REPORTAGE REGARDS DU PILAT
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JANVIER 2008


Lionel 
Chevallier
présente


La Voie Ferrée
Saint-Etienne / Lyon



AVANT LA VOIE :


   Jusqu’en 1780, on faisait appel à des mulets, pour expédier le charbon de la vallée du Gier, plus gros bassin houiller français de l’époque.

   Ce charbon avait deux destinations principales. Une partie, filait vers le sud de la France, transitant par Condrieu, via le centre du village de Trèves. L’autre, affectée au nord et à Lyon, passait par la vallée du Gier, pour rejoindre Givors. Le Rhône servait, après Condrieu et Givors, de moyen de portage. La seule façon de rejoindre Givors depuis Rive-de-Gier, était de longer la rivière du Gier, en passant de nombreuses fois son cours à gué.

   Les mulets étaient conduits par groupes de dix, attachés les uns derrière les autres. Chaque groupe était conduit par un muletier. 800 bêtes étaient constamment en service. Leur nombre a avoisiné les 1200, et a pu atteindre parfois les 1800. Chaque mulet transportait environ 100 kilos de charbon (plus pour certains).

   En 1780, le canal de Givors (projet du lyonnais Zacharie) reliant cette ville à Rive-de-Gier, ouvrait. Il mit quasi un terme aux convois de mulets. La production de charbon évoluait au même rythme que les techniques d’exploitation. Celle des mines de Rive-de-Gier passait de 96000 tonnes en 1785 à 195000 en 1820. La compagnie du canal engrangeait de beaux bénéfices. Une sicelande (bateau qui naviguait sur le canal) transportait la charge de 400 à 700 mulets. Lors des grosses périodes, le canal pouvait voir passer quotidiennement 20 à 25 bateaux de 1000 hectolitres. Le doublement de ses tarifs en 1821, poussa certains à trouver un autre moyen de transport pour le charbon.


NAISSANCE D’UNE IDEE :


   Ce fut dans les mines qu’apparaîtra ce qui deviendra plus tard, la voie ferrée. Pour faciliter l’extraction des produits de mine, des planches étaient posées dans les galeries pour circuler plus aisément. Plus tard, le bois sur lequel s’adapteront des pièces de fonte, supportera les chariots des mineurs. Les rails d’abord de bois puis de fonte permettront ainsi aux bennes d’être poussées par des hommes ou tirées par des chevaux. La machine à vapeur, servait elle, a épuiser les eaux d’infiltration. Grâce à son emploi, on augmentait ainsi la profondeur des mines. Les deux moyens précités, associés, donneront un mode de transport prometteur.

LES ANGLAIS :


   Ce fut en Angleterre que verront le jour les premières voies ferrées. Georges Stephenson, qui cherchait à utiliser la vapeur comme moyen de traction, fabriqua une locomotive vers 1814. En 1823, avec d’autres, il monta une usine de fabrication de locomotives. En 1825, fut inaugurée la première ligne ferroviaire pour le charbon, Stockton-Darlington, de plus de 40 km.

EN FRANCE :


   Pierre-Michel Moisson-Desroches (1785-1865) ingénieur des mines adressa en 1814, à Napoléon III, un courrier dans lequel il projetait de faire 7 grandes voies ferrées sur le pays.

   En 1816, Louis Georges de Gallois-La Chapelle se rendit en Angleterre, et à son retour fit état des voies ferrées qu’il y vit. Il préconisa leur emploi chez nous.

   Louis Antoine Beaunier, lui, eut pour projet de construire une voie ferrée entre Saint-Etienne et Andrézieux.

   Les frères Seguin suivront, avec pour ambition de rejoindre Lyon à Saint-Eteinne et Andrézieux à Roanne.


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LES PREMIERES REALISATIONS EN FRANCE :


  En 1827 l’ingénieur Beaunier fait ouvrir la première ligne de France, Saint-Etienne-Andrézieux. Elle fut à voie unique. L’écartement entre les bords intérieurs des rails (1,445 mètre) était le même que celui des voies anglaises.

    En 1826, les quatre frères Seguin, et leur aîné Marc, tous ingénieurs, et Edouard Biot et Cie obtenaient l’adjudication de la concession d’une voie reliant Saint-Etienne à Lyon, de 58 km. A l’aîné des Sueguin, on devait, les ponts suspendus, les premiers grands tunnels, tel celui de Terrenoire long de 1500 mètres, et la chaudière tubulaire (1827).

Différentes sections du réseau Seguin seront ainsi ouvertes :

       * juin 1830 Rive-de-Gier-Givors, 15 km.

       * avril 1832 Givors-Lyon, 21 km.

       * octobre 1832 Saint-Etienne-Rive-de-Gier, 22 km.

   Pour beaucoup la ligne Saint-Etienne-Lyon, restera comme la première voie ferrée de France, car la section Saint-Etienne-Andrézieux n’était pas réalisée dans les mêmes conditions.


