REPORTAGE REGARDS DU PILAT
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AVRIL 2008

FARNAY TERRE A CUPULES
(la seconde partie)
Egarande, Frontière entre la Gaule chevelue
des Ségusiaves et le pays des Allobroges ?





Par Rémy Robert, pertinent chercheur pilatois,
qui maitrise de très nombreuses données, en rapport notamment à ce territoire de Farnay

A l’Est du bourg de Farnay se trouve un vallon qui s’étend depuis la ville de Rive-de-Gier jusqu’au hameau de Ban. Il est nommé par les habitants du village « la vallée d’Egarande ».

     Egarande est également le nom du ruisseau qui prend sa source juste au-dessous de Ban (au lieu-dit  la font du but), s’écoule dans ce vallon et se jette dans le Gier au niveau d’un faubourg portant lui aussi le nom d’Egarande.




Vallée d’Egarande



Chemin d'accès au lieu dit Egarande

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EQORANDA

Pour les anciens du « pays », Egarande est un lieu où l’on s’égare…. mais ce toponyme semble tout droit issu d’EQO-randa terme gaulois désignant les limites. Il est composé d’Equo (eau lié à ek et aqua et aequs qui signifie juste, égale) et du gaulois Randa qui signifie limite. Nous avons donc ici une « juste limite par l’eau ». On note que ce terme peut aussi se confondre avec « RAND » (rocher tas de pierre).

Ferdinand Lot dans « la Gaule romaine » (ed Fayard Paris 1947) nous apprend dans son chapitre « Noms de lieux Préromains » (page 246) que les Eygarande, Aygarande, Egarande…sont à la limite de deux civitates ou de deux pagi.

On trouve également Egarande, Ysgarande (1390) comme limite sur l’Andrable des Vellaves et des Ségusiaves.

En ce qui concerne la petite vallée en deçà de Farnay on retrouve au fil du temps : Ropperia Desgarande (terr Doizieux 1359), Rivus de Ysgarande (1370), rivus de Esgaranda (1389) rivus de egaranda (1405) mais aussi Egueranda, Esgarande, Aygarande.

Une sombre petite vallée encaissée

Egarande est de nos jours une vallée où la nature a repris ses droits. Le lieu est désert une véritable petite jungle où effectivement on peut s’égarer. Rares sont les fous qui arrivent à se frayer un passage entre les ronces. Une ambiance sereine et particulière règne dans ce lieu où le temps semble avoir fait une pause.

Le ruisseau d’Egarande a un débit variable au fil des saisons. Il n’est pas rare de pouvoir le traverser à pieds secs. La rive droite et le versant adjoint (le Devay) sont assez escarpés. La rive gauche, quand à elle, est composée de roche formant de petites falaises abruptes. Nous remarquons que ces remparts naturels sont complétés ça et là de murs de pierres sèches assez nombreux et n’ayant selon moi d’autre utilité que de fortifier les lieux. On trouve ça et là sur le haut de la falaise des regroupements de cupules gravées dans la roche. A titre d’exemple une roche à cupules trône dans le lit du ruisseau certainement détachée du haut de la falaise rocheuse. Coté Devay, il y a sur la crête, à proximité du pylône électrique de haute tension une grosse roche comportant de très nombreuses cupules. Le nom du lieu est « la Marcelline ».

Plus au sud dans l’axe Marlin-Tetrette, une autre roche « la pierre du Devay » a été calée et certainement transportée. Elle comporte de nombreuses cupules.




La pierre à cupules du Devay


Pierre à cupules dans le lit d'Egarande


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     Le promeneur lui, suit les chemins. Deux d’entre eux coupent cette vallée et traversent le ruisseau. Le premier est une voie antique venant de Saint-Chamond par Saint-Paul-en-Jarez, la Condamine puis rejoint Seyoux en passant par deux croix à la cime de chaque versant : la croix de Muse puis la croix du Cerisier (qui était probablement anciennement Casarie*). Nous nous attacherons à cette voie dans un prochain volet.

