linéarité d’un fleuve, épine dorsale, sur les rives duquel naissent les centres urbains. Cette linéarité du fleuve va symboliser la linéarité du temps. Bien que le monde juif évoque plus généralement un temps cyclique, le voyage temporel d’Ézéchiel présente un temps linéaire.   

Le Christianisme primitif a vu dans le voyage prophétique d’Ézéchiel, une préfiguration du baptême par immersion que pratiquait Jean-Baptiste sur les bords du Jourdain. Le baptême apparaît ici celui de la Terre entière...

Le prophète Ézéchiel immergé d’abord jusqu’aux chevilles, puis jusqu’aux genoux et enfin jusqu’aux reins, expérimente sous la conduite de l’ange une triple initiation lustrale qui se prolonge par une quatrième initiation, celle des mille mètres ou mille ans suivants : l’infranchissabilité du cours d’eau devenu torrent.

À l’issue de ce baptême, le prophète découvre « sur les bords du  torrent des arbres en très grand nombre des deux côtés. » Ces arbres suivant le prophète Ézéchiel dans l’Ancien Testament, puis suivant l’apôtre Jean dans le Livre de l’Apocalypse, seront à la fois remède et nourriture pour l’homme, au Temps Messianique. Ce final prophétique d’Ézéchiel reformule, bien que différemment, le final de la prophétie de la statue colossale de Daniel.

À ceci près, la chronologie prophétique d’Ézéchiel ne commence qu’avec le 3e Empire (la Grèce : les reins d’airain) puis se poursuit et se termine, comme il se doit, avec le 4e Empire (Édom ou Rome), empire qu’elle associe aux genoux et aux chevilles.

Si l’on se réfère au tableau chronologique proposée par le site Bibliquest, l’Empire de la Grèce commence avec Alexandre le grand en 336 av. J.-C. et prend fin avec Pompée qui envahit l’ancien Israël en 63 av. J.-C. À cette date, pour la tradition juive, commence l’Empire d’Édom ou de Rome. Aux Séleucides, successeurs d’Alexandre le grand vont succéder les Hasmonéens. La dynastie  fortement hellénisée naquit de la Révolte des Macchabées ou Révolte Hasmonéenne. Suivant Flavius Josèphe, Mattathias, l’instigateur de cette révolte, descendait d’un certain Hasmonée (Hashmonaï en hébreu) d’où le nom donné à la dynastie.

Durant la période séleucide, en l’an 170 av. J.-C., eut lieu l’épisode aujourd’hui bien célèbre : Héliodore chassé du Temple. En 1861, Eugène Delacroix peint dans la chapelle des Saints-Anges de l’église Saint-Sulpice à Paris, la fresque « Héliodore terrassé et battu de verges ». Envoyé par le roi grec Séleucus IV, afin de dérober le trésor du Second Temple (et non du Temple de Salomon détruit par Nabuchodonosor II en -586…), Héliodore, ainsi que le relate le second Livre des Maccabées (chapitre III) est flagellé par deux anges et piétiné par les sabots d’un cheval monté par un terrible cavalier revêtu d’une armure d’or.

 

Héliodore terrassé et battu de verges (détail)

Fresque d'Eugène Delacroix, église Saint-Sulpice, Paris

 

La célèbre fresque de Delacroix et l’inscription bien connue « RETIRE MOI DE LA BOVE, QUE JE N’Y RESTE PAS ENFONCE », sur la station VII du chemin de croix proche de cette œuvre d’art, ont donné naissance à l’opuscule Le Serpent rouge, célèbre apocryphe dans lequel apparaît le paragraphe suivant :

« J’étais comme les bergers du célèbre peintre POUSSIN, perplexe devant l’énigme : ‘’ET IN ARCADIA EGO…’’ ! La voix du sang allait-elle me rendre l’image d’un passé ancestral. Oui, l’éclair du génie traversa ma pensée. Je revoyais, je comprenais ! Je savais maintenant ce secret fabuleux. Et merveille, lors des sauts des quatre cavaliers, les sabots d’un cheval avaient laissées quatre empreintes sur la pierre, voilà le signe que DELACROIX avait donné dans l’un des trois tableaux de la chapelle des Anges. Voilà la septième sentence qu’une main avait tracée : RETIRE MOI DE LA BOUE, QUE JE N’Y RESTE PAS ENFONCÉ. Deux fois IS, embaumeuse et embaumée, vase miracle de l’éternelle Dame Blanche des Légendes. »

 

Station VII du chemin de croix de l'église Saint-Sulpice à Paris

 

Un sabot, un saut vers le futur

Ces énigmatiques phrases dont l’origine est connue, comportent leur part de mystère. Il paraît évident de penser que les sabots du cheval céleste dont l’empreinte se retrouve symboliquement sur la pierre, ont martelé, non pas un, mais plusieurs lieux uniques des plus secrets. Les Monts du Pilat peuvent prétendre avoir été martelés par l’un des sabots de la céleste cabale. L’un des quatre cavaliers surgit de l’Apocalypse de Jean, remonte symboliquement, pouvons-nous le penser, le cours du Dorlay (du Gier) jusqu’à sa source. Son cheval, les traditions l’affirment, sait découvrir les sources, sources virginales qui donneront naissance au fleuve de Vie. La tradition hermétique donne à ces sources le nom de « Fontaine Indécente ». Nous en découvrons une dans le Songe de Poliphile :

 

Fontaine Indécente - Songe de Poliphile

 

Un caisson du plafond de l’Hôtel Lallemant de Bourges nous offre une représentation de la « Fontaine Indécente » : un angelot féminin urine dans un sabot. Il convient de relire sur le Sujet Fulcanelli…

 

Fontaine Indécente - Hôtel Lallemant de Bourges

 

Évoquer le saut lorsque l’on remonte le cours du Gier, c’est immanquablement rencontrer le Saut du Gier et ses mystérieuses légendes. Quant au sabot, il nous renvoie, suivant Fulcanelli à cette Cabale d’origine grecque, donc une Cabale native ou tout au moins, proche du 3e Empire : la Grèce… La Cabale ou Cavale est autre, mais assurément complémentaire, de la Kabbale hébraïque. Le Cabalier, maître de la Cabale phonétique (Cabalos : cheval) chevauche les mots comme le cavalier chevauche son cheval.