LA LIGNE DES SEGUIN :


     Durant les premiers mois d’exploitation de cette ligne, la traction animale fut quasiment exclusivement utilisée. A la descente (depuis Rive-de-Gier) les chevaux étaient placées dans les wagons où ils pouvaient se reposer et manger. La distance entre les deux villes était parcourue en 1 heure à 20 km/h. La vitesse était modérée par un conducteur qui actionnait un système de patins de bois frottant sur les roues. A la montée, un cheval remorquait 6 wagons vides de 1000 kg. entre Givors et Rive-de-Gier. Ils parcouraient 3 km. à l’heure. Chaque jour, 100 à 200 wagons chargés de charbon effectuaient la descente. Plus tard, au début 1831, le halage à la montée fut effectué par machine à vapeur entre Givors et Grand-Croix (un cheval pour cette section ne tirait que 3 wagons). De Givors à Rive-de-Gier, ces machines remorquaient 24 à 28 wagons vides ou 7 pleins soit 21 tonnes. La charge tombait à 9 wagons de Rive-de-Gier à Grand-Croix.

   La section Rive-de-Gier-Givors comprenait 11 tunnels dont 2 à voie unique (pour certains, ils étaient tous à voie unique). Des gardes, aux extrémités, communiquaient avec des cordons armés de sonnettes, pour arranger le trafic.

   Du 1° janvier au 31 octobre 1831, on transportera 120 000 tonnes à la descente, 10 000 tonnes à la montée, et 10 000 voyageurs. Le transport des voyageurs commença en 1831. Les gens étaient, au départ, installés dans les wagons à charbon. En 1844, on arrêta la traction par chevaux.

   En 1855-56, la ligne fut reprise, notamment les tunnels.

   En 1958, électrification de la ligne.


MAIS AUSSI :


    Le premier février 1833 : ouverture de la ligne Saint-Etienne-Roanne, 67 km. par Mellet et Henry, pour éviter la navigation par la Loire.

    Le prolongement du canal de Givors, en 1838, jusqu’à la Grand-Croix, ne parviendra pas à freiner sa chute. Il ne rejoindra jamais le Rhône à la Loire comme il devait le faire. La concurrence de la voie ferrée lui sera fatal.


LE TEMPS DES TRANSPORTS :


     Pour aller de Lyon à Saint-Etienne, il fallait :

       En 1760, 1 jour et demi.

       Vers 1820, 16 heures.

       En 1834, 5 heures.

   Les bateaux du canal mettaient environ 17 heures pour aller de Rive-de-Gier à Givors. Pour la même distance le train mettra, à ses débuts, moins d’une heure.


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LES COMPAGNIES DE CHEMINS DE FER :


    En 1853, les 3 compagnies des lignes de chemins de fer, de Saint-Etienne à la Loire, de Saint-Etienne à Lyon, et d’Andrézieux à Roanne, fusionnèrent pour donner la compagnie des chemins de fer de jonction du Rhône à la Loire. A la même époque, cette compagnie fusionnait avec le Grand Central de Morny. Ce fut sans doute vers 1855, que le Syndicat du Bourbonnais fut créé, puis en 1857 le Paris-Lyon-Méditerranée (PLM). La SNCF verra le jour un peu avant la 2°guerre mondiale.

Lionel  Chevallier




BIBLIOGRAPHIE :

Ces lignes sont essentiellement tirées de :

* La Loire, Berceau du Rail français de JC Faure et G Vachez.

* Rail passion.

* 150° année des chemins de fer à voyageurs.

* La vie du rail.

* SNCF bulletin numéro 32.

* Les cahiers de l’académie du Souillat numéro 5 de JM Duhart.

* 170° anniversaire de la locomotive Seguin, CERPI.

* Histoire de Givors par Etienne Abeille.


    Annexe : extraits du plan exceptionnel de la ligne Saint-Etienne-Lyon, aimablement prêtés par un particulier.

   On remarque sur ce plan ; le parcours du canal de Givors ; l’embranchement de Tartaras servant à amené des wagonnets des mines de ce village, à la station de Trèves ; et aussi à la hauteur de Couzon, l’ancien tunnel ferroviaire avant la rectification de la ligne.

     

     Toutes nos félicitations, pour la rigueur de cet article particulièrement précis, instructif et réalisé par notre ami Lionel.
   Si, informatiquement parlant, vous nous lisez grâce à Patrick Mercier, sans Lionel Chevallier, il n'y aurait jamais eu d'équipe des Regards du Pilat.
    Pourquoi ? Parce que nous en sommes les deux premiers membres à l'origine, oui, lui et moi. L'énigme de Trèves, vous connaissez ? Pour beaucoup d'entre vous, forcément.
   Eh bien, pour la toute petite histoire, tout a commencé à partir d'une visite chez lui, totalement secondaire et connue depuis 2004 des lecteurs du Vieux Secret.
    Ce grand mystère, on en reparle le 1er Février et pour ce qui est de ce reportage, réalisé avec des sources et de la matière par un passionné du sujet local, Lionel, il sera apprécié.     
    Par tous je l'espère, mais déjà par beaucoup d'amateurs du chemin de fer et j'en connais plusieurs précisément.

Thierry Rollat