Une voie antique pour un lieu antique

Nous allons ici emprunter le second chemin qui est lui aussi le reste d’une une voie antique. Il longe actuellement le cimetière de Farnay, descend en direction du ruisseau et rejoint Granay. Un peu plus au Nord se trouve Rochabert ancien domaine chartreux dont les jardins suspendus dominaient cette vallée. Depuis le domaine de Rochabert les Chartreux avaient au moins deux chemins pour accéder à la rivière. Ils pouvaient ainsi circuler le long du cours d’eau et rejoindre Granay, Seyoux, Rive-de-Gier, Châteauneuf ou Sainte-croix.

Arrivé à la rivière, nous découvrons les restes d’un vieux pont massif en pierres sèches. A l’origine, le passage au-dessus du cours d’eau se faisait par ce pont/barrage dont la structure pouvait facilement supporter le poids des chars. Ce pont devait également faire office de retenue.

Peu avant, en accédant depuis Farnay, une longue dalle rocheuse garde les traces d’un passage fort fréquenté. Ce pont a certainement été point de contrôle ; puisque à sa proximité on trouve : abris sous roche, murs et constructions de pierres sèches dont l’une arrondie telle les restes d’une tour  (juste au niveau du pont). Mais, sur plus de deux kilomètres, cette rive gauche est fortifiée.

En amont, la barrière rocheuse se fait plus discrète pourtant le toponyme est « les gardes » ! Nous sommes dans le prolongement logique d’Egarande et au dessous de Tetrette (Grosse roche à cupules)




Le chemin



Le pont

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         Il y avait dans le secteur plusieurs domaines chartreux (Rochabert, Antouillieux, et peut être Ban) et plusieurs chemins d’accès discrets mais tout aussi directes à d’autres domaines tels que le logis des pères, Le Martouret, La Rabary et Sainte-croix-en-jarez. Tous les chemins mènent à Rome me direz-vous. En tout cas ces voies très secondaires facilitaient les liens entre domaines chartreux.

Plusieurs légendes sont rattachées à ce lieu d’égarande. Tout d’abord, un lieu où l’on s’égare qui est certainement issu d’une traduction rapide du nom Egarande mal compris. Ensuite, une légende de chevalier hantant les lieux et plus précisément le pont d’Arcole qui se situe plus au Nord à proximité de Rive-de-Gier. Ce pont aujourd’hui détruit était en fait un aqueduc (construit en 1889) transportant les eaux du Couzon à Rive-de-Gier. La légende a peut être au fil des ans été transportée d’un pont à l’autre.

Un souterrain partant du centre du village, sous l’Eglise, rejoindrait cette vallée  (peut-être au niveau du pont). Enfin, selon une « carte au trésor » trouvée dans le domaine de la Rabarie « les trésors » des pères chartreux sont à chercher dans le secteur.

Mais pourquoi pas… Un souterrain, une voie antique mais largement aménagée avec un solide pont, un lieu maudit, un chevalier (gardant ou hantant les lieux) et la proximité des domaines Chartreux voilà tous les ingrédients pour cacher les biens. Il nous manque encore la recette.

Ce chevalier légendaire rappel peut être à certains d’entre vous le mystérieux chevalier de Châteauneuf celui-là même qui rendait visite à Béatrix de Roussillon.

La zone a sans doute été une limite fortifiée (à l’image d’un oppidum) et lieu de passage sur voie antique surveillée par un poste. On peut dors et déjà parler de frontière mais il serait prétentieux de dire que ce vallon ait été l’unique frontière des Allobroges et Ségusiaves. Pourtant, sans aucun doute, l’homme s’est posté ici et a construit, protégé et filtré en ce lieu portant le nom gaulois de frontière sur des voies antiques.

Alors Egarande frontière gauloise, relais discret entre domaines chartreux, mystérieux chevalier, souterrain, trésor, cupules…nous verrons plus tard en prenant un autre chemin que cette recette riche en ingrédients est peut-être bien plus épicée.

Rémy ROBERT




Mur de pierres sèches



Grotte ou abri-sous-roche


Rochers




Roche-Habert(s)























à


Rochabert

... A SUIVRE ...