Patrick Berlier  dans son Guide du Pilat et du Jarez N° 3 Entre Gier et Dorlay, entraîne le lecteur vers cet hermétique SABOT du Pilat situé non loin du « pittoresque hameau de Luzernod, qui domine la haute vallée du Gier » et dont l’étymologie « dérive de l’ancien français ‘’luiserne’’ qui signifie ‘’flambeau – lanterne’’ et plus généralement ‘’lumière – lueur’’. »

Patrick poursuit : « Au sud du hameau, près du lieu-dit ‘Le Pissord’’ se dresse la ‘Croix du Sabot’’. Il s’agit en fait d’un menhir, sur lequel a été plantée une croix de fer. »

Bien que la Sagesse populaire, qui nomma ces deux lieux, n’ait pu s’inspirer de l’œuvre de Fulcanelli l’hermétiste, elle le précède assurément !

« Ce mégalithe, poursuit Patrick, est de petite taille, 1,50 m environ, et vu sous un certain angle, il ressemble à l’allure générale des statues de l’île de Pâques, dont le visage serait tourné vers le soleil couchant. »

 

Le menhir de la Croix du Sabot

(dessin de Patrick Berlier)

 

Les derniers commentaires de notre ami approchent étrangement, mais faut-il s’en étonner, les travaux de Fulcanelli :

« Le nom de Sabot, en ancien français, signifie ‘’toupie’’. Il y a peut-être ici un rapport avec la légende des pierres qui tournent, dont nous avons deux exemples dans le Forez : la ‘’Pierre qui vire’’, près de Champdieu – et la ‘’Pierre à trois tours’’ près de Pouilly-les-Feurs. Mais aucune légende n’existe pour le menhir de la ‘’croix du Sabot’’, qui est d’ailleurs très peu connu.

« Il faut signaler aussi qu’une tradition populaire assure que les fées du Pilat filent en tenant sur leur tête d’énormes rochers, ou en utilisant comme quenouilles des menhirs effilés, qu’elles font tourner à toute vitesse entre leurs mains. »

Ces phrases aux propos hermétiques ont été publiées en 1985. Le menhir est pouvons-nous le penser, un peu plus connu aujourd’hui, mais son histoire reste toujours une énigme. Patrick choisit assurément le bon chemin, lorsqu’il oriente le lecteur vers le sabot / toupie. Fulcanelli une fois encore nous présente la solution. Le caisson représentant l’angelot urinant (pissant… pissord) dans un sabot d’adulte, se voit associé dans les commentaires avec cet autre caisson du même plafond de Bourges :

 

L’ange fait tourner sa toupie ou tourniquet à noix

 

Pierre Bruegel dans son tableau « Le jeu des enfants » daté de1560 (Kunsthistoriches Museum, Vienne) représente quelques 90 jeux parmi lesquels se distingue cette singulière toupie non pas sommée d’une, mais de trois croix. (voir http://hermetism.free.fr/Hotel_Lallemant_enigme_du_plafond.htm) La toupie du caisson de Bourges qui n’est pas sans rappeler le menhir de la Croix du Sabot, nous rappelle également dans les Monts du Pilat, la présence de l’ordre des Chartreux dont le blason attesté dès le XIIIe siècle, présente un globe surmonté d’une croix entourée de sept étoiles.

Ceux qui savent ou les Gardiens de la Porte prolongeraient au travers de la mission qui est la leur, une mission précédemment portée par les Chevaliers de l’Ordre du Temple du Pilat et par les Chartreux de Sainte-Croix-en-Jarez.

 

De la Grange à la chute de la statue du roi Nabuchodonosor : ou le Mystère Lai ?

La mission de cet Ordre Gardien de la Porte apparaît comme le reflet, voire le prolongement, de la mission dont fut chargé le prophète Ézéchiel sous la direction de l’Ange au cordeau. Cette mission s’affirme tout au long des siècles dans le déroulement prophétique du Songe du roi Nabuchodonosor commentée par le prophète Daniel :

« Tu regardais, jusqu’à ce qu’une pierre fut détachée, non par une main, et frappa la statue à ses pieds de fer et d’argile, et les brisa. Alors furent brisés en même temps le fer, l’argile, l’airain, l’argent et l’or, et ils devinrent comme la balle qui s’élève de l’aire en été, et le vent les emporta sans qu’on en trouve aucune trace ; et la pierre qui avait frappé la statue devint une grande montagne et remplit toute la terre. » Livre de Daniel, chapitre 2, versets 34 et 35.

« Dans le temps de ces rois, le Dieu du ciel suscitera un royaume qui ne sera jamais détruit, et dont la domination ne sera point abandonnée à un autre peuple ; il brisera et anéantira tous ces royaumes-là, et lui-même subsistera à jamais, selon que tu as vu qu'une pierre a été détachée de la montagne, non par une main, et qu'elle a brisé le fer, l'airain, l'argile, l'argent et l'or. Le grand Dieu a fait connaître au roi ce qui arrivera dans la suite; le songe est véritable et sa signification certaine. » Livre de Daniel, chapitre 2, versets 43 à 45. Traduction Bible Chanoine Crampon.

Au chapitre 3 nous apprenons que le roi Nabuchodonosor fit une statue d’or haute de 60 coudées et large de 6 coudées. Les commentateurs ont affirmé qu’il la fit à son effigie. Il la dressa dans la vallée de Dura (prononcer Doura) dans la province de Babylone. Puis obligea ses sujets à se prosterner devant la statue.

Le nom araméen Doura (de Dour : demeurer, empiler) signifie « demeurant, circuit, muraille ». Ce même mot prononcé Dor, signifie « génération, cycle ». Nous évoquerons dans le dossier consacré au souterrain de Trèves, la symbolique des 1000 générations

Le bénédictin Augustin Calmet (1672/1757) dans son Commentaire littéral sur tous les livres de l’Ancien et du Nouveau Testament, T. 6, après avoir mentionné les différentes prononciations de ce site babylonien, indiquait : « Les Septante traduisent par un enclos, un circuit, comme s’ils vouloient marquer la forme des anciens Temples des Perses, qui n’étoient que de grandes cours environnées de murailles, au milieu desquelles étoit un autel, où l’on entreposoit un feu perpétuel. L’auteur de l’Histoire Scolatique soutient que Dura est un nom de fleuve dans la Babylonie ; mais nous douterons jusqu’à ce qu’il produise pour lui quelque bon Géographe. »

Au travers de la Doura babylonienne où le roi érigea sa statue, nous retrouvons un nom dont la phonétique apparaît comme précurseur de notre Dor-Lay. « DOR », la Porte en ancien français, ne fut-elle pas à sa façon, un temple ? Non pas un temple païen mais un temple chrétien, possiblement précédé par un temple druidique.

Dorlay, ancien nom du Gier, signifie, suivant N. Gardon : « Près de la Porte ». Ce rapprochement établi entre l’ancien-français Dor, la « Porte », et l’araméen ou chaldéen Dura ou Doura, désignant un temple circulaire, permet un rapprochement entre le mot Lay (lez, lès = « près de », latin Latus), avec l’araméen Levath : « près de », mot qui s’appuie sur la racine Lavah (hébreu Lévi) « s’attacher à », « celui qui est attaché à », soit le Lévite ou prêtre du Temple dans la Jérusalem biblique…

Mais le Dor-lay dans sa lecture en ancien français, comporte assurément quelque jeu de mots. La toponymie et l’anthroponymie conjuguent à elles seules une bonne dizaine de types de Lais, montagnard, maritime, aquifère, forestiers et autres.  L’écriture Lay ou Lai, au travers de l’araméen Lavah, n’est pas sans évoquer l’adjectif lai, (laïque, séculier) que l’on retrouve notamment dans la fonction médiévale de Frère lai, soit le Frère convers, ainsi que dans l’expression  Conseil des lais. Apparus au début de l’an 1000, les Frères lais travaillaient pour les moines et vivaient majoritairement dans les granges situées à une journée de marche maximum.

Présents dans les grands ordres religieux, ils œuvraient vêtus d’une pèlerine à capuchon et portaient une longue barbe, d’où leur surnom de Frères barbus. La Chartreuse de Sainte-Croix-en-Jarez devait utiliser, comme les autres Chartreuses, les services de ceux que les Cartusiens nommaient en français : les Barbons, soit les Barbus et en latin : les Cathusiani Laici Barbati. (Nuevo diccionario de las lenguas española, francesa y Latina) – 1769 - books.google

Aux sources du Gier – l’antique Dorlay – les Barbons Cartusiens ou Barbons Lais, ne furent peut-être pas étrangers à la Grange du Pilat, connue de nos jours sous le nom de Jasserie. Patrick Berlier dans le Guide du Pilat et du Jarez N°9 (Action graphique éditions), nous apprend : « Une tradition assure que la ‘’Jasserie’’ doit son existence aux Chartreux. Vers l’an 1500, les moines de Sainte-Croix qui herborisaient sur les cimes du Pilat auraient construit en ce lieu une chapelle, puis une grange pour entasser leurs provisions de plantes médicinales. Aucun document cependant ne vient confirmer cette belle histoire. »

Dans ses commentaires relatifs à l’article de Jean Combe Une journée à la chartreuse de Sainte-Croix en 1621, publié en 1934 dans La Région illustrée, Patrick Berlier notait : « Pour engranger leurs récoltes, les Chartreux disposaient aussi, sans la posséder formellement, de la grange de la Jasserie, au pied du Crêt de la Perdrix. » https://www.forez-info.com/encyclopedie/histoire/173-a-propos-dune-journee-a-ste-croix-notes-de-mr-berlier.html

Michel Achard dans Le Bessat de A à Z : petit dictionnaire géographique et historique du Bessat et de ses environs écrit : « On a prétendu, sans la moindre preuve, qu'elle avait été construite au 15e siècle par les Chartreux de Sainte-Croix-en-Jarez. En réalité, on la découvre à partir de 1676 comme la ‘’Grange de Pilat’’, propriété des Marquis de Saint-Chamond. »

 

La Jasserie aujourd'hui

 

Il apparaît tout de même intéressant de découvrir que cette Grange de Pilat, bien qu’appartenant aux seigneurs de Saint-Chamond suivant les actes de propriété de cette importante famille, fut aussi – peut-être par cette même famille – mise à disposition des Chartreux de Sainte-Croix-en-Jarez.

Mais les Chartreux, si l’on accepte l’hypothèse d’une présence Laye ou Laie à la Grange, auraient eu d’autres devanciers en ces lieux, eux-mêmes, détenteurs, peut-être, d’une même mission… Les Frères Lais qui géraient peut-être les intérêts agricoles des Chartreux à la Jasserie, occupaient pourrions-nous le penser, déjà les lieux avant même la présence de l’Ordre Cartusien à Sainte-Croix-en-Jarez. Il se peut que cette présence laie à la Grange du Pilat, fut d’une nature autre que celle habituellement reconnue aux Frères Barbons.

La notion de lai ou Lay  existait déjà antérieurement à l’an 1000 et donc aux Frères Lais. Ce titre de Lai ou Lay semble s’être pérennisé en Bretagne dans le nom de famille Le Lay et ses variantes, assez fréquent dans le Finistère.

Bien que les avis soient partagés dans le domaine, il est admis que ce mot apparaisse dans les noms propres de vieux-breton : Killae (l’Église lai) ou Conlay (le saint Guerrier lai). Nous retrouvons dans les îles Britanniques une catégorie de Lay : en anglais le Lay Abbot ou l’Abbé Lay.

En 1913,  Johann Peter Kirsch, docteur en théologie et historien Luxembourgeois, publie dans la Catholic Encyclopedia, volume 9, une étude faisant autorité dans le domaine : « Lay Abbot », sous-titré : « (abbatocomes, abbas laicus, abbas miles). » L’Abbé Lay est ainsi décrit : « A name used to designate a layman on whom a king or someone in authority bestowed an abbey as a reward for services rendered », soit si l’on s’en tient à la traduction française de Google : « Un nom utilisé pour désigner un laïque à qui un roi ou une personne en autorité a accordé une abbaye en récompense de services rendus ». L’auteur de cette étude considérait cette coutume comme funeste.

De nombreux synodes dans le futur royaume de France, aux VIe et VIIe siècles ont adopté des décrets contre ces abus. Les Mérovingiens avaient octroyé des terres d'église à des laïcs. Bien qu’ils n’en fussent pas les propriétaires, il leur était  permis de les utiliser. Les rois mérovingiens avaient ainsi l'habitude de nommer des abbés aux monastères qu'ils avaient fondés ; de plus, de nombreux monastères, bien que non fondés par le roi, se sont placés sous le patronage royal afin de partager sa protection et sont ainsi devenus des biens de la Couronne. Mais c’est à partir de Charles Martel véritablement, que va se généraliser avec les Carolingiens, l’attribution de biens ecclésiastiques, ainsi que des abbayes, au régime féodal.

Au Moyen Âge se développeront notamment dans le Nord des Pyrénées, des abbayes laïques dont l’abbé fondateur était un seigneur, voir un gros paysan. Selon les thèses de l’historien du Béarn, Pierre Marca (1574-1662), ces fondations seraient consécutives de l'empire carolingien, lorsque l'islam se rapprochait des Pyrénées.

Il y eut un Abbé Lay d’importance, il s’agit de l’Écossais Cronan, Crinan ou Crínán Dunkeld of Scotland, né vers 980 à Atholl et mort à Perthshire en 1045.

 

WikiTree - Crinan (Dunkeld) d'Ecosse

 

Cronan, ‘’Abbé de Dunkeld’’. Bien que portant cette désignation, il n'était pas un ecclésiastique, mais en réalité un grand chef séculier, occupant une position de pouvoir et d'influence non inférieure à celle des Mormaers natifs (souverains régionaux ou provinciaux dans le royaume des Scots médiévaux). L’incidence des invasions incessantes et des harcèlements proférés, dirigés principalement contre les établissements ecclésiastiques, avait eu pour effet de désorganiser l’Église chrétienne dans une large mesure et d’atténuer le pouvoir et la sanction qui avaient présidé à la constitution et à la vie de son clergé. Ils sont devenus laïcs dans leur vie et leurs habitudes, se sont mariés et ont eu des enfants qui ont hérité de leurs biens. » WikiTree : Crinan (Dunkeld) d'Ecosse (vers 980 - 1045) 

Crínán était probablement le fils ou le petit-fils de l'abbé laïc Duncan qui fut tué au combat en 965, et à qui l'abbatiale laïque de Dunkeld était devenue héréditaire. Æthelred le petit-fils de Crínán avait encore le titre d’abbé héréditaire (coarb en gaélique). Crínán était l'un des seigneurs temporaux les plus riches et les plus puissants de l'Écosse. Les terres appartenant à l'Abbatie de Dunkeld étaient vastes et fertiles et leur valeur était encore renforcée par leur position au centre du royaume. Crínán était le ‘’prince-abbé’’ d'Écosse, son grand prédécesseur, saint Columba, ayant été le prêtre-abbé du même pays.

Le site WikiTree présente ce « prince-abbé » comme :

« Ancêtre des derniers rois et reines d’Écosse.

« Chef de l'Église celtique, formé à l'Abbacy of Dull instituée par Adamnan, successeur de Saint Columba à Iona.

L’Abbaye de Dunkeld était une abbaye de moines Kuldées. Crínán est présenté comme le Chef de l'Église celtique, ce qui convenons-en n’est pas rien !

Le prénom gaélique Crónan ou Crínán vient de crón qui désigne la couleur de l’épice du safran et s’applique à un homme ayant la peau sombre, comme pouvaient l’avoir les Pictes qui occupaient l’Écosse avant la venue des Scots depuis l’Irlande. Mais il convient de le rapprocher également du gaélique Crón ou Corann : la « couronne », mot proche de cet autre mot gaélique Crom : « courbe » que l’on retrouve dans Cromlech tirant son origine du vieux gallois « Crwm llech » : « pierre plate courbée ».

Ce mot celtique nous mène aux Kuldées ou Kuldéens qui se disaient disciples de saint Colomba et dont Crínán est présenté comme le successeur. Patrice Genty (Études sur le Celtisme – éditions Traditionnelles) indique : « Les premières abbayes galliques ne ressemblaient en rien aux monastères romains, il serait plus juste d’appeler ces communautés ‘’villages monastiques’’. D’après la légende, ils avaient un enseignement secret basé sur un livre envoyé  du ciel. Pour P. Genty, ce livre serait la « Parole vivante de Dieu le Graduel (Gradal) écrit par Jésus. » Cette « Parole vivante de Dieu » ne faisait qu’un avec le Saint Graal, la coupe… au sujet duquel l’auteur indique dans une note : « C’est le Crom-Leach, la pierre courbe. »

Autrement-dit, le Crom-Leach des Kuldées – le Graal – fait corps, dans la représentation kuldéenne, avec le Graduel : « … le Graal est aussi un (livre) : Graduale, liber gradalis. C’est le livre envoyé du ciel aux Kuldées, la ‘’Parole retrouvée’’, livre écrit par Jésus, lui-même et contenant tous les mystères divins. La primitive église celtique possédant cet écrit : Gradal, Graduel, livre à chanter (Du Ganges) et nous retrouvons encore les ‘’chanteurs’’. »

L’auteur fait ici allusion aux Neuf Bardes dont le chant s’élevait devant les neuf chaînes auxquelles était suspendu le chaudron qui précéda chez les Celtes, le vase graalique.

Les Kuldées, Druides convertis suivant la tradition par saint André missionné par saint Jean, puis rapidement rejoint par Joseph d’Arimathie et Nicodème. Ils « formaient la tête de l’organisation chez les Celtes. » et c’est à eux que fut confié le Saint-Graal dont ils furent les premiers gardiens. « Persécutés par les moines saxons inféodés à Rome, ils l‘emportèrent avec eux jusqu’à la ‘’Maison de Cristal’’ de Bardsey, dans l’île du même nom. »

« Mais le ‘’vase mystique’’ qui pouvait nourrir le monde entier, était en danger d’être profané, ses gardiens allaient être anéantis. Alors Merlin, entrât dans la ‘’Maison de Cristal’’ et repartit emportant avec lui le vase sacré : À nouveau la parole était perdue. »

 

Image d'un ensemble de 8 volumes extra-illustrés de A tour in Wales de Thomas Pennant (1726-1798), relatant les trois voyages qu'il a effectués dans le pays de Galles entre 1773 et 1776. Cette édition a été produite en 1781. Les volumes comprennent un certain nombre de dessins originaux de Moses Griffiths, Ingleby et d’autres artistes de renom de la période.

https://commons.wikimedia.org/wiki/Category:Bardsey_Island?uselang=fr#/media/File:View_of_Bardsey_by_Moses_Griffith.jpg

 

Le barde Merlin, dans son Palais de Verre ou Maison de Cristal, s’y serait enfermé dans un sommeil profond avec les treize trésors de Grande Bretagne : un chaudron, une lance, une charrue etc., pour les protéger du monde et les ressortir au moment opportun.

L’ile de Bardsey (Bardicia ou île des Bardes) dite aussi île d’Enlli, ou bien encore, l’île des 20 000 Saints, apparaît comme le royaume du Brenin Enlli (anglais : King of Enlli),  ainsi que pouvaient le découvrir en 1910 les lecteurs de L’intermédiaire des chercheurs et des curieux (ICC) - volume 62 – N°1261 (Gallica) :

« Le royaume de l’Ile de Bardsey.

« – Les rois d’Angleterre ont paraît-il un collègue dans la personne du roi de l’île de Bardsey, situé à environ 3 kilomètres dans la péninsule Llion, conté de Carnavon, pays de Galles. Ce petit royaume serait absolument indépendant et ne reconnaît pas l’autorité de roi de la Grande-Bretagne. – Il n’a que 77 habitants, y compris le roi et la reine, dont les ancêtres ont régné sur cette petite île depuis un temps immémorial. Le langage est une sorte de patois tout à fait inintelligible aux Anglais.

« Le roi, en dehors de ses attributs, est docteur, maître d’école et officier de l’État-civil ; il ne doit aucune obéissance aux lois anglaises.

« Les habitants ne paient pas d’impôts.

Et l’auteur, après avoir donné les sources de ces informations, pose la question dont il espérait obtenir quelque réponse :

De quelle époque date cette « royauté de Bardsey » ou « royauté d’Enlli » ?

 

Extrait de L'intermédiaire des chercheurs et des curieux

 

Nous découvrons sur le Net l’article « Bardsey Island » qui fit réagir les internautes. L’un d’eux s’arrête sur ceux qu’il nomme les monarques paysans. Ils régnaient sur une île appartenant au Newborough, l’une des plus anciennes familles du Pays de Galles. L’unique village de Bardsey situé côté mer d’Irlande, est donc totalement invisible depuis la terre galloise, car caché par Mynydd Enlli (la Montagne d’Enlli), haute de ses 167 mètres. Cette spécificité explique la persistance tout au long des siècles du mystère… Un mystère entretenu par l’Église Celtique, installée dans l’île jusqu’à sa dissolution au XIIIe siècle.

En 1752 l’île, propriété de la famille Wynn, entre en possession des Newboroug. Ces lords, par plaisanterie peut-être, mais surtout en tenant compte du fait que la communication avec le continent était peu fréquente et incertaine, et que les insulaires ne respectaient guère la loi du pays, élaborèrent pour ces derniers, leur propre code de règles régissant la collectivité.  Le maître de l’île présenta une couronne en laiton, un trésor en forme de cercueil ou casket d'argent et une armée afin de garder le trésor figuré sous les traits d'une effigie de soldat en bois peint. C’est ainsi que les rois se succédèrent jusqu’au moment où  les idées démocratiques modernes changèrent le titre de roi en président.

http://www.mysteriousbritain.co.uk/ancient-sites/bardsey-island/

Lire aussi sur le sujet l’article « King of Enlli ». https://www.bardsey.org/kingofbardsey

 

Le roi John Williams II portant sa couronne en 1899

 

Cette monarchie que l’on pourrait qualifiée d’opérette s’affirmait en une symbolique dont le romantisme à souhait, se retrouvait dans les fêtes organisées dans l’île par Lord Newborough et son épouse. Sur cette île dont le pourtour vu du ciel, n’est pas sans rappeler une certaine île lupinienne, une grotte servirait d’abri  au Pryten (la Bretagne…) navire du roi Arthur.

Nous découvrons sur le Net l’ouvrage numérique de W. Winwood Reade Le voile d’Isis ou Les mystères des druides, dans lequel l’auteur consacre quelques lignes aux bardes ainsi qu’à leur tenue vestimentaire : « Leurs vêtements étaient d’ordinaire marron, mais lors des cérémonies religieuses, ils portaient des ornements ecclésiastiques appelés bardd-gwewll, c’est-à-dire une robe bleu azur avec un capuchon, costume porté plus tard par les moines lais de l’île de Bardsey (lieu où est enterré Merlin) et qu’ils appelèrent Cyliau Duorn, capots noirs. Puis les Gaulois l’empruntèrent et les Capucins le portent toujours. Le bleu, symbole des cieux et de l’océan, était la couleur préférée des Britons, et elle est encore utilisée comme maquillage par les Égyptiennes et les Tartares… »

Ainsi donc,  l’île de Bardsey était connue pour ses moines lais porteurs de la robe bleue azur avec capuchon. Cet élément va assurément dans le sens de cette présente étude. Il en va pareillement pour la mention des Capucins qui ne sont évoqués par l’auteur que pour affirmer l’utilisation au cours des siècles du capuchon, mais qui ont assurément leur place dans l’énigme qui nous intéresse…

Le grand Merlin aurait édifié sa « Maison de Cristal » afin dit-on, d’y finir ses jours. À la vérité les lieux où il finit ses jours, sont pluriels… En ce lieu il déposa, de tradition, le Saint-Graal, assisté de neuf compagnons bardes.

Pour plusieurs chercheurs, le Merlin qui finit ses jours dans l’île de Bardsey serait Merlin II, soit précisément Merlin le Sauvage, celui qui hantait les forêts. Le célèbre romancier Sir Walter Scott rédigea outre ses romans aujourd’hui célèbres, ses Œuvres poétiques dans lesquelles figure la ballade de Thomas le Rimeur (Publication française : Firmin Didot Frères 1835). Le romancier Écossais évoque ainsi Merlin le Sauvage : 

« Puisque je parle de prophètes, je demanderai la permission aux antiquaires d’attirer leur intention sur Merdwynn-Wyllt ou Merlin le Sauvage, auteur des prophéties écossaises, et qu’il ne faut pas confondre avec Ambroise Merlin, l’ami d’Arthur.

« Fordun nous apprend que ce personnage résidait à Drummelzier, et qu’il errait, comme un autre Nabuchodonosor parmi les bois de la Tweeddale,  en pleurant le meurtre de son neveu Waldhave, qui a publié un livre de prophéties […].

Cet « autre Nabuchodonosor », Merlin le Sauvage que la symbolique merlinesque confond sans difficulté avec le premier Merlin, apparaît après les mystères de l’île de Bardsey, comme un nouvel élément permettant de nous en retourner dans les Monts du Pilat où nous retrouvons notamment la Pierre qui chante (pensons aux chants des Bardes autour du Cromlech…) aux Roches de Marlin ou de Merlin mais aussi, et ce, de manière assurément plus secrète, à la Grange du Pilat où – peut-être – quelque évêques lai ou (et) moines lais devaient œuvrer pour un avenir que des prophéties chantées par les moines Kuldées annonçaient.

L’entomologiste Étienne Mulsant dans Souvenirs du Mont Pilat et de ses environs s’attarde assez longuement à la Grange du Pilat. Il évoque la simplicité rustique de la Grange ainsi que le « nombre prodigieux de voyageurs qui y ont afflué, à voir les noms charbonnés ou crayonnés sur les murs ou sur les  armoiries des chambres de ce logis ». Lorsque l’on vient de lire les propos peu reluisants utilisés par l’auteur pour décrire ce logis, il est presque curieux de lire le contenu de cette phrase. L’entomologiste poursuit : « mais en dehors des visiteurs obscurs qui ont voulu y laisser des traces de leur passage, quelques personnages plus ou moins célèbres y ont cherché un asile. » 

Étienne Mulsant s’attarde aussi sur les sources du Gier dont le nom ancien, rappelons-le, aurait-été suivant Noël Gardon, le Dorlay… : « La principale de celles-ci est peu éloignée des bâtiments. Elle constituait autrefois, à ce qui paraît, une sorte de gouffre appelé puits de Pilate, aujourd’hui comblé par les débris de rochers et de matériaux divers. »

 

Le Puits de Pilate aujourd'hui

 

Une statue (?) assurément colossale, tombée, brisée au sol… peut-être aurions-nous ici quelque allusion à la statue du Songe du roi Nabuchodonosor, brisée par une pierre, la Pierre du Messie… ? Cette illustration placée par Étienne Mulsant dans son livre, si tant est qu’elle soit allusive au Songe de Nabuchodonosor, projetterait la Grange du Pilat dans un futur prophétique. Un temps où la statue sera détruite. Autrement-dit, les Quatre Royaumes – de la tête, à la bouche déformée en un rictus de douleur (?) : Babylone, et du (ou des) pied(s) : Édom ou Rome – font place au Royaume du Messie.

 

La Grange de Pilat

Gravure illustrant le livre d'Étienne Mulsant

 

Une telle statue ne fut et ne sera jamais érigée au-dessus de la Grange du Pilat. Mais la destruction de la statue apparaît, pourrions-nous le penser, comme le principal combat, l’Énigme Dorlay, poursuivi par ceux que nous nommions plus haut les Gardiens de la Porte.

 

Carte ancienne : le Saut du Gier à Saint-Chamond

et cantique inspiré par la Vision d’Ézéchiel

 

 


Voux l'attendez toutes et tous, il est maintenant temps de retrouver notre nouvel invité









     Maurice Declerck est un Homme très engagé, au service de causes nobles. Retraité, il s'emploi à faire avancer ses combats régulièrement liés à la nature ; l'Eau y occupant une place de choix.  C'est un vrai plaisir que de se plonger dans son univers qui pour bonne partie prend corps dans le Pilat rhodanien. Généreux, déterminé et courageux, il est la parfaite définition du bénévole, celui qui travaille sans compter son temps, inlassablement et discrètement pour autrui. C'est lors d'un entretien particulièrement chaleureux que nous l'avons rencontré. Maintenant nous vous proposons de faire connaissance avec cet Homme bon.






1/ Les Regards du Pilat : Bonjour Maurice. A votre contact on se rend vite compte, que l’on se trouve en présence d’un homme pour qui les nobles causes ne sont pas des vains mots. Quand est né chez vous ce goût pour la lutte au service des biens communs de l’humanité ?

Maurice Declerck : Les causes que je défends m’ont, en fait, toujours paru évidentes, naturelles. Petit, je me suis toujours senti proche de la nature. Je résidais à Montfaucon (43) et mon père, de par son métier s’est retrouvé à devoir amener l’eau dans cette ville. Je me revois, en sa compagnie, en train d’arpenter les forêts à la recherche d’eau, de sources. C’était l’époque de la construction des adductions d’eau et de châteaux d’eau. A l’époque la ressource était abondante et de qualité il fallait seulement aller la chercher.

2/ Les Regards du Pilat : L’Eau, sa préservation, sa pérennité et son coût, sont chers à votre cœur. Membre actif de l’Association Vayrana (http://www.vayrana.info/), pouvez-vous nous résumer les intérêts  en jeu pour que l’Eau de la Communauté de Communes du Pilat Rhodanien soit gérée par une régie publique ?

Maurice Declerck : Vayrana a deux axes essentiels dans sa raison d’être. Tout d’abord, il s’agit de préserver un patrimoine, une notion donc de nature, d’environnement. On a créé une commission patrimoine. On vient par exemple avec un petit groupe de cinq à sept personnes, de réhabiliter un ancien bassin qui a dû servir au rouissage du chanvre. Bassin situé sur une résurgence de sources ceci sur la commune de Véranne. Durant une année, à raison d’une moyenne d’une fois par semaine, nous sommes intervenus sur le terrain pour récurer ce bassin et reconstruire les murs écroulés par le temps qui passe et l’abandon de l’Homme. La source en péril auparavant est maintenant sauvée. Nous espérons que par ces gestes, le citoyen comprenne l’intérêt de la protection de cette ressource : l’eau. La notion d’énergie présente dans l’eau, retient mon attention et fait partie également de ma motivation. Je parle de la mémoire de l’eau dont pas grand monde souhaite approfondir la notion et pourtant !


Une seconde vocation, plus politique (au sens noble et premier du terme, la gestion de la cité), anime Vayrana bien que notre collectif soit complètement apolitique (au sens politicien..) j’insiste bien sur ce point. Il s’agit en l’occurrence de militer, pour permettre à notre communauté de communes de basculer en régie publique c’est-à-dire une gestion réalisée par la communauté de communes et non déléguée aux sociétés privées. Le consommateur, 8000 compteurs d’eau sur le territoire ici concerné, a tout à y gagner. Il verra alors sa facture baisser de 20 % environ. Tous les exemples de collectivités ayant fait ce choix le démontrent.  Nos élus ont demandé à un bureau d’étude de faire une étude de comparaison entre les deux modes de gestions pour le territoire de la ComCom du Pilat Rhodanien. Le rapport de cette étude montrait des coûts sensiblement identiques avec un léger avantage pour la gestion en régie. Vayrana a démontré que cette étude contrairement à la demande ne partait pas des chiffres officiels de l’existant et par conséquent, était contestable ce que Vayrana a fait. Il suffit de consulter le site http://www.vayrana.info pour avoir tous les détails des écarts montrés du doigt par Vayrana chiffres à l’appui. Les élus continuent de ne pas vouloir écouter Vayrana et choisissent la délégation de services aux sociétés privées.

3/ Les Regards du Pilat : A l’échelle de la planète, il semble malheureusement probable que l’Eau tende de plus en plus à manquer. Ici, en Pilat elle paraît couler encore abondamment. Alors justement en quoi les consommateurs d’Eau de la Communauté de Commune du Pilat Rhodanien et plus largement encore ceux du Parc Naturel Régional du Pilat ont-ils besoin d’être défendus ?

Maurice Declerck : L’eau étant une ressource naturelle et un bien commun à tous il nous parait évident de :

Garder la compétence de la ressource ainsi que de sa gestion au niveau local et contrôlé par le citoyen.

D’éviter que des sociétés privées puissent enrichir leurs actionnaires comme c’est le cas aujourd’hui en utilisant un bien commun. L’eau doit payer l’eau (le service) et rien de plus.

De plus, nous pensons que le coût du service de l’eau doit être supporté de façon équitable par chacun des citoyens ou industriel etc... C’est une question de justice sociale. Actuellement, le système de prix réparti entre une partie abonnement et un prix au M3 fait que le petit consommateur paye de six à sept fois plus cher le m3 moyen que le gros consommateur ou consommateur professionnel..  Il y a des disparités notables dans le prix de l’eau qui ne reposent pas sur des raisons valables, selon moi. Nous recherchons au travers de cette régie publique, à apporter une meilleure gestion, une meilleure rentabilité, une meilleure justice sociale.

Nos concitoyens doivent commencer à prendre conscience que de manière générale l’eau s’épuise progressivement. Par exemple sur le Pilat, les ruisseaux ne peuvent plus donner ce qu’ils donnaient jadis. L’ancien Moulinage Baroux à St Jacques d’Atticieux pouvait jadis fonctionner neuf mois par an avec l’eau de la  Limonne ; si on devait l’utiliser à présent ce serait seulement trois mois ! Il y a deux raisons à cela. D’abord et surtout, on utilise beaucoup plus d’eau qu’avant, on pioche toujours plus dans la réserve. Enfin et il faut le prendre au sérieux, les changements climatiques (réchauffements) portent atteinte aux réserves d’eau disponibles toujours de moins en moins importantes.

Il faut également se sortir de l’idée que le fait de notre proximité du Rhône sa nappe phréatique est inépuisable. Nombre d’exemples dans le monde ont démontré que nous pouvons anéantir de grands fleuves juste par utilisation de son eau pour le public, l’agriculture, l’industrie etc.   ??

4/ Les Regards du Pilat : Chez vous, la Nature s’avère une passion. Vous œuvrez au sein de l’Association du Colibri (http://www.cpnlecolibri.fr/) pour une meilleure connaissance de la Nature et pour sa protection. Cette Association dynamique rencontre une forte adhésion auprès de la population pilatoise. Comment faites-vous pour rassembler de plus en plus de personnes sur ces chemins de la connaissance et de la protection de la Nature ?

Maurice Declerck : Je ne suis pas un naturaliste mais j’ai des sensibilités fortes, certaines, pour la nature. J’éprouve un grand respect pour le monde du vivant que ce soit les végétaux, les insectes, les oiseaux, les poissons ou les mammifères etc.  .. . Je n’ai pas peur de dire que quelques part ce sont les égaux des Hommes et ils paient un lourd tribut du fait de nos activités. Je pense bien évidemment à la perte des oiseaux, des insectes, récemment mis en évidence dans les médias. Le succès de l’Association Colibri provient peut-être de vouloir parler de la nature proche de nous. Nous l’avons fait en théorie par des conférences et en pratique par des actions sur le terrain avec les citoyens ou les professionnels comme les agriculteurs. Nous avons toujours sélectionné les conférenciers en fonction de nos motivations et de leurs compétences ; nous avons également  réussi à inviter des têtes d’affiche si je puis dire, comme : Francis Halé, Marc Dufumier, Benoit Reeves etc. Ainsi, lorsque nous avons pris pour thème, la maladie de Lyme, nous avons accueilli quelques 400 personnes à cette conférence réalisée par le professeur Péronne, le premier spécialiste de cette maladie en France. Il n’est pas rare que plus de 100 personnes se déplacent pour venir écouter nos conférenciers. C’est une activité forte du CPN le Colibri mais l’Association c’est aussi des actions plus ponctuelles et ambitieuses. Par exemple, nous avons réussi à rassembler des budgets conséquents (+ de 2 x10K€) pour les tours à Hirondelles de Roisey et de Saint-Pierre de Bœuf, une nouvelle fois en nous donnant les moyens,  par une implication forte des adhérents et la capacité de trouver les sponsors qui ont bien voulu soutenir nos projets.

5/ Les Regards du Pilat : Les travaux mégalithiques d’Éric Charpentier et de Thomas de Charentenay autour de la Pierre des Trois Evêques dans le Haut Pilat ne vous ont pas laissé indifférent. Etes-vous comme à la recherche de savoirs perdus des Anciens et ce toujours en lien avec la Nature ?

Maurice Declerck : Oui, je suis convaincu que des savoirs perdus des anciens existent. La nature tourne autour du temps. On a beaucoup à apprendre à mon sens de ce passé. Même si on ne sait pas tout expliquer cela m’intéresse. Ces gens d’avant étaient indéniablement proches de la nature. Il y a encore avec cette nature régulièrement une notion d’eau, avec les énergies. Je pense, que les mégalithiques ont un lien avec la nature et même les astres. Éric met en évidence des règles de construction. De notre côté, avec une petite équipe on se rend sur des sites. J’apprécie ces petits débats sur les lieux mêmes des découvertes mégalithiques. Là, on se rend chroniquement compte que les astres et le cosmos semblent inhérents aux constructions mégalithiques. Je citerai pour exemple le menhir du Flat sur la commune de Colombier (42). Le viseur, bien connu, qui passe entre autres, par le sommet du menhir pointe précisément le 21 mars, à l’équinoxe, directement sur la constellation d’Orion. Cette constellation se retrouve, en outre, sur d’autres constructions, à Doizieux en l’occurrence et peut-être même aux Roches de Marlin en englobant la Pierre qui Chante.

6/ Les Regards du Pilat : L’époque mégalithique et les nombreux mégalithes du Massif du Pilat retiennent toute votre attention. Pouvez-vous nous parler de ce projet d’inventorier puis de répertorier sur une carte tous les sites connus à ce jour ?

Maurice Declerck : Oui, je répertorie patiemment tous les sites mégalithiques que je connais et visite sur des cartes conservées sur PC. Je prends régulièrement des mesures précises sur place. Ces cartes, en réalité doublées de photos et de commentaires, permettent d’humbles analyses. Il est, par exemple, intéressant de se retrouver avec plusieurs Tumulus dans un secteur au périmètre restreint. Les interprétations demeurent hasardeuses c’est pourquoi souvent on se garde d’en faire, mais inventorier c’est aussi préserver. Cette préservation systématique n’existe pas au sein du Parc Naturel Régional du Pilat et malheureusement des sites mégalithiques disparaissent sous des constructions ou des coupes de bois avec engins modernes.

7/ Les Regards du Pilat : Nos lointains ancêtres ont depuis des lustres été intéressés par ce qui se passait dans le ciel. C’est donc aussi votre cas ; l’Astronomie demeure l’un de vos centres d’intérêt. Qu’est-ce qui vous attire spécialement dans cette science plutôt élitiste ?

Maurice Declerck : Je ne reviens pas sur les liens que j’ai évoqués envisageant que les Hommes des temps passés établissaient des observations du ciel qui se retrouvaient dans diverses constructions mégalithiques. Certes c’est une hypothèse mais c’est aussi la mienne. Par contre, il est vrai que je fais partie d’un petit club qui observe les Astres ; ce sont là mes occupations de la nuit. Nous sommes particulièrement actifs sur Annonay avec quatre télescopes traditionnels. Et nous sommes, dans l’attente d’un tout nouveau matériel permettant de voir les galaxies en couleur. En ce qui concerne l’Astronomie je suis particulièrement sensible dans le partage que l’on peut en faire avec les enfants. J’y reviendrai plus loin.

8/ Les Regards du Pilat : Membre ou sympathisant auprès de nombreuses associations, vous prêtez volontiers vos compétences informatiques pour créer voire gérer leur site Internet respectif. Au-delà de prédispositions pour la convivialité, l’informatique est-elle aussi une passion ?

Maurice Declerck : Lorsque j’avais 18 ans l’informatique commençait à germer, c’était les prémices. J’ai eu la chance de pouvoir à l’âge de 18 ans entrer dans une école d’un constructeur américain de gros calculateurs scientifiques. On peut dire que je suis tombé dedans petit et n’en suis pas ressorti. Aujourd’hui, je peux donc continuer au sein des associations à côtoyer mon ancien métier.

9/ Les Regards du Pilat : On aurait pu s’arrêter là quant à vos nombreuses implications citoyennes et pourtant l’inventaire aurait été incomplet. Est-il exact que vous encouragez le tri sélectif du plastique auprès des écoles et si c’est bien le cas pouvez-vous nous en parler un peu ?

Maurice Declerck : C’est une autre de mes activités bénévoles, bénévole comme toutes les autres évidemment. Ce projet me tient aussi beaucoup à cœur. Je le fais dans le cadre du CPN le Colibri puisque c’est également un petit geste de plus de protection de l’environnement.

Nous collectons dans 200 points divers objets. Afin d’être plus précis, en voici la liste : Capsules de café de la marque Tassimo « T Disc » et leur emballage aluminium, Outils d’écriture (Stylo, Feutre, marqueur, correcteur, etc ..) toutes marques, Bâtons de colle toutes marques, Sachets de viennoiseries, pain de mie, pain spéciaux.. toutes marques, bouchons en plastique, tous types et enfin bouchons de lièges vin, champagne etc. C’est également promouvoir un comportement éco responsable, éco solidaire. Ces matières premières sont ensuite recyclées. Le plastique récolté, permet de fabriquer d’autres objets en plastique comme par exemple du mobilier d’extérieur, des arrosoirs etc .. . Le fruit de ces ventes est reversé directement au profit de deux Associations, La Myopathie à Tout Cœur (Accompagnement des malades Myopathes de la Loire) et Coeur2Bouchons (Participation financière à l’achat de fauteuil pour personne à mobilité réduite)



 

Si nous voulons faire changer nos habitudes et nos comportements vis-à-vis de la nature et de la personne en situation de handicap il me semble important et un devoir de sensibiliser, là encore, les enfants. Nous avons donc mis en place un programme d’animation à destination des écoles élémentaires et collèges qui permet, de présenter l’impact du plastique sur la biodiversité et nos océans et d’aborder le sens de la solidarité entre nous tous. Cette activité représente beaucoup de travail mais j’aime m’y consacrer et cela donne du sens à ma vie.

10/ Les Regards du Pilat : Nous allons terminer cet entretien riche avec un sujet qui a divisé les Pilatois : les éoliennes industrielles. Finalement, le Préfet a tranché, il y aura bien des éoliennes industrielles dans le Parc Naturel Régional du Pilat. Effectivement, pour commencer, il a été donné l’autorisation d’implanter 10 éoliennes réparties sur les deux communes de Burdignes et Saint Sauveur en Rue, précisément sur les Crêts de la Forêt de Taillard. Est-ce selon vous une bonne décision ?

Maurice Declerck : Voilà un sujet où je n’ai pas un point de vue arrêté. Il est évident que l’homme moderne a besoin d’énergie électrique. Toutes les solutions en notre pouvoir apportent leur réponse, mais avec leur inconvénient et leur pollution. Ce qui m’énerve c’est que l’on met toujours en avant les avantages et l’on présente moins les inconvénients, les pollutions et les coûts de démantèlement par exemple. J’aurais envie de dire de ne pas se laisser diriger par le pouvoir et l’argent,  mais que la sagesse et la conscience collective doivent prendre le dessus (si ces mots ont encore du sens). Que souhaitons-nous pour le futur de nos enfants ? C’est un problème complexe et une décision collective s’impose….

Les Regards du Pilat : Un très grand Merci à vous Maurice pour l'ensemble de vos réponses.